𝐌𝐞́𝐥𝐢-𝐌𝐞́𝐥𝐨 #5

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▪︎ Des fois j'imagine sa présence comme si on était encore ensemble. Je me demande ce qu'on aurait fait hier, ce qu'elle m'aurait dit aujourd'hui, et si demain, on aurait dormi ensemble. Qu'aurait-elle fait durant le week-end, m'aurait-elle appelé ? Ou bien, m'aurait-elle accompagné à ce repas de famille ? Toutes ces questions laissées sans réponses qui tournent et qui tournent encore dans ma tête ; j'imagine un futur inexistant, je me crée de faux souvenirs qui ont l'air tellement vrai. Je ferme les yeux et là, tout d'un coup, je la vois qui me sourit. Elle me regarde de ses yeux protecteurs et amoureux. Et puis, j'entends sa voix qui me chochotte à l'oreille et j'imagine aisément ce que ces mots me susurrent. À mon tour, je lui répond sur le même ton complice, et elle conclue notre conversation de son rire enchanteur. Quand soudain, je sursaute. Une tape amicale me fait revenir à la réalité, écrasant par la même occasion mes aspirations irréaliste ; tout ça n'existera plus.

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[ Et si le monde qui nous entoure ne serait rien d'autre que le fruit de notre imagination ? Un peu comme la théorie disant qu'Harry Potter aurait inventé le monde des sorciers, nous serions alors en train de rêver de notre propre vie ; et la mort apparaîtrait comme une sorte de naissance dans la vie réelle. Cela voudrait dire qu'ayant peur de la mort, nous serions en réalité angoissés à l'idée de nous lancer dans la véritable vie, et nous préférerions rester dans un monde imaginaire. Mais il ne fait pas bon de s'installer dans les rêves en oubliant de vivre. Personne n'est revenu à la vie pour démontrer le contraire, alors devrions nous réellement avoir peur de la mort ? ]

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<< À toi mon ami,
Je pense qu'il est temps que nos chemins se séparent.
J'ai relu nos conversations et j'ai pu voir l'énorme changement qu'elles ont connu ; nos messages, nos appels se transformant en nuit blanche, nos délires, nos fous rires, tout a disparu. Certain de nos SMS prouvent pourtant l'envie que nous avons ressenti de recoller les morceaux. Mais les temps passés ont apporté à chacun un lot de problème qui a ébranlé nos vies et qui laisse désormais sa trace sur nos cœurs fragilisés. Alors, je pense qu'il faut que l'on s'arrête ici. Qu'on laisse nos âmes vagabonder sur des chemins différents, afin d'apprécier, sans remords, de vivre pleinement les opportunités que nous offrent nos propres destins.
Ce soir, je ne t'enverrai pas de messages ; mais ce n'est pas un adieu, juste un au revoir. Car, qui sait ? Peut-être que nous retrouverons un jour. >>

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J'aurais voulu lui dire que je n'avais pas besoin d'un ami de plus à l'étranger. Ce dont j'avais besoin, c'était d'un ami présent ici, là, près de moi. Mais une fois parti, à quoi me servirait-il ?

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Un jour, quelqu'un m'a dit qu'il n'utilisait jamais le terme d'ami. Même pour les personnes dont il était le plus proche. À l'époque, je trouvais ça absurde. Maintenant, je le comprends.
Dans le fond, ce n'est qu'un mot parmi tant d'autre, une vulgaire appellation qui ne prouve rien, qui ne garantit rien, qui ne fait rien d'autre qu'accroître la douleur lorsque l'on vous poignarde dans le dos.

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À ce moment, je n'avais pas besoin que l'on le console. Je n'étais pas encore prête. C'était trop récent, ça faisait encore trop mal. Non, j'avais simplement besoin qu'on m'écoute inlassablement et sûrement de manière barbante, raconter mes tourments. Cela m'aurait probablement permis d'y voir plus clair ; de pouvoir faire le tri dans les afflictions qui brouillaient mon esprit. Et ça m'aurait à coup sûr offert la possibilité de guérir plus tôt ; voir de guérir tout court.

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《 Tu étais belle aujourd'hui ; si belle que j'ai bien dû passer une heure à te regarder, souriante, accueillir les invités qui arrivaient à tour de bras. Avec gentillesse, tu prenais leur manteau puis les guidais jusqu'au salon, avant de retourner à tes fourneaux le temps que la sonnerie retentisse de nouveau. Tu étais belle, maman, vraiment. Si belle que j'avais détourné les yeux de mon occupation rien que pour t'observer. Mais ce jour-là, quelqu'un d'autre est encore plus beau que toi. Il a malheureusement fallut que tu ouvres une énième fois la porte pour que ta beauté ne se fane au profit d'une jeune fille blonde, d'à peu près mon âge.
La pluie s'était mise à tomber et tu t'étais empressé d'inviter les nouveaux invités à venir se réfugier à l'intérieur. Ses cheveux couleur d'or, tombé lourdement sur ses épaules, et leurs pointes humides venaient se coller contre ses bras. Elle avait l'air frigorifiée et ses légers frissons face au contraste de température entre l'extérieur et notre feu de cheminée confirmèrent mes soupçons. Mais pourtant, je fus bien incapable de faire quoi que ce soit. Elle était si belle comme ça, complètement trempée, le maquillage et la coiffure défait, sa tenue anarchique ne faisait que resplendir d'avantage sa beauté naturelle.

Tu lui fis quitter sa veste, invitas ses parents à faire de même, puis vous vous dirigeâtes vers le salon. Mais à ce moment-là, elle changea de trajectoire. Ses yeux verts rencontrèrent les miens, elle me sourit.
Mes joues se mirent à rougir de cet échange, et les brûlures s'intensifièrent lorsqu'elle se rapprocha. C'est comme ça que j'ai pu remarquer que ses pommettes à elle, avaient également rosie. Puis je la vis ouvrir la bouche et avant que je ne puisse préparer mon cerveau à son intervention, elle fit :

— Salut, je m'appelle Lucile, et toi ?

J'eus un hoquet de surprise. Le son timbre de voix était cristallin, et ce son pur envoûta mon corps donnant l'irrépressible impression que je pouvais soudain suivre jusqu'au bout du monde cette totalement inconnu si elle me permettait rien, qu'une fois, de réentendre le chant mélodieux de ses cordes vocales. 》

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𝐃𝐞𝐬 𝐌𝐨𝐭𝐬 𝐬𝐮𝐫 𝐝𝐞𝐬 𝐌𝐚𝐮𝐱 [𝐑𝐞𝐜𝐮𝐞𝐢𝐥 𝐝𝐞 𝐓𝐞𝐱𝐭𝐞𝐬]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant