Chapitre 19 - Cobalt

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Je n'avais pas eu de nombreuses amantes dans ma vie. Je pouvais en réalité les compter sur les doigts d'une seule main. Souvent, je m'étais demandé si mon manque d'expérience et le leur avaient été la cause de mon manque de plaisir. Mais jamais je ne m'étais abaissé à payer une pauvre prostituée de Lenclume, mal-nourrie et maltraitée, pour vérifier qu'une amante plus expérimenté soit ce qui manquait à mon plaisir.

Et j'avais bien fait. Car aucune femme, semblait-il, ne pourrait jamais me faire éprouver ce que j'éprouvais avec Melcrith. Le plaisir, avec lui, était un art dangereux et complexe à l'instar du combat qu'il m'avait enseigné. Perdre contre lui avait des conséquences terribles et merveilleuses. Et Melcrith était un professeur qui dans ce domaine, n'entendait pas me laisser l'emporter sur lui.

Je l'entendis déboucher un flacon, et l'instant d'après, il m'attira à lui. Je m'assis, le dos contre son torse, la tête appuyée sur son épaule, ses bras étaient autour des miens et je ne pouvais plus voir son visage. Mais être enveloppé de sa présence fit ressurgir un autre aspect de notre relation, c'était différent d'être allongé, jambes écartées et de gémir en suppliant. Il m'offrait sa haute stature comme un refuge dans lequel me blottir. Melcrith était le protecteur, c'était quelque chose inscrit en lui comme la couleur de ses yeux ou la fermeté de ses mains. Cet entraînement n'en aurait que le nom. Ce qu'il voulait c'était m'étreindre et me toucher, m'entourer de la sécurité de son corps.

Ce serait comme dans la ruelle de Cinabre, compris-je. Il n'était pas question de performance. C'était ainsi que nous apprenions à nous connaître, en maniant nos corps comme des épées, sans formuler de promesses, sans poser de questions, à même la peau et les muscles, dans la douloureuse sincérité de la chair et des battements de cœur. Je me détendis encore contre lui. Les instruments de pierre n'étaient guère plus effrayants que des épées d'entraînements dans les mains de Melcrith, il n'y avait pas d'épreuve ou de douleur infligée. Il ne faisait qu'utiliser des outils pour me révéler ce dont mon corps était capable.

Sa main plongea entre mes cuisses, ses doigts me trouvèrent, chaud, sensible et frémissant et ils me pénétrèrent à nouveau. Je gémis, peu soucieux de faire le fort. Mon conduit était glissant d'huile et la sensation était toujours aussi dérangeante. Était-il également inconfortable pour les femmes d'être humides ?

Je n'eus pas le loisir de réfléchir à une question aussi malvenue. Melcrith plaça le plus petit phallus de ma parure dans mon champ de vision.

― Tends ta main, m'intima-t-il.

Il y versa de l'huile et me remit l'instrument pour que je le lubrifie. L'avoir dans les mains me permit de sentir sa forme exacte et l'énergie enivrante de l'œil de tigre que j'adorais déjà. Cet exercice me rassura : ce phallus était à peine plus gros que les petits instruments d'essayage du bijoutier, il n'allait pas me faire mal et la pierre était parfaite. Mon appréhension était complètement retombée quand Melcrith embrassa ma tempe, je compris que c'était ce qu'il avait cherché.

― Est-ce que tu es prêt ? me demanda-t-il à l'oreille.

― Oui, soufflai-je, étonné de découvrir que non seulement je l'étais, mais qu'en plus je me sentais impatient.

― Alors allonge-toi sur le ventre, ce sera plus confortable.

J'obéis sans mal, cette position me sembla moins intimidante qu'être à quatre pattes. Je m'allongeai sur le divan et pris un coussin que je plaçai sous ma tête. Melcrith chassa les autres sans ménagement, pour nous faire de la place et ils tombèrent par terre, jonchant le tapis.

Je pliai les genoux pour lui laisser de la place, mais il en décida autrement : soulevant le bas de mon corps comme si je le pesais rien, il s'installa sous moi, mon bassin sur ses genoux de manière à ce que je sois couché en travers de ses jambes comme s'il allait m'administrer une fessée.

MâcheferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant