dix huit

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Assise sur la cuvette de mes toilettes, ça fait plus d'une heure que j'essaie de reprendre ma respiration dans une vitesse plus lente.Il doit être aux alentours de deux heure du matin, et je ne fais que pleurer. J'ai commencé à me lever pour aller prendre un somnifère, puis quand je me suis rendue compte à quel point j'étais minable j'ai commencé à éclater en sanglots.

Sneazzy lui dort dans mon lit, je ne sais même pas s'il m'entend, et à vrai dire vu le point auquel j'en suis, habillé dans cette culotte rose en tulle et d'un débardeur assorti, je n'ai qu'une envie c'est de retrouver le sommeil.Mon reflet dans le miroir me donne envie de vomir. Mes cheveux sont rassemblés dans un haut chignon et ma peau est tellement pâle qu'on peut douter du fait que je sois encore vivante.

Je ne sais même pas si je me rends compte à quel point je suis bête. J'ai l'impression de passer à côté de ma vie, ou du moins de la vivre parallèlement. J'ai l'impression de n'être que le public, et pas l'actrice principale. J'ai même l'impression qu'elle n'a aucun sens, aucun avenir. Parce que j'ai beau gagner mon argent dans le milieu du cinéma aujourd'hui, je me demande qui sera avec moi le jour où je voudrais tout plaquer.

J'ai juste envie d'hurler, de douleur, comme un besoin qui se ressent. Mais tout ce qui sort de ma bouche est une vague de larmes qui me brise le cœur.

-Wesh qu'est ce tu fous ? Me demande Sneazzy, habillé seulement d'un caleçon et qui se tient dans l'encadrement de la porte

Il s'approche de moi mais je me recule, sauf plus ça continue comme ça, plus je me rends compte que le mur me bloque.

-Merde mais fais pas la gamine ! T'as quoi ?

Il commence à poser sa main sur mon épaule, mais rien que ce simple contact me fait ressentir une multitude de frissons que je ne peux pas supporter

-Lâche moi ! Hurle je presque

Le rappeur se recule alors dans un sursaut en fronçant les sourcils.

Je recroqueville mes genou contre ma poitrine et pose mes coudes dessus.

-Pardon, je suis désolée...je...je fais juste une petite crise de panique c'est rien.

-T'en fais souvent ? Me demande t il dans un air soucieux

-Non...enfin je sais plus c'est compliqué.

-Vas y j'ai tout mon temps.

Dit il en se mettant dans la même position que moi en face de mon corps, faisant toucher nos pieds et nos chevilles.

Je commence alors à froncer des sourcils, ne comprenant pas son comportement.

-Depuis quand ça t'intéresse ? Tu ne fais que me lancer des méchancetés et critiques depuis qu'on se connaît.

-J'ai juste envie de savoir ce qui se passe dans ta putain de tête. Dit il en pointant du doigt mon visage

-J'ai pas envie de te parler.

-Tres bien parlons d'autre chose.

-T'as pas compris ce que je viens de dire ou quoi ?

-T'es pas facile à aimer hein ?

-Je te demande pardon ?

-T'es toujours là à contredire le moindre compliment ou remarque positive qu'on te lance. Tu repousse tous les gens qui veulent être là pour toi et peut être te procurer du bien dans ta vie. T'es toujours froide et hautaine. À croire que t'es comme ça dans ton caractère mais j'en doute fort. À croire même que t'as pas de cœur.

Mes yeux rivés sur mes ongles que je triturais, je relève mon regard pour lui donner mon plus grand regard noir.

-Ça ne te regarde pas. Dis je en me levant et en sortant de la salle de bain

-Non sérieux dis moi ! Dit il en me suivant

Alors qu'il me pousse à bout je me retourne le tellement vers lui pour lui faire face.

-Parce que ce n'est pas si facile d'aimer quelqu'un, de lui faire confiance, et d'être sûre qu'il ou elle ne te fera pas un coup de pute ou te plantera un couteau dans le dos d'un jour à l'autre. Ce n'est pas facile de s'ouvrir aux autres quand dans ce milieu, toi même tu dois le savoir. Avouais je en haussant des épaules

-Ça ne répond pas au fait que t'es froide et hautaine avec tout le monde qui ne te croise ne serait ce qu'une seconde.

-Mais parce que je me suis tellement ouverte aux autres que j'ai fini par être blessée. Alors la seule solution que j'avais c'était de me renfermer sur moi même. De ne plus montrer la moindre émotion que je ressentais. Car il n'y a que comme ça que t'es soit qu'on ne te fera plus de mal.

-Et tu crois que tu ne procure pas de mal aux autres en restant muette et blasée à longueur de journée ?

Je le regarde dans le blanc des yeux tandis que je le contourne pour retourner dans mon lit, remarquant que même s'il m'a poussée à bout, il a réussi à faire passer ma crise de panique.
Je m'installe alors dans mes draps, l'esprit occupé par sa dernière phrase.

Alors que je sens son corps s'allonger à côté du mien, plus personne ne parle, seul nos respirations se font entendre, et les voitures qui passent en bas de la rue parisienne. Nous sommes deux à fixer le plafond, les pensées avides.

-T'es déjà tombée amoureuse ? Me demande t il d'une voix creuse

-C'est quoi cette question ? Dis je en fronçant des sourcils.

-Une fois, seulement une, et ça a été dur. C'était au lycée, j'avais quinze ou seize ans et c'était l'année de ma seconde. J'étais loin d'être le plus populaire, plutôt le fouteur de merde que tout le monde trouvait con et que les profs n'y voyaient aucun avenir. J'ai commencé à flasher sur une meuf. Le canon du lycée, je te jure.Brune, grande, élancée, un mannequin le bail. Elle était en première à ce moment là, tous les mecs étaient en chien sur elle c'était un truc de fou. J'ai pris mon courage à deux mains et je suis allé la voir. De fil en aiguille, vers avril on a commencé à sortir ensemble. J'étais comblé, je me serais trop frais, et au bout de deux semaines même pas, j'étais déjà fou d'elle. C'était vers mai ou juin, le lycée organisait un bal de promo, et fallait se trouver une cavalière, comme le délire des States. Alors je lui ai proposé qu'on y aille ensemble. Le soir je l'ai attendue en bas de chez elle, j'avais même volé un costard dans la boutique de costume en bas de mon bâtiment pour l'occasion. Mais elle n'est jamais venue. J'avais essayé de l'appeler mais rien. Alors je suis allé à cette soirée tout seul, pensant qu'elle m'attendait là bas. Mais quand je suis arrivé là bas, je l'ai vue avec un autre gars, et à ce moment là j'ai voulu m'enfuir en courant. J'ai eu le cœur brisé, je me suis senti humilié, pire, j'avais honte de moi.

Je me retourne vers lui à la fin de sa tirade, et je vois dans son regard qu'il a l'air touché, triste de se remémorer ce souvenir.

-Alors tu vois, tu n'es pas la seule à être blessée des autres, mais ce n'est pas pour autant que je me comporte comme toi tu le fais avec les autres.

Je fronce des sourcils, puis le vois se lever, se rhabiller et dans un dernier regard s'enfuir.

C'est quand j'entends la porte d'entrée se claquer que je comprends qu'il est vraiment parti.Et c'est à ce moment là que je me rends compte à quel point je déteste autant ma personne.

Idylle amoureuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant