La Guéparde Dorée - Double-âme [1]

Chapitre 37 :

chemin, dès qu'ils auront étudié la carte et les itinéraires. Je leur ai laissé la carte, sachant que je fais plus confiance à Kyle qu'en moi pour ça. Je ne suis pas une brêle en orientation, mais je n'ai pas l'habitude d'utiliser une carte pour savoir où je vais, Ash n'a pas l'air d'être plus doué que moi, ceci dit. Bref, on compte sur M. Tatoué pour déchiffrer tous les petits symboles en bas de la carte.

En attendant, la vie ne s'arrête pas et j'ai des tâches à remplir. J'entre dans la cour d'entraînement, où j'ai entraînement aérien. Je me fige net.

Droit dans mon champ de vision : Kallol.

Un peu à l'écart du groupe, il fait nonchalamment tourner deux sabres dans ses mains. Il n'y a aucun doute sur la raison de sa présence : il a été affecté à mon demi-groupe d'entraînement. Je muselle fermement la colère qui remonte en moi, brûlante, acide, dévastatrice, et me place le plus loin possible de lui. J'ai fait quoi à qui pour avoir une poisse pareille ? J'essaye d'effacer le souvenir de sa main sur ma cuisse et ma poitrine se compresse. Je dégaine mes dagues et commence à m'entraîner. Je m'efforce d'ignorer le poids de son regard sur ma nuque, mais je tire de plus en plus fort, les dents de plus en plus serrées. Au moment où ma rage se débat si fort en moi qu'elle commence à glisser hors de mon contrôle, une voix retentit à mes côtés. Je m'y accroche désespérément, comme à une échelle de secours. Je ferme les yeux.

- Tu es en forme ! Tu les as toutes misent dans le mile.

C'est Enil, qui m'a rejoint avec Sacha à ses côtés, comme toujours. Il fait une moue impressionnée et je souffle lentement par le nez. La présence de mes deux amis m'aide me calmer et je sens ma cage thoracique se relâcher. Sacha me sonde du regard et fronce les sourcils. Son bras glisse des épaules de son petit copain et il s'approche en prenant garde à ne pas me toucher, prudent.

- On dirait que tu as une barre dans le dos. Qu'est-ce qui ne va pas ?

Mais je suis bien incapable de laisser sortir ce sentiment maladif et oppressant. Je secoue la tête en silence et ils comprennent. Ils viennent à côté de moi et on commence à s'entraîner ensemble. Eux mieux que personne savent que les actions calment plus que les mots. Quelques minutes après, M. Châle se plante en plein milieu de la cour et apostrophe Kallol :

- Toi, le nouveau, viens nous montrer ce que tu sais faire !

Tout le monde s'arrête de tirer et se tourne vers l'entraîneur, formant un cercle entre l'élève et le prof. Kallol pose un regard dubitatif sur le prof.

- Vous voulez que je me batte contre vous ?

L'amusement dans sa voix claironne qu'il ne pense même pas une seconde que le prof gagnerait. Comment autant d'arrogance peut-il tenir dans un seul corps ? Un grondement menaçant monte dans ma gorge, mais je l'étouffe dès que je m'en aperçois.

Garde ton sang-froid.

De toute façon, il sera remis en place par M. Châle. Des murmures parcourent la foule. La plupart pronostiquent que le prof ne va pas le rater. Je suis de ceux-là. Une joie mauvaise s'infiltre dans mes tripes. Je veux le voir à terre. Humilié. Je veux qu'il se rende compte qu'il n'est rien. Celui-ci darde froidement ses yeux sur l'élève.

- Je n'ai pas coutume d'envoyer mes élèves à l'infirmerie le premier jour.

Les yeux vert sombre de Kallol étincellent. Il ne fait rien pour cacher un sourire.

- Si le prof a peur d'un duel, les élèves doivent être terrifiés...

Mes mains se resserrent sur mes dagues. Il a piégé le prof. Cette fois, ce n'est plus une question de test. Tous les novices qui s'apprêtaient à quitter la cour pour nous laisser passer se sont arrêtés et suivent avec attention l'échange. M. Chale dit toujours que « la peur est notre meilleure amie dans l'Arène. C'est elle qui nous avertit du danger, mais c'est à nous et à nous-seuls de réagir face à lui. » S'il refuse de faire ce duel, il admet que Kallol est un potentiel danger pour lui. Il doit reprendre le respect que Kallol a mis en doute. L'entraîneur semble bouillonner de colère. Il ne va en faire qu'une bouchée. Son regard transperce le nouveau-venu.