Chapitre 5.3

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Débute alors une longue et fastidieuse descente, tandis que le froid se fait de plus en plus intense et chargé d'humidité. Ma main effleure la pierre rugueuse tandis que nous nous enfonçons en colimaçon dans les profondeurs de l'institut. Deux soupirs de soulagement résonnent faiblement lorsque nous atteignons la dernière marche. A cet instant, une torche s'enflamme comme par magie, nous faisant sursauter.

Je regarde autour de nous, méfiant, et tombe soudain nez à nez avec un visage collé au mien. Mon cœur manque un battement et j'effectue un bond en arrière, tandis que le regard du portrait de taille réelle me scrute attentivement. Je reste un instant figé. Ambre me lance un regard un peu moqueur face à ma frayeur injustifiée tandis que je tente de reprendre mon souffle en passant une main gênée dans ma chevelure sombre.

La pièce est minuscule, seulement occupée par cette œuvre qui occupe tout le mur. La jeune femme effleure du doigt la citation dorée inscrite sous l'horrible tableau et elle lit à mi-voix : « Le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin. Pascal ». Un silence angoissant plane dans l'étroit espace vide.

Elle pousse doucement le tableau d'une main et sans surprise, celui-ci pivote pour laisser place à une nouvelle trappe au plafond. Une échelle est fixée au mur poussiéreux derrière le portrait. Je ferme les yeux, exaspéré par tous ces clichés et cette stupide épreuve qui nous fait perdre notre temps. Ne se finira-t-elle donc jamais? Je suis lassé de cette stupide chasse au trésor.

Je m'accroche finalement aux barreaux en métal avec un soupir résigné pour me hisser dans le conduit étroit. J'entends Ambre me suivre. Quelques gouttes gelées tombent parfois dans mon cou, dévalant ma colonne vertébrale et me faisant frissonner. Je tressaille chaque fois que ma peau effleure l'une des froides parois et mon cœur manque un battement quand une de mes mains dérape sur un barreau humide. Je n'ose surtout pas regarder en bas. Une odeur de moisissure et de renfermé flotte dans l'air.

Mon crâne butte contre la fin de notre calvaire, je laisse échapper un juron en me massant la nuque. Lorsque je pousse une nouvelle trappe lourde, j'émerge dans une pièce ronde aux dimensions bien plus colossales. Je me hisse sur le sol et tends une main à Ambre pour l'aider à faire de même. La fine robe blanche de la jeune femme lui colle à la peau à cause de l'air saturé d'eau et je distingue ses tremblements incessants dus à la fraicheur. Je suis surpris de voir que malgré son allure faible, elle ne s'est pas plainte une seule fois depuis le début de notre épreuve. Mon regard se détache de sa silhouette, bien conscient qu'il ne nous reste que très peu de temps.

Nous sommes dorénavant encerclés par d'immenses étagères en bois qui se courbent sous le poids de centaines de livres anciens. Tout semble bien mieux entretenu ici, toute trace de poussière a disparu et la température est bien plus supportable. Le carrelage sous nos pieds semble dessiner des rosaces étranges jusqu'au centre de la pièce, où un large bassin incrusté dans le sol donne une atmosphère étrange, divine, à cette bibliothèque. Au fond de celui-ci brille des runes incompréhensibles éclairées comme par magie, que je ne cherche pas plus à déchiffrer.

Lorsque je me retourne, Ambre a déjà disparu entre les étagères massives et je presse le pas pour la rejoindre. Cette bibliothèque s'apparente finalement plutôt à un labyrinthe, où nous ferions mieux de ne pas nous perdre. Certains couloirs mènent a des culs-de-sac, si bien que nous revenons sur nos pas à plusieurs reprises. Les couloirs forment des rangées circulaires autour du centre de la pièce, et chaque ouverture nous mène plus profondément dans ce dédale de papier. Nous déambulons entre les rangées dans un sens, puis dans l'autre, tandis que ma coéquipière effleure des doigts la tranche des livres en murmurant le nom de leur auteur. J'espère qu'elle les mémorise pour ensuite retrouver le chemin inverse, car je suis pour ma part complètement perdu. 

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