Chapitre 15 : le monde d'Alexia

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Karine réalisa soudain qu'elle longeait une interminable plage de sable blanc, bordant une mer turquoise qui montait lentement vers l'horizon, sur sa droite. Oui, qui montait. Aussi étrange que cela puisse paraître, la mer n'était pas horizontale, mais en pente légèrement ascendante, comme attirée par les deux lunes immenses et teintées de lueurs orangées qui occupaient une bonne partie du paysage aérien, alors qu'un minuscule soleil d'un blanc étincelant projetait une puissance lumière sur les dos d'une bande de dauphins jouant au loin avec les vagues.

La jeune fille sentit son corps se pencher dans la courbe que prenait la moto sur laquelle elle se tenait, les bras passés autour du blouson de cuir blanc que portait Alexia, son pilote. Le moteur de la grosse Harley Davidson gronda tandis qu'elle accélérait dans la sortie de la courbe. Devant elles, Korian chevauchait une étrange machine. C'était une moto aux chromes rutilants et à la peinture d'un blanc éclatant. Les tuyaux d'échappement longeaient chacun des flancs du chopper pour remonter ensuite vers le ciel, s'élargissant en plusieurs tuyères plus petites qui leur donnaient l'apparence de deux ailes d'ange métalliques.

Une interminable fourche avant, prolongeait la moto de plusieurs mètres. Korian avait les jambes quasiment tendues de chaque côté du pneu avant, ses bottes blanches posées sur de larges cale-pieds chromés. Ses longs cheveux blonds flottaient dans le vent tiède, venant caresser le cuir de son Perfecto blanc qui lui donnait une impressionnantecarrure. Karine se demanda s'ils ne revivaient pas une sorte de remake du film Easy Rider, l'histoire culte de pas mal de bikers.

– Tu crois qu'on est au Paradis ? cria Karine à son amie, en dressant un peu le cou pour tenter d'apercevoir la blessure que s'était faite Alexia à la tête.

Mais plus aucune tâche de sang n'était visible. Alexia semblait en pleine forme. Un superbe dragon rouge et vert était tatoué tout autour de son cou. Pire : elle trouvait visiblement la situation parfaitement normale.

Karine se demanda si c'était encore Korian qui les avait entraînées dans un monde fictif.

– Je sais pas, répondit Alexia, mais en tous cas, c'est drôlement cool, comme coin. Tu as vu les dauphins ?

– Il n'y a vraiment que cela qui t'étonne ?

Alexia haussa les épaules, signifiant son ignorance d'une mimique expressive.

– Euh... Tu veux parler des deux lunes ou de la mer qui n'est pas plate ? C'est ça qui te perturbe ?

– T'es vraiment pas croyable ! Tu te rappelles quand même ce qui t'est arrivé ?

– Ben... Je devrais être morte, normalement... Donc, on doit être au Paradis... C'est cool : j'imaginais tout à fait un truc comme ça... Sauf que je ne vois pas pourquoi t'y es, toi aussi...

Alexia tourna un peu plus la poignée des gaz et la Harley bondit en avant, pour venir se mettre à la hauteur du chopper de Korian.

– C'est toi qui nous fais vivre cette illusion, n'est-ce pas ? lui cria-t-elle, pour couvrir le bruit des moteurs. Ce monde n'existe pas ?

– Tout dépend de ce que tu entends par « nous », répondit Korian en souriant.

Il ralentit légèrement l'allure pour que les deux jeunes filles puissent venir à ses côtés et se lança dans des explications.

– Ton corps est en ce moment en réanimation, dans un hôpital, quelque part sur Terre, expliqua-t-il à Alexia.

– Mais moi, je n'ai pas été blessée, alors pourquoi suis-je ici ? demanda Karine.

– Parce que tu as accepté de venir en aide à ton amie. Grâce à vos pierres, vos esprits ont pu se libérer de vos corps. C'était une bonne idée de les avoir avalées ! Nous sommes maintenant dans le monde d'Alexia. Dans son esprit, si tu préfères...

Pierres d'étoiles (Prix Wattys 2016)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant