Lundi 14 Décembre

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Lundi 14 Décembre :

Agathe stressait un peu ce matin là. Isaac était retourné chez lui hier soir, et elle n'avait pas de nouvelles depuis. Elle avait préféré ne pas lui en demander, de peur de l'étouffer. Cependant, elle avait réussi à le remotiver à venir au lycée le lendemain et allait donc passer le chercher pour qu'ils fassent le chemin ensemble. C'est fou d'imaginer qu'ils passaient tant de temps ensemble et semblaient ne même pas se connaître lorsqu'ils étaient au lycée.

Avant.

Elle avait peur qu'il se soit rétracté, qu'il préfère à nouveau s'isoler.
Pour se changer les idées, elle ouvrit la case du jour :

-"N'importe qui peut trouver la poussière chez quelqu'un, soit celui qui trouve l'or" -Prov.

Elle sourit à la citation qu'elle trouva très poétique. Elle aimait bien la manière dont les mots semblaient jouer entre eux. Mais ce fut la forme du chocolat qui retint véritablement son attention : du houx. Le houx était le symbole du Christmas Project de l'école primaire. Elle soupira. Clairement, l'univers essayer de lui envoyer un signal, mais elle avait déjà essayé et le refus avait été clair.

Puis, elle songea au visage souriant d'Isaac au milieu des sapins.

Elle allait réessayer.
Pour lui, elle allait réessayer.

En avance, elle partit de chez elle et tourna deux fois autour de son jardin pour ne pas arriver avec trop d'avance. Ensuite, elle sonna à la porte d'Isaac.

Elle entendit des éclats de voix, puis ce fut une femme qu'elle ne connaissait pas qui ouvrit.

Lya sans doute.

Celle-ci lui sourit gentiment, avant de lui demander d'une voix très douce ce qu'elle recherchait.

- Je viens chercher Isaac, pour aller en cours. Je suis Agathe, la voisine.

Elle ne savait pas pourquoi elle avait ressenti le besoin de se présenter.

- Lya, je suis...

Elle hésita, ne sachant sans doute pas comment présenter la situation, ni ce dont Agathe était au courant.

- Ravie de vous rencontrer, facilita Agathe avec un grand sourire.

L'instant d'après, Isaac sortait avec son sac et ils partaient dans l'autre sens. Elle ne l'avait vu que quelques minutes, mais Lya lui avait donné une bonne impression. C'était déjà ça.

Habituellement, Agathe se réveillait réellement dans le bus, au son de sa musique et au ronronnement du moteur. Ce jour-là, Isaac lui lança un regard trahi lorsqu'elle commença a enfoncer les écouteurs dans ses oreilles.

- Ma présence te déplairait-elle ? Dois-je y voir un message ?

Sachant pertinemment qu'il allait se transformer en véritable drama queen si elle ne cédait pas, elle renonça à sa musique ce matin-là. Elle ne le regretta pas. Elle connaissait assez bien son ami pour savoir que son retour au lycée l'inquiétait, les questions des autres, les cours qui le laisserait face à face avec ses pensées. Et quand il stressait, il sortait tout ce qui lui passait par la tête, sans aucun filtre.

Ce matin n'était pas différent.
C'est ainsi qu'Agathe arriva au lycée en pleurant de rire, chose qui ne lui était absolument jamais arrivé.

Elle accompagna Isaac jusqu'à ce qu'il retrouve ses amis, puis entreprit de les laisser ensemble.

- Tu es partie où?, Demanda Isaac en la voyant s'éloigner.

Elle fronça les sourcils :
- Je ne sais pas, mais je ne vais pas vous embêter toute la journée.

Elle trouvait ça un peu gonflé de sa part si elle se mettait soudainement à les suivre partout. Après tout, elle n'avait pas à imposer sa présence à Carmen et Oscar.

