Horns 2 - Breaking Point |en pause|

Chapitre 19

Eli

« If you wanna get with me you gotta keep it on one hundred
I'mma make you scream my name
I'mma make you glad you came »
Or Nah - SoMo

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Au volant de ma bonne vieille voiture, je traverse les rues bondées de Seattle à une vitesse folle. Slalomant parfois entre les véhicules trop lents à mon goût ou klaxonnant les abrutis incapable de se rabattre après un dépassement. Les mains crispées sur le volant, j'ai bien du mal à contenir ma respiration saccadée et sifflante de rage.

- Eli, il y a un... piéton... ok, ça fait rien, je ne comptais pas vivre très longtemps de toute manière.

La remarque de Félix, cramponné à l'arrière, tandis que je manque d'heurter un sombre abruti bien décidé à traverser au-delà des passages cloutés fait ricaner Will. J'observe du coin de l'œil ces deux-là s'enfoncer un peu plus dans leur siège.

- Ton abruti de frère va me le payer, Félix.

Je ralentis à contre cœur en voyant Will au bord de la crise cardiaque lorsqu'un foutu cycliste manque de passer par-dessus le pare-brise.

- Ecoute, tue-le lui, pas nous.

Cette fois, je ralentis franchement, décrochant un soupir de soulagement aux deux passagers occupant l'habitacle.
J'observe un instant les sublimes reflets matinaux transperçant le pare-brise pour venir donner une jolie teinte orangée au tableau de bord. De part et d'autres des vitres, de somptueux faisceaux lumineux viennent déposer sur les visages de Félix et Will d'adorables éclats colorés. La sérénité semblant baigner l'horizon sous mes yeux parvient à apaiser un peu ma rage. Je jette alors un bref coup d'œil à mon mobile, constatant avec dépit l'absence totale de message de la part d'Alexander depuis la veille.

- Pardon, je grommelle en enfonçant mon doigt sur l'autoradio, lançant un bon vieux Fever d'Aerosmith.

- Il n'a pas répondu à mes messages non plus si ça peut te rassurer, souffle Félix en décollant enfin sa poigne du tissu couvrant le siège.

Je ne réponds pas. Au fond, j'aurais presque préféré qu'il décide de répondre au moins à Félix ; ainsi, j'aurais pu me cramponner à l'idée qu'Alexander n'est qu'un immonde abruti aux humeurs changeantes. Au lieu de cela, je ne peux m'empêcher de l'imaginer dans un fossé après avoir décidé de prendre le volant saoul. Je réfrène la rage bouillonnant en moi en tapotant des doigts contre le volant au rythme de Fever. La musique m'apaise un peu bien que demeure en moi une irrémédiable envie d'hurler sur cet abruti d'Alexander.

- D'ailleurs, reprend Will, qu'est-ce que tu fais là ? Je pensais que tu détestais venir bosser chez MHK.

Mon ami jette un bref regard dans le rétroviseur intérieur, observant une courte seconde l'adolescent à l'arrière. La petite chemise blanche ainsi que le chino bleu du cadet MHK me fait rire. Qu'est-ce qu'il peut ressembler à son frère.
Félix passe brièvement sa main dans son épaisse chevelure de jais avant de venir, du bout des doigts, se saisir d'une petite mèche qu'il laisse nonchalamment retomber sur le bout de son nez à la Johnny Depp dans Cry Baby.

- Je ne déteste pas les éditions. C'est juste que... mon père ne m'a jamais réellement appris les ficelles du métier. C'était réservé à Alexander. Je me suis intéressé à autre chose ; la musique par exemple. MHK ne m'a jamais réellement importé. Je viens simplement filer un coup de main.

- Tu viens surtout t'assurer que je ne tue pas ton frère de mes propres mains.

- Aussi, glousse-t-il.