Monsieur, dites-moi... qu'est ce que l'Amour ?

Paradis mortuaire

Il faut leur accorder un bon point : ce sont peut-être des hommes sanguinaires et sans scrupules mais au moins ils essaient de faire le moins de victimes possible parmi les innocents. Les affrontements ont lieu dans des endroits déserts : en pleine montagne, sur des plaines arides ou tout simplement sur la banquise... La Russie est un pays incroyable ! Et si ce n'était pas pour de funestes raisons que nous serions ici j'aurais volontiers fait un peu de tourisme.

Mes équipes et moi sommes définis comme mobiles. Nous sommes les seuls à pouvoir nous déplacer entre les différents lieux de conflits. La raison est simple : Les snipers ne doivent en aucun cas être découvert alors ils doivent changer souvent de position. Mon frère et Gabriel sont affectés au milieu d'une chaîne de montagne. Mon père, lui, garde un œil sur ce qu'il se passe sur les steppes.
C'est bien la première fois que je vais voir deux organismes se battre à la loyale avec des lieux et des heures de rendez-vous. Carrément !

Je m'empresse de disposer mes hommes. Difficile de trouver des cachettes en pleine banquise ! Certains se retrouvent derrière d'autres hommes, d'autres derrière des monticules de neige. Ou alors allongé au milieu de pingouins. Bah quoi ? J'aime ce qui sort de l'ordinaire. Et puis c'est mieux que de se retrouver au milieu d'ours polaire...

Le silence nous envahit. J'aime ça. Grâce à lui je peux regarder un par un mes compagnons. Car il faut se rendre à l'idée, c'est sans doute la dernière fois que je les vois. La moitié d'entre eux si ce n'est plus risque de mourir d'ici la fin de la journée. Les soldats de mon père ne sont pas très doués pour se cacher ou pour se faire oublier. C'est triste... Mais c'est la vie... Ils sont tous si différents... Blonds, bruns, roux, grands, petits. C'est du gâchis de risquer sa vie parfois si jeune.
Petit à petit des ombres s'approchent. C'est eux. Nos cœurs accélèrent. Les choses sérieuses commencent. Il s'agit peut-être de mon dernier jour sur terre. Il faut que je réussisse.

Les tirs de plus en plus nombreux viennent rompre le silence qui régnait jusqu'à lors. Un, deux, sept, onze, cinquante. Les corps tombent de plus en plus vite. Il faut partir nous allons être découvert. Mais il ne s'agit que de notre premier transfert de lieu et déjà une de mes équipes est décimé. Nous devons nous diriger vers les montages. C'est le lieu le plus proche. Évidemment ce n'est pas chose facile. Le jeune juste devant moi s'écroule en une seconde à la suite d'un coup de feu.

D'autres snipers ! Fait chier ! Nous nous cachons derrière les premiers arbres sur notre chemin, en réalité les premiers tout court depuis notre départ du premier lieu. Mais où sont-ils ?! Mes hommes continuent de tomber malgré leur cachette. Évidemment... Avant qu'un de tir ne me trouve, je réussi à toucher la personne sur l'arbre qui me cachait. Je grimpe à sa place et descend un à un nos agresseurs.

Nous parvenons ainsi, avec les quelques survivants, à avancer jusqu'au lieu de bataille. J'aperçois mon frère se battre à merveille face à nos adversaires. Il est tellement incroyable...
Mais pourquoi je perd mon temps à l'admirer ?! Me voilà propulsée au sol, une main sur la gorge. Je vais perdre connaissance... Un cri parviens à mes oreilles : Mon frère ! L'adrénaline de ce simple son m'aide pourtant à me défaire de mon agresseur et l'assommer contre le tronc d'arbre.

Je ne le vois plus ! Où est-il ?! Où est mon frère ?! Là ! Au-... Sol... Tout semble s'effacer autour de moi, il n'y a que lui et moi. Je me laisse lourdement à genou à ses côtés. Une flaque de sang l'entoure. C'est fini... Je ne le verrai plus jamais... Son sourire ne parviendra plus jamais à mes oreilles. Seul le sourire qu'il aborde actuellement restera gravé dans ma mémoire, et ses derniers mots...

- Vic... Réalise nos rêves pour moi tu veux ?..

Les larmes brouillent mon champs de vision. Je l'enlace aussi fort que je le peux.

- Promis !!!

