~ 34 ~ Cécilia

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Dès lors que leur part du plan se finissait, les deux jeunes filles se sont rejointes pour se prendre dans les bras - leur manière de se rassurer. Après de très longues minutes d'attente, elles ont fini par s'aventurer en haut. Elles devaient savoir comment cela s'était fini.

Edwina les suit, le visage déformé par la culpabilité de n'avoir pas collé au plan. Sans son intervention, tout aurait été plus simple et leur mission aurait atteint son objectif. Seulement, elle a posé problème en débarquant dans les cuisines alors que le Renard la pensait enfermée en haut. Depuis, elle a la tête basse et tente d'oublier les regards haineux des domestiques. Cécilia ressent une pointe de pitié pour la jeune fille.

Elle pousse la porte qui mène au rez-de-chaussée et traverse le Palais en se dirigeant droit vers les Jardins. Le soleil entre grandement dans les différentes pièces et éclairent les lustres qui brillent de richesse et les décorations aux murs.

Cécilia ralentit inconsciemment son pas à la vue des baies vitrées. Que vont-elles trouver derrière ? Elle déglutit et se rapproche encore, partagée entre la peur et la curiosité.

Le cœur battant, elle pousse la petite porte et s'arrête net. Un hoquet de stupeur lui échappe, mais son coeur se rassure.

Le Prince se tient droit, le regard triste posé sur le Renard, couché misérablement sur le flanc d'où l'hémoglobine coule à flots. L'épée du Prince est figée dans sans corps et oscille avec la respiration douloureuse de l'animal.

La magie forme un étrange nuage autour de lui et ses membres sont tantôt animaux, tantôt humains.

Mais ce qui rend la scène plus surprenante encore, c'est la présence du Cerf, penché au-dessus du corps. Sous les puissants rayons du soleil de midi, son pelage semble encore plus brillant que d'habitude. Il tend son encolure pour poser son museau sur les flancs du Renard.

Les jeunes adolescents le regardent faire, figés. Il veut guérir le Renard. Leur ennemi. La menace qu'ils doivent éradiquer pour pouvoir rentrer chez eux. Mais devant la magie qui scintille sur sa robe immaculée, le groupe renonce à le forcer à arrêter. C'est son rôle, ils le savent.

De longues minutes passent durant lesquelles le Cerf souffle sur la plaie. Il secoue sa crinière et lâche un grognement mécontent. Cécilia fronce les sourcils et jette un coup d'œil à la plaie, qui ne s'est pas refermée. Le Cerf ne semble pas comprendre ce qu'il se passe.

Il persévère, changeant sa position au-dessus du corps. Il piétine l'herbe aux côtés du Renard qui convulse violemment. Le sang ne coagule pas miraculeusement. Ses membres alternent encore entre l'homme et la bête sans trouver d'équilibre.

Cécilia jette un regard confus vers le Prince, mais celui-ci a le regard rivé sur l'étrange scène.

Le Cerf piaffe et grogne, mais continue sa besogne sans que les adolescents ne voient aucune amélioration.

Cécilia relève le regard vers l'animal et fronce les sourcils. Elle a l'impression que la robe du Cerf change de couleurs. Elle plisse les yeux, esquisse un pas sur le côté pour changer l'angle des rayons du soleil sur son pelage, mais rien n'y fait ; une ombre dévore le blanc de la robe du Cerf.

Le regard sur lui, elle tend sa main gauche et frappe le vide à la recherche de l'épaule d'un de ses compagnons. Elle finit par atteindre une épaule et son propriétaire grogne avant de s'exclamer :

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Regarde, chuchote-t-elle à Shayna.

Les deux jeunes filles observent avec angoisse l'ombre grandissante.

Mythomorphia ~ L'Esprit De La ForêtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant