Après s'être gentiment moqué de moi, m'avoir mis au défi et m'avoir laissé descendre trois marches qui m'avaient rendu haletant et tremblant, Melcrith m'avait simplement soulevé dans ses bras comme si je ne pesais rien et m'avait porté jusqu'au bas des escaliers.
Le manteau de cuir noir qu'il me remit dans le grand hall me permit de cacher ma poitrine nue, mais puisqu'il n'était pas question qu'il me retire l'écarteur d'œil de tigre, nous dûmes faire le voyage en fiacre. Il n'était évidemment pas possible que je chevauche avec un objet dépassant ainsi de mon intimité, cela aurait été trop dangereux.
Osmium conduisit donc le fiacre et je demeurai assis dans une position qui n'appuyait pas sur l'anneau, en essayant de ne pas bouger.
Je commençais à prendre la pleine mesure de ce qui était infligé aux humains. Le plus difficile n'était pas comme je l'avais redouté, la douleur – il n'y en avait aucune – ni l'humiliation – Melcrith me respectait sincèrement. Le plus éprouvant était qu'il n'était pas permis à un esclave d'oublier sa condition. Que ce soit les spécificités des vêtements, l'anneau, ou l'écarteur, un esclave devait être conscient à chaque instant, à chacun de ses gestes, de ce à quoi son rang le réduisait.
Pourtant, je comprenais aussi pourquoi les esclaves de Titane ne s'étaient jamais rebellés en cent ans. Nombre d'entre eux devaient en avoir envie, mais tout était mis en œuvre pour créer un sentiment de vulnérabilité et de dépendance. Les déplacements étaient compliqués, la multiplication des plaisirs, associée à une certaine forme de privation, procuraient une sensation de vertige permanente assez peu propice à la révolte ou à la fuite.
― Est-ce que ça va ? me demanda Melcrith.
Mon regard était focalisé sur les hautes bâtisses, les flèches des toits d'ardoise, les ponts et les rambardes de fer forgé depuis lesquels les passants bien habillés pouvaient observer le reste de la ville, en contrebas de Titane.
― Oui. J'étais en train de penser aux raisons qui faisaient que les esclaves ne se révoltaient pas.
― Il y a déjà eu des tentatives, fit-il remarquer. Et tous les mois, des maîtres viennent déclarer la disparition d'esclaves. Parfois on les retrouve, parfois non. Les esclaves en fuite quittent la ville quand ils le peuvent.
Melcrith afficha un petit sourire en coin.
― Si tu avais réellement été mon esclave, dit-il à voix basse, je me demande au bout de combien de temps tu m'aurais échappé.
― Je ne suis pas du genre à m'enfuir.
― C'est vrai. Tu es plutôt le genre d'homme à attaquer de front. Tu aurais sans doute réussi à me planter une lame dans la gorge, ou dans le cœur.
― Je ne ferais jamais ça. Si la situation avait été réelle et que je te devais de l'argent, je me serais acquitté de ma dette.
La seule idée de m'en prendre physiquement à Melcrith me révoltait. Il était tout à mes yeux. Sa bienveillant, le respect, l'affection profonde que j'avais pour lui m'empêchaient de m'imaginer trahissant sa confiance.
Il m'adressa un long regard. Son expression était indéchiffrable.
Osmium fit s'arrêter les chevaux devant une grande demeure du centre de Titane et Melcrith qui me dévisageait toujours dit doucement :
― Nous sommes arrivés.
Il ouvrit la portière du fiacre et m'aida à descendre avant d'indiquer à Osmium à quelle heure venir nous chercher.
Je pinçai les lèvres et le suivis jusqu'à un petit perron dont je montai les marches derrière lui, lentement, contenant à grand peine le débordement de plaisir. La pierre du phallus pétrissait tendrement mes chairs et la petite glande qui me donnait plus de plaisir que je n'en avais jamais connu semblait devenir plus sensible au contact de ma pierre d'harmonie.
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Mâchefer
VampireLe Royaume d'Argyre vit une époque sinistre. Le règne des humains n'est plus depuis l'avènement des mâchefers, des êtres aux crocs d'acier buveurs de sang. Et des meurtres inexpliqués terrifient les habitants de la capitale. Cobalt, un inspecteur hu...