Le jour s'était évanoui depuis des heures maintenant. Pourtant sa lumière persistait. L'horizon était encore marqué de ses lueurs orangées, sur lesquelles se dessinaient les ombres noires et majestueuses des grands arbres. Au-dessus, la nuit avait assis son règne et s'était parée de sa rivière scintillante d'astres célestes. La musique nocturne s'étendait partout autour, sauvage mais apaisante. Le vent se mêlait à cette symphonie noctambule, jouant du bruissement doux des feuillages.
Gaïa et Rigel avaient passé leur après-midi à parler littérature, puis sur ses romans, le jeune homme finalement avide d'en connaitre un peu plus sur son travail. Le malaise était passé, et Gaïa avait senti le jeune homme se détendre et s'accommoder à sa présence. Elle avait pu constater à sa plus grande satisfaction que Rigel était un jeune homme plein d'esprit et de pertinence à la compagnie des plus charmantes et agréable. Il l'avait aidé à cuisiner et avait partagé leur repas, ne pouvant s'arrêter d'échanger bon nombre de sujets, plus ou moins intellectuel d'ailleurs. Et puis, avec la nuit, le regard du jeune homme s'était voilé, et puis son aura s'était alourdie. Gaïa n'avait rien dit, et avait laissé le silence jouer sa musique. Elle l'avait finalement invité à se joindre à elle pour une balade nocturne. Cela avait toujours su apaiser ses angoisses. Ils marchaient côte à côte, inspirant les senteurs des humides feuillages de pins et de la mousse portées par la brise. Gaïa avait entrepris de lui raconter toutes les bêtises et les histoires rocambolesques que lui avait fait vivre Orion, ce qui en partie dérida le jeune homme dont le rire s'était joint au sien.
— Il a fini par encastrer son vélo dans cet arbre là-bas ! Je sais pas comment il s'est débrouillé, mais le guidon est resté bloqué dans les branches pendant des années ! Je crois qu'il n'est jamais remonté sur un vélo depuis.
— Cela explique beaucoup de choses, répondit malicieusement Rigel avant d'échapper une nouvelle salve de rires.
Son rire se tut finalement, écrasé de silence. Une boule s'était formée dans sa gorge et chaque pas commençait à se faire plus lourd.
— Il va bien ? demanda Rigel dans un murmure.
Gaïa le regarda dans les yeux un instant, décelant en lui l'inquiétude, la culpabilité et le regret.
Elle haussa les épaules et soupira avant de répondre :
— Il va mieux je dirais.
Le blond hocha la tête. Il regarda Gaïa du coin de l'œil. Peut-être serait-il mal venu de se confier à elle. Il savait qu'il avait profondément blessé Orion, et se plaindre de ses propres remords et de ses douleurs à celle qui avait vu son fils souffrir par sa faute n'était pas des plus élégants à son sens. Pourtant, la jeune femme avait quelque chose de puissamment apaisant. Rigel n'avait pas connu une telle chaleur maternelle depuis des décennies, des millénaires lui semblait-il. Il en était désarmé, incapable de ne pas lui céder, de ne pas lâcher prise. La boule dans sa gorge avait grossi, son corps tout entier avait délaissé les armes, et les larmes menaçaient de lui échapper.
— Je m'excuse.
— De quoi donc ?
— De l'avoir fait souffrir.
— Ah. Je pense que ce n'est pas auprès de moi qu'il faut s'excuser.
— J'en suis conscient. Mais tout de même. J'ai été égoïste, et je l'ai fait souffrir.
Gaïa inspira profondément.
— Il est parfois nécessaire d'être égoïste. Pour soi.
Rigel ne s'attendait pas à entendre une chose pareille, d'une voix si tendre et bienveillante. Il sentit son cœur se soulever, et les larmes commencèrent à rouler sur ses joues. Il espérait que la nuit les camouflerait.
— Peut-être bien...
Il se tut. Cette fois toutes ses résistances avaient failli, et tout vint brutalement inonder son esprit.
— J'ai... J'ai perdu ma mère il y a quelques mois.
Gaïa ne dit rien et le laissa poursuivre.
— Je ne pensais pas que ça m'atteindrait autant mais... Cela m'a réellement fait un choc.
— Pourquoi ? échappa la blonde à mi-voix.
— Oh... Je n'en sais trop rien. Je ne l'avais pas vu depuis des années. J'avais moi-même décidé de couper les ponts. -Rigel releva la tête pour tenter un tant soit peu de reprendre contenance- L'idée que je ne pourrais plus la revoir, et que cela était en partit ma faute m'a été très douloureux.
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Prière à une étoile
RomanceOrion est rentré un soir d'averse et depuis sa mère ne le reconnait plus. Gaïa le sent abattu et inconsolable mais ne connait pas la source de son chagrin et le jeune homme ne lui confit rien. Un jour qu'elle s'assigne pour mission de ranger la cham...