Chapitre 1 : Rencontre

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Sur un banc devant la gare d'Euston, au sud-ouest de Londres, Ewen Campbell se tenait assis, feuilletant l'édition du matin du journal The Times. Ledit journal relatait, comme à son habitude, divers faits, des annonces, des articles, quelques extraits de nouvelles, la rubrique des mariages et des décès.. Mais pour une fois, Ewen Campbell, restait fixement attiré par un article en particulier.

Ses yeux se perdaient dans le vide. Il réfléchissait intensément. En vérité, son regard se décollait du journal à intervalles réguliers pour regarder les bâtiments autour de la gare. 

Il plongea un moment dans la contemplation silencieuse de cette marée humaine. Ici et là, s'affairaient diverses personnes de différentes statures, de physiques différents. Il soupira. Tous ces londoniens marchaient avec précipitation sans observer autour d'eux.

Observation. Déduction. Analyse. Trois qualités rares et sous-estimées. Trois qualités dont toute la population mondiale semblait dépourvue. 

Ewen n'irait peut-être pas jusqu'à dire que les gens autour de lui étaient idiots, loin de là. Seulement.. Inattentifs, cela était plus que certain. 

Ce qui causait un tel émoi chez ce jeune homme, c'est l'article sur lequel s'étaient posés ses yeux dans le train qui l'avait déposé à cette gare. L'auteur de l'article n'était pas cité et cela était fort dommage car Ewen Campbell aurait apprécié faire la connaissance de cet être qui partageait son point de vue.

Secouant sa main, il redressa le journal froissé et, pour au moins la septième fois, relut l'article en question.

"En partant d'une goutte d'eau, disait l'auteur, un logicien pourrait déduire la possibilité d'un océan Atlantique ou d'un Niagara, sans avoir vu l'un ou l'autre, sans même en avoir jamais entendu parler.

Ainsi toute la vie est une vaste chaîne dont la nature nous devient connue chaque fois qu'on nous en montre un seul anneau. Comme tous les autres arts, la Science de la Déduction et de l'Analyse est un art que l'on ne peut acquérir que par une longue et patiente étude, et la vie n'est pas assez longue pour permettre à un homme, quel qu'il soit, d'atteindre à la plus haute perfection possible en cet art.

Avant de s'appliquer aux aspects moraux et mentaux de ce sujet qui sont ceux qui présentent les plus grandes difficultés, le chercheur fera bien de commencer par résoudre des problèmes plus élémentaires.

Quand il rencontre un homme, qu'il apprenne, rien qu'en le regardant, à connaître l'histoire de cet homme, la profession, son métier. Tout puéril que cet exercice puisse paraître, il aiguise les facultés d'observation et il vous apprend où l'on doit regarder et ce que l'on doit chercher.

Les ongles d'un homme, les manches de son vêtement, les genoux de son pantalon, les callosités de son index et de son pouce, ses manchettes, son attitude, toutes ces choses révèlent nettement le métier d'un individu. Il est presque inconcevable que, si tous ces éléments sont réunis, ils ne suffisent pas pour éclairer le chercheur expérimenté."

Époustouflé. C'était le mot juste qui définissait l'état d'esprit du jeune homme. Ewen se releva et s'étira discrètement.

Il n'était pas très grand pour un homme, à peine un mètre et soixante-treize centimètres. Des cheveux bruns coupés courts étaient soigneusement coiffés sous le chapeau haut de forme noir qu'il portait. Il avait des yeux bleus d'une couleur particulière, possédant des pupilles plus sombres que la plupart des habitants de cette planète. Il portait également une moustache taillée avec soin de la même couleur que ces cheveux.

En ce qui concerne ses traits, il possédait un visage fin à la peau délicate. Un nez concave discret soutenait une paire de lunettes à la monture dorée qu'il ne mettait que pour améliorer son temps d'accommodation visuelle. 

Un séjour à Baker StreetOù les histoires vivent. Découvrez maintenant