PDV Kirishima (12)

5.4K 189 52
                                    

L'embrasser, poser mes mains sur sa gorge, ou disparaître entre ses reins, tout ça,  je l'avais attendu si longtemps. Ces images fantasmées s'étaient, pendant des mois, superposaient sur le plafond blanc de ma chambre alors que, dans mon lit, mon corps se contorsionnait pour tenter de trouver une position pour enfin m'endormir. J'avais imaginé ses lèvres s'écrasant tout contre mon torse, ses doigts traçant la courbe des muscles de mes bras. Et maintenant que tout cela avait été mis à la portée, je refusais. Non merci, ça ira. Je n'ai plus très faim.

Quel idiot. Enfin Katsuki n'était pas bien mieux. Ce que je lui avais déclaré plus tôt ce matin n'était que la mise en voix de ce qui, depuis des mois, était sous-entendu. Pour lui, j'avais offert mon temps, mes stupides conseils, mon stupide humour, tout en enterrant profondément mes stupides sentiments dans un trou sombre et étroit.

Quand je m'étais levé de ce siège dans le car, j'espérais si fort, malgré ma raison, que Katsuki m'attrape la main, me retienne près de lui, près de ce corps qui tremblait de jalousie. Lui-même ne s'en rendait pas compte. Courir après Midoriya était devenu, chez lui, un réglage par défaut. Plus fort que lui, plus fort que moi.

J'avais été prétentieux en supposant que mon amitié, que mes sentiments réprimés auraient suffi à lui faire détourner les yeux. Mais non. J'aurais essayé.

« - Eijiro ? Tout va bien ?

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.


« - Eijiro ? Tout va bien ?

Je relevai la tête.

- Midoriya ?

Mes pieds firent brusquement demi-tour à la vue de mon ami. Par grandes foulées rapides, je m'éloignai de la voix de Midoriya qui, dans mon dos, m'appelait en criant mon nom. Mon corps avait réagi tout seul. Voir Izuku me rendait bizarre. J'aurai voulu le détester mais ce n'était pas possible, il n'avait rien fait de mal. Il n'était même pas au courant que c'était en parti de sa faute si mes larmes coulaient.

La colère et la culpabilité m'étreignaient la gorge. Si seulement j'avais pu tenir un peu plus longtemps, trouver le mot juste, l'attitude juste et précise qui m'auraient ouvert les portes de l'esprit tourmenté de Katsuki... Un meilleur ami aurait su quoi dire, quoi faire. Je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même. Et dire que j'avais la prétention de me rêver héros...

Comme des coups de tambours, les battements de mon cœur résonnaient à mes oreilles. Le visage endormi de Katsuki, que j'avais tant de fois observé, me revint. Plus de sourcils froncés, plus de regard dur, plus de bouche tordu par les cris et les insultes, plus que ses lèvres entre-ouvertes pour laisser s'écouler un souffle tranquille, régulier. Ses cils frôlaient ses joues, ses cheveux couvraient son front. Je me mordis la joue.

Notre amitié n'était pas perdue, je m'en rendais compte. Néanmoins ces dernières heures m'avaient extorquées tout ce qu'il me restait de témérité et de détermination, comme si mon corps avait heurté un grand mur gris, coupant court à ma course effrénée à la poursuite d'un garçon qui se refusait à me regarder. 

Trop, j'étais trop. Je le savais. Toute son adolescence, il l'avait passé à construire cette illusion tout en la sabotant délibérément pour ne pas se retrouver seul face à son trop-plein d'émotions, quitte à développer une obsession, quitte à anéantir tout ce qu'il restait d'amitié entre lui et Midoriya en annihilant la confiance en soi de ce dernier. Je le détestais pour cela.


Après un regard vers ma montre et un coup de manche sur mes joues et mes yeux, je retournai vers le car devant lequel un groupe d'élèves piétinaient d'impatience. De loin, k'aperçus les cheveux blonds de Bakugo, immobile. Je détournai les yeux. 

Mina riait beaucoup. Un sourire me vint facilement. Puis Monsieur Aizawa suivi des autres professeurs nous accompagnant s'approcha de notre assemblée. Le silence se fit une fois qu'il se posta sur la première marche du véhicule, nous surplombant tous. 

- Vous allez pouvoir prendre place dans la car. Faites en sorte de vous asseoir à côté de votre binôme, déclara Monsieur Aizawa provoquant quelques protestations et soupirs vite tues. Je jetai un regard vers Midoriya. Il déglutit. Nous avons trois heures de trajet devant nous. Il est interdit de manger dans le car ou de s'installer autrement qu'assis sur les sièges. C'est tout. Faites honneur à votre école.

À nous quatreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant