Ses fines mains bougeaient en rythme avec la musique qu'elle interprétait, cette mélodie qu'elle avait sans cesse recommencé pendant de longues années. Son instrument, ce vieux violon au bois usé, elle le traînait toujours avec elle. C'était son porte bonheur, son âme sœur. Qu'est-ce qu'elle aimait la douce symphonie que dévoilait l'objet usé quand elle y posait ses doigts ainsi que son archet abîmé. Pour rien au monde elle n'échangerai ce précieux présent, elle pouvait voyager en sa compagnie, quitter ce monde cruel pour visiter un univers bien plus jovial et sympathique.
Alors chaque soir, elle divulguait sa douce symphonie dans ce restaurant de quartier. Elle pouvait reconnaître quelques sourires, qu'elle avait déjà vu. Elle ne pouvait qu'être heureuse en voyant ces habitués venir régulièrement pour l'écouter. Elle partageait sa passion, elle aimait jouer pour les autres, pour les faire voyager dans son monde empli de douceur et de bonté.
Et ce fut ce jour là qu'elle vit un sourire particulier, un sourire qui fit palpiter son pauvre cœur meurtri par le manque de sa famille. Ces yeux se posaient sur la violoniste, sans une once de malveillance, ou sans même regarder ses formes. Non, il l'admirait, cette femme qu'il n'avait jamais vu ni entendu. Il n'était que de passage avec ses quatre amis, mais n'avait regretté à aucun instant de s'être arrêté pour laisser cette douce mélodie entrer dans ses oreilles.
Day Two -
Ce soir encore, elle jouait. Pendant des heures, elle faisait part de sa musique aux clients de ce restaurant. Il ne lui en fallait que peu pour être heureuse, elle vivait dans ces notes, et gagnait quelque peu sa vie avec sa passion.
Et pour la seconde fois, elle vit de nouveau ce sourire. Il était de retour pour elle, pour l'entendre jouer, encore et encore, jusqu'à ce que les cordes cèdent. Il aimerait rester là, à l'écouter, sans jamais la quitter des yeux. Bien qu'il ne la connaisse pas, il respectait cette femme, il l'admirait, et l'écoutait gaiement. Jamais il n'avait entendu un son si beau, il était subjugué et ne cessait de se demander comment avait-elle bien pu apprendre une symphonie égale à celle d'un musicien de renommée. Il se disait aussi qu'elle aurait si bien réussi si elle aurait été prise sous l'aile d'un professionnel. Ce sentiment de vouloir la faire monter haut le prenait, comme si il voulait l'aider. Il voyait en sa mélodie un sentiment de profonde solitude, comme si elle n'avait pour ami que ce violon au bois usé.
Et ce soir là, il fut une nouvelle fois déçu de quitter le restaurant, souhaitant profondément se faire de nouveau bercer par la mélodie que créait cette jolie femme en robe blanche.
Day Five -
Depuis cinq jours maintenant, le jeune homme venait le soir pour écouter le délicieux son que procurait cet instrument défraîchi. Le son harmonieux parvenait à ses oreilles tel une douce berceuse qui apaisait son cœur lourd et fatigué. Le chanteur et danseur passait ses journées à suivre des règles épuisantes alors quand venait le soir, il sortait pour aller lui rendre visiter. Pénétrer dans ce lieu occupé par la musique lui faisait oublier ses problèmes, et lui faisait passer une douce et agréable nuit. Il était tombé amoureux de la mélodie qu'elle créait.
Day Seven -
Le brun était assis sur cette chaise, encore une fois, comme chaque soir de sa lourde semaine. Voilà maintenant sept jours qu'il venait écouter cette femme toujours vêtue de blanc. Pour eux, cette même mélodie était leur échappatoire à la dure réalité qu'ils vivaient chacun de leur côté. Il tripotait sans cesse de morceau de papier blanc dans la poche de sa veste neuve, bien trop nerveux pour aller la voir. Peut-être n'avait-elle pas envie d'être dérangée ?
Ce soir là, encore, il se contenta d'un simple échange de sourire. Un doux sourire qui avait réussit à faire chambouler son petit cœur.
Day Ten -
La violoniste se perdait ce soir dans une mélodie qu'elle n'avait jamais cessé de répéter. Elle consacrait sa vie à sa musique ainsi qu'à son instrument usé qui avait besoin d'un léger coup de neuf. Mais elle souhaitait le garder ainsi, car elle s'était vu offrir ce modeste présent de la part de son pauvre grand-père lors de son neuvième anniversaire. C'était un instrument sacré et cher à ses yeux, elle le trouvait bien plus beau que ceux vernis et flambant neufs.
Lors de ce doux moment paisible pour elle ainsi que pour son auditoire, elle se sentit comme obligée d'ouvrir les yeux. L'horloge sonnait, elle savait qu'il allait bientôt arriver pour la regarder avec ce doux regard bienveillant. Sa surprise fut notamment bien plus grande quand elle le vit debout, devant elle, à la regarder de plus près. Leurs cœurs battaient à la chamade, sans réellement en connaître la raison.
Ce fut dans un élan de courage qu'il tendit sa main vers elle, lui présentant dans sa paume ce morceau de papier tant trifouillé. Leurs joues, simultanément, devenaient rouges. Devait-elle l'ignorer bien qu'elle passait ses journées à penser à son regard bienveillant posé sur sa personne ?
Elle laissa un beau sourire décorer son visage, prenant avec douceur la feuille pliée en plusieurs morceaux pour la serrer dans sa main. Elle croisa une nouvelle fois son regard, ils se fixèrent un instant avant qu'il ne s'en aille jusqu'à la nuit suivante, où ils se rencontreront sûrement une nouvelle fois et où ils échangeront encore ces regards et sourires qu'ils appréciaient tant.
Elle reprit ainsi sa douce mélodie, le papier au creux de sa main et un sourire bien plus beau qu'auparavant. Elle était tombée amoureuse de son regard.
~ END
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