* Tout autour de moi brille de cette lumière blanche et aveuglante. Il n'y a qu'un seul endroit qui soit dans l'ombre et celui-ci m'attire, comme les abeilles le sont par le pollen. Je ne marche pas, mes pattes touchent à peine le sol alors que je cours comme si la mort elle-même était à mes trousses. Je sens enfin la fraîcheur de l'herbe sous mes pieds. Devant moi se dressent deux chênes gigantesques aux branches emmêlées, semblables à deux amants dans les bras l'un de l'autre. Je tends la main puis le décor change. Je me retrouve assis dans une taverne, avec deux autres personnes. Ils parlent avec agitation, mais je ne comprends pas leur langage et chose incroyable, je leur réponds dans cette même langue. La porte s'ouvre soudainement et laisse entrer un tourbillon de neige. Le vent fait s'envoler les quelques chapeaux posés négligemment sur les tables et leurs propriétaires s'empressent de les rattraper. Le nouvel arrivant est habillé tout de noir, sa longue cape cachant son corps. L'une de ses mains tient une épée, noire elle aussi. D'un coup d'épaule, sa cape tombe au sol et je remarque alors ses habits couverts de sang. Les clients se lèvent subitement, effrayés par son apparence. Ses cheveux sont longs, d'un noir de jais et ses yeux, rouges telles des braises, balayent la pièce. Son regard me transperce soudain et mes deux compagnons me tirent alors vers eux.
— Concentre-toi, ne le laisse pas prendre possession de ton esprit ! me supplie l'un d'eux.
Mais je n'y arrive pas. Il y a ce vide en moi, que lui seul peut combler. Je me débats et je sens leurs prises se raffermir sur mon corps. Puis tout devient noir. Seul, à nouveau. Mes compagnons ont disparu. Il y a cette présence, sombre. Elle s'approche de moi, ses paroles sont réconfortantes. Il me susurre qu'avec lui, je pourrais la retrouver. Puis je sens les autres Guerriers. Ils sont là, toujours, telle une présence réconfortante. Ils disparaissent à nouveau et je sais que c'est son œuvre. Je lutte, essaye d'échapper à son emprise. Sa colère augmente, mais je ne faiblis pas, j'ai juré à Feiry de ne jamais baisser les bras. Je le vois soudainement devant moi, il est immense. Il n'est qu'une Ombre dans ces ténèbres, la seule source de lumière provenant de ses yeux rouges.
Il m'appelle. Mon pied droit avance vers lui, un sourire dévoile ses dents blanches. Il regarde soudainement à sa droite, son sourire se transforme en grimace et ses yeux ne sont plus qu'une fente où la haine a pris place. Je sens une chaleur m'envahir puis une voix, douce et claire, m'ordonne de reculer. Mais avant que je ne sois hors de sa portée, il tend son bras portant l'épée et m'assène un coup à l'épaule. Autour de moi, les couleurs se mélangent, tantôt sombres et froides, tantôt accueillantes et chaleureuses. Les paysages se superposent les uns aux autres, je traverse un désert de glace puis me retrouve au beau milieu d'une forêt de pins avant d'être projeté dans des marais puants. Je n'arrive pas à m'extraire de ce tunnel sans fin. Devant moi, se rejouent inlassablement des scènes que je souhaiterais oublier, des scènes où le sang rouge vif se mêle aux larmes, aux cris et à la terre boueuse. Puis je sens soudainement le sol gelé sous mon dos. Un liquide poisseux s'écoule le long de mon épaule. Deux mains sont posées sur ma poitrine. J'ouvre lentement mes yeux. La lumière m'aveugle et je les referme aussitôt.
— Comment te sens-tu, Artya ? me demande une voix que je reconnais comme étant celle d'Aleyna, notre Guérisseuse.
Ma bouche est sèche, je n'arrive pas à articuler. Mon cerveau est encore embrouillé, mais Aleyna continue de m'encourager à ouvrir les yeux. J'essaye tant bien que mal de me relever à l'aide de mes bras. Un cri de douleur m'échappe et je retombe lourdement sur le dos en tenant mon bras gauche contre mon torse. Aleyna me demande de ne pas bouger. Je sais à l'intonation de sa voix qu'elle ne peut guérir ma blessure. Un liquide jaunâtre se répand autour de ma blessure, qui enfle à vue d'œil. La plaie commence déjà à noircir. Aleyna ne peut rien contre cette infection. Ses yeux me disent combien elle est désolée, mais je ne lui en tiens pas rigueur. Latis a trouvé le seul et unique moyen de bloquer ses pouvoirs, et le sentiment d'impuissance qui l'habite en ce moment la rend encore plus vulnérable que n'importe quel mortel face à la mort. Son Gardien est à ses côtés, mais Era est tout aussi désarmée qu'elle. Eyline, la Griffon, et Tibra, sa Kurya télépathe, sont aussi présentes. Où sont passés Maël et Kizah ? Que leur est-il arrivé ?
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Les Guerriers Drakyens - Tome 1
Fantasy- Pourquoi j'ai ce besoin de te toucher quand ça ne va pas ? Pour seule réponse, Eldian la serra plus fort contre elle. "Parce que nous sommes toutes les deux complémentaires. Parce que nous sommes un Guerrier Drakyen. Parce que ton corps ressent ce...