o2 : l'ange qui ne doit sa vie qu'à Dieu

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CRYSTAL

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CRYSTAL.


— Tiens, tiens, tiens, qu'a-t-on là, Mademoiselle Bel-Ange ? susurre Basil avec triomphe, un paquet de cigarettes dans la poigne, le volant dans l'autre.

Quelques secondes plus tôt, alors que je jaugeais mon visage dans le rétroviseur, les Lulaa's que j'ai chipées ont décidé de visiter les tréfonds de la voiture, redirigeant l'attention de notre chauffeur sur leur présence résultant d'un acte que l'on jugerait malhonnête.

À l'arrière, Miss Daoud, n'ayant pas perdu une miette de la scène, quitte son poudrier des yeux et agite son rouge à lèvre dans ma direction en me sermonnant :

— Alors là ! Cela fait à peine quelques heures que l'on est au village, et déjà, tu te dégourdis les doigts ? Je t'ai amené à Dream's Hollow, je peux très bien t'en sortir dans le prochain train.

Voyant que le petit sourire que j'arbore n'est pas près de ternir, l'élégante dame opte pour la culpabilité en pointant mon côté respectueux et sensible :

— Trimballer cette croix en commettant quelques petits délits, par-ci par-là, ça ne te gêne pas ?

— Le vol n'est certainement pas comparable à la débauche ou au meurtre, alors non, déclaré-je, en dissimulant toutefois ma chaîne dans mon col.

— Et puis, c'est qu'une gamine, pas un prêtre pédophile, ajoute Basil, l'air de rien.

Nos réponses ne semblent pas lui plaire, toutefois, elle se contente simplement d'essuyer frénétiquement les traces carmin qui dépassent de ses lèvres, ses yeux marron rivés sur son petit miroir de poche. Ce n'est pas la première fois qu'elle m'avertit et mes plates excuses lui sont plus que familières, c'est pour cette raison qu'elle n'insiste plus trop ; elle sait que j'ai le pouvoir de mettre un frein à mes veilles manies. Basil profite de son inattention pour me passer discrètement le petit paquet de Lulaa's, en m'adressant un regard foudroyant qui peut se traduire par "C'est la première et dernière fois que je te couvre". Je lui offre mon air ravi le plus mignon, avant de glisser les cigarettes volées dans leur paquet écarlate en lieu sûr.

Je m'abandonne à mes pensées, le vent chaud fouettant ma figure tandis que l'on file à travers les rues du village.

"Prétention, sophistication, élégance et bourgeoisie ambulante, Dream's Hollow représente la bâtardise d'une Amérique européanisée."

C'est la tirade qui m'est immédiatement venu à l'esprit en m'extirpant du train avec Miss Daoud, deux heures plus tôt. Quelque chose dans l'air m'a frappé; l'arôme marin, l'odeur de billets fraîchement imprimés, craquants sous les doigts, celle du coûteux tabac et le parfum mielleux des plaines fleuries. Ayant passé une grande partie de la journée coincée dans un compartiment à l'atmosphère climatisée presque morbide, la température extérieure a été plus que bien accueillie par mon épiderme. En faisant connaissance avec Basil, à la gare, je ne pouvais m'empêcher de trépigner dans mes sandales, avide du nouveau paysage qui se déployait sous mon regard d'étrangère. Alors que je faisais la bise à notre chauffeur — peau basanée relevé par sa tenue pâle, chevelure et iris sombres, bien rasé, forte odeur de menthe et d'eau de cologne, anneaux d'or aux oreilles et dents du même matériau—, les courbes élégantes d'une vallée se présentaient à moi, déployées comme des ailes célestes dans un ciel cyan. Mes bagages casés et nos ceintures bouclées, c'est dans la Riviera couleur crème que l'on a feint la chaleur écrasante de la journée. Alors que nous nous plongions dans l'orbite magnétique de Dream's Hollow, une ombre cristalline qui se modelait en une élégante mer s'est coulée au creux de la vallée. Il me restait encore quelques heures avant que ma présence ne soit sollicitée à Heaven Field, et en quelques coups d'œil et un virage à gauche, la décision était prise ; une pause rafraîchissante était plus que nécessaire.

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