Les Frontières : Tome 2

Chapitre sept : révélation

C'était un jour de cours comme tant d'autres. Je me trouvais dans les toilettes. Je m'apprêtais à sortir de la cabine et à affronter encore quelques heures quand une voix que je connaissais me saisit. Sue et une fille que je ne connaissais pas ou que je ne reconnaissais pas venaient d'entrer. J'entendis l'eau couler tandis qu'elles discutaient tranquillement, ignorant parfaitement que quelqu'un les épiait :

- T'as vu Mathias aujourd'hui ? Il est encore plus canon que d'habitude ! S'exclame la fille qui m'est étrangère.

- Ouais. C'est à peine croyable. 

- Si tu veux mon avis, Ly est vraiment conne. Comment peut-elle rejeter un mec pareil ? Il est tellement mieux qu'elle en plus !

- Je ne peux qu'approuver, soupire Sue.

Je manque de crier alors je plaque une main contre ma bouche, pour étouffer le moindre son.

- Parfois, je regrette d'avoir parlé de ce Cédric à notre chef.

Je dois me maintenir au mur carrelé pour ne pas m'effondrer sous mon poids.

- Pourquoi ? Tu as fait ce qu'il fallait ! Elle le méritait ! Elle a blessé Mathias et elle t'a volé ton bonheur avec lui. Ce n'est que pure justice.

- Je sais. Tu as sans doute raison. Tu penses qu'elle le découvrira un jour ?

- Comment le pourrait-elle ? 

Elles se mettent à rire en choeur. Moi, j'ai la nausée. J'ai envie de vomir. De pleurer. De hurler. De me précipiter hors de la cabine et de lui signifier que je suis bel et bien là, que j'ai tout écouté, que je connais enfin la vérité et que je lui ferai payer. Nous étions amies bon sang ! Amies !

- Tu crois que Mathias va s'intéresser à toi maintenant ? L'interroge l'inconnue

- Je ne sais pas. Mais un jour, il craquera. Il finira bien se rendre compte qu'il n'a rien à faire avec une fille telle que Ly. Et que lui et moi, on est faits l'un pour l'autre.

- Mais...

- Mais quoi ?! S'offusque Sue.

- C'est un Arbre.

- Et alors ? Je suis une Nuage. Je peux avoir tout ce que je désire. Et aujourd'hui il se trouve que l'objet de mes convoitises, c'est lui. Je l'aurai, je te dis. Peut-être à l'usure, mais je l'aurai.

Sur ces mots, elles sortent des toilettes en s'esclaffant toujours à gorge déployée. Le sol se dérobe sous mes pieds. Je tombe à la renverse et ma tête se cogne à la porcelaine de la cuvette. Je m'écroule, inerte.

                                                                                        

Alors c'était elle ? La personne qui m'avait trahie ? Qui avait brisé ma vie ? Sciemment ? C'était elle ? L'une de celles que je croyais être mes meilleures amies ? Sue ? Celle à qui j'aurais confié mon existence ? Je ne pouvais accepter cette idée pourtant j'avais tout vu. Dire que pendant tout ce temps, j'avais blâmé Mathias pour quelque chose qu'il n'avait pas fait. Je l'avais cru coupable du pire et il avait seulement voulu me protéger de la souffrance que cette nouvelle me causerait. Il s'était conduit comme le meilleur des amis et je l'avais repoussé, je l'avais accusé de tous les maux. Après tout, mon père avait dit "un de tes amis". Il n'avait jamais dit qu'il s'agissait de Mathias.