C'était le meilleur ! Pourquoi lui ?! Pourquoi soudainement ?! Tué par des balles dans le dos... Dans- le dos ?! Mais il ne fuit jamais. Que s'est-il passé ?...

- Vic !

Gabriel s'écroula sur moi pour me protéger des tirs qui me visaient. Nous nous dirigeons alors tous les deux en arrière des combats le temps de reprendre mes esprits.

Je suis anéantie. Tout s'est écroulé dès le moment où mon frère à laisser s'échapper son dernier souffle. Pourquoi lui ...? Il était tout pour moi... C'était le meilleur... Ça n'aurait jamais dû arriver. Surtout pas de cette façon...! Il n'aurait jamais tourné le dos à un ennemi ! Ça veut dire qu'il y a un traitre parmi nous. Mais qui ?... Ça peut être n'importe qui ! Tout le monde peut être un infiltré russe...

- Vic il faut rejoindre ton père. Tu ne peux pas continuer les combats comme ça. Ça serait du suicide !

- Je vais aller le voir. Mais c'est juste pour l'aider. Hors de question de rester en arrière pendant qu'il y a autant de morts. Allons-y.

Sans lui demander son avis, je me relève et pars en direction des steppes russes. La route va être longue autant partir maintenant.

- Mais tu vas mourir ! Pourquoi est-ce qu'on irait pas juste tuer le parrain russe ? Y a juste a aller à Saint Petersbourg !

Je m'arrêtes net.

- Ça serai fourbe. Gardons le minimum de dignité qui nous reste et battons-nous fièrement. Dépêche-toi ou je pars sans toi.

C'est presque en courant que je me dirige vers notre QG. Il nous faudra bien un jour ou deux de toute façon. Gabriel me suit en restant silencieux. Mon père ne va pas être content. Il aurait plutôt dû rester à son poste. C'est idiot cette lubie de vouloir me protéger.

Tous les souvenirs avec mon frère me reviennent alors que je marche le plus vite possible. Nos bêtises ensemble que nous soyons petits ou grands. Nos disputes sur mon départ et sur mon désaccord quand à rester dans l'entreprise familiale. Nos rires et nos pleurs. Ce fichu sourire alors qu'il mourrait... Je te l'ai promis grand frère. Je ferai le tour du monde pour toi. Et j'emmènerai ta fiancée avec moi. Elle a le droit elle aussi à une belle vie malgré ton départ prématuré... Je réprime les larmes qui me montent. Il se serait sûrement foutu de moi s'il me voyait dans cet état. Quel idiot !

Un appel vient me sortir de mes funestes pensées.

- Allô j'écoute ?

- Vic ma chérie ! Vient me rejoindre pour mourir. Je t'attend. Je t'envoie l'adresse par message.

- Demon att-

Il ne me laisse pas le temps de répliquer et raccroche presque aussitôt sa petite plaisanterie finie. Mais qu'est-ce qu'il me veut encore celui-là ?! Qu'est ce que je dois faire ?... Si je pars maintenant Gabriel va forcément me suivre et ça va être une boucherie. Il n'y a qu'une seule solution : attendre d'être de retour au QG pour m'enfuir ni vue ni connue.

- Tu as dit Demon ?! Qu'est-ce ce qu'il te voulait ?

- Enfoncer le couteau dans la plaie pour mon frère. Dépêchons-nous... 

J'accélère le pas. C'est à peine si je vois les heures passées. Mais je suis bien forcée de m'arrêter pour la nuit. Gabriel et moi alternons pour tenir la garde. Et nous voilà reparti le lendemain dès les premières lueurs du soleil. Nous atteignons le repère de mon père dans la soirée qui suit. Je lui fait un rapport détaillé des évènements et pars en prétextant me préparer pour repartir à l'assaut.

Je ne peux pas parler à mon père non plus de cet appel. Il enverrait des hommes et... Ça serait une boucherie. Sans tarder, j'emporte avec moi mon pistolet et mon poignard et pars en direction de l'adresse que m'a envoyé Demon par message.

Il s'agit d'un vieil entrepôt désaffecté. Il faut que je sois sur mes gardes. Il ne fait aucun doute que je me jette dans la gueule du loup. J'entre alors, sur mes gardes et regarde Demon qui m'attend, assis au milieu de l'immense bâtiment.

- Quel plaisir de te revoir Demon...

- Plaisir partagé Chica. Et si on se posait pour discuter un peu. Tu sais trahison tout ça tout ça.