Mais le trio la regarda avec des yeux ronds :

- Je sais qu'on est un peu bizarre, donc je comprends si tu préfères ne pas être vu avec nous, mais sache qu'on serait très heureux d'apprendre à te connaître après tout ce qu'on a entendu, s'enquit Oscar.

Isaac lui lança un regard paniqué qu'Agathe n'interpréta pas. Elle était focalisée par la première partie de la phrase d'Oscar : bien sûr que non elle n'en avait rien à faire de ce que penseraient les autres ! Le fait que les amis d'Isaac puissent penser ça lui donna des frissons.

Elle s'expliqua donc et Carmen la tira vers elle :
- S'il te plaît, reste avec nous ! Je suis entourée de garçons toute la journée, je n'en peux plus, il se ligue tout le temps contre moi !

Agathe avait rit.
Et juste comme ça, une nouvelle phase de sa vie s'était ouverte.

Elle imaginait bien qu'ils devaient être sympas, sans quoi Isaac n'aurait jamais été ami avec eux, mais elle ne pensait pas devenir aussi vite à l'aise à leurs côtés. Ils en avaient tellement rien à faire du regard des autres, de la manière conventionnelle dont tournait le monde, qu'il était facile de se lâcher.

Carmen était exceptionnelle : elle voyait du positif absolument partout. Agathe comprenait mieux son style haut en couleurs : c'était simplement un reflet de sa personnalité. Elle était le genre de personne qui s'exclamait :

- Il pleut ! Génial, ça va faire du bien à la nature. Oh il ne pleut plus. Génial, il y aura peut être un arc-en-ciel. Oh il pluviote. Génial, c'est tellement agréable sur la peau !

Agathe était simplement fascinée par cette qualité.

Oscar quant à lui, n'avait pas une personnalité aussi noire que ses tenues auraient pu le laisser prévoir. Il était simplement d'un calme olympien et semblait avoir une culture générale sans fond. Ainsi, il pouvait aussi bien débattre des énergies utilisées pour le lancement des fusées que de la Révolution française. Ils eurent d'ailleurs une conversation passionnante à ce sujet avec Agathe alors que les deux autres étaient totalement largués.

Agathe avait été touché de voir la rapidité avec laquelle ils l'avaient adopté dans leur groupe : ils lui donnaient déjà toute leur confiance, toute leur amitié, toute leur sympathie alors qu'elle était une nouvelle addition.

En bref, elle était très heureuse d'avoir su voir au delà des apparences, au delà des rumeurs, au delà de ce qu'ils n'étaient pas.

Comprenant que sa journée collait à la citation, elle décida d'également la faire coller au chocolat et débarqua de nouveau chez la directrice de l'école primaire qui ne put retenir un sourire en voyant son regard déterminé.

- Ne me dites pas que c'est encore pour le Christmas Project ?

Agathe acquiesça et commença à réciter tout une ribambelle d'arguments qu'elle avait soigneusement préparés : ils pourraient motiver les enfants, garder un œil sur eux... La directrice l'arrêta d'un mouvement de la main :

- Nous n'avons pas besoin de mettre les enfants en danger en les mettant sous la protection d'adolescents sans aucune expérience.

Elle comprenait :

- Mais alors de quoi avez-vous besoin ?

La directrice sembla hésiter, considérer l'idée puis finit par avouer :

- Normalement on loue le grand théâtre de la ville et la troupe local offre une représentation spéciale aux enfants. L'endroit est exceptionnelle et c'est toujours le plus du projet. Mais cette année, le théâtre est pris par la troupe professionnelle qui prépare le grand spectacle de Noël. On ne sait pas par quoi le remplacer.

La troupe de Lya, songea Agathe. Puis sans réfléchir, elle déclara :

- On le fera. On fera une représentation à deux. Pour les enfants.

La directrice sembla incertaine mais finit par accepter. Le deal était le suivant : Agathe et Isaac participaient aux projets, sans embêter les enfants ni tenter de s'en occuper et en échange, ils s'occupaient du spectacle du dernier jour.

Deal.

Le théorème des papillotesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant