Chapitre 29 : La Pierre d'Einstein

250 24 1
                                    

Alors que les gens envahissaient sa chambre, Alexia sentit que quelque chose n'allait pas. Elle ne parvenait pas à détecter les prochaines ramifications du futur dans lesquelles le Duc d'Astaroth était susceptible d'intervenir. Quelque chose clochait et une sourde inquiétude commença à l'envahir.

Elle voulut en faire part à son amie Karine, mais le professeur Lapernuité l'avait prise par le coude pour la conduire un peu à l'écart et des infirmières vinrent autour de son lit, lui coupant la vue. Plusieurs docteurs se mirent à examiner les données produites par les appareils qui surveillaient l'état de santé d'Alexia et leurs exclamations montraient qu'ils étaient face à un cas encore jamais observé.

Alexia sentit la fatigue de son corps l'envahir, diminuant ses capacités de réaction. Elle se laissa aller dans son oreiller et laissa les infirmières faire leur boulot. Elle comprit qu'elle était encore très loin d'avoir retrouvé toute sa liberté de mouvement. A défaut, elle allait se servir de ce nouveau don qu'elle ne maitrisait pas encore totalement. Elle ferma les yeux et essaya de se concentrer sur l'avenir.

Pendant ce temps, le professeur Lapernuité faisait face à Karine. A l'expression qu'il arborait, elle comprit qu'il avait de mauvaises nouvelles à lui annoncer. Il se gratta énergiquement le front, dérangeant ses boucles blanches et plongea son regard dans celui de la jeune fille, bien décidé à ne pas tourner autour du pot.

— Votre amie a provisoirement retrouvé la conscience, mais cette" pilule de Lazare" va bientôt cesser son effet.

— Son symbiote est en train de stimuler ses tissus cérébraux. Elle devrait cicatriser très rapidement si vous suivez le traitement que je vous ai présenté.

— Justement, mes collègues ne sont pas tous d'accord sur son innocuité. Ils ont peur de possibles effets secondaires... Je ne sais pas si on va pouvoir le continuer...

Il y avait visiblement quelque chose qu'il ne voulait pas lui avouer. Elle se souvint qu'il était sous l'autorité des services secrets, toujours présents à l'entrée de la chambre. Deux armoires à glace au costume sombre et au regard vif, qui restaient de marbre mais portaient de temps à autre leur main à une sorte de micro dissimulé dans le revers de leur veston. Ils empêchaient les gens d'entrer dans la chambre, en particulier Tom et Adam qui se démenaient pour qu'on les laisse passer.

Karine se rappela que le professeur ne pouvait parler librement. C'était donc à elle de comprendre à demi-mot ce qu'il essayait de lui dire. Ce neurologue obéissait à l'État et le Duc d'Astaroth représentait l'État. Mais avait-il vraiment conscience de qui était réellement le Duc ?

Karine se demanda soudain s'il n'était pas lui aussi contrôlé par hypnose, comme Astaroth venait de le faire avec les parents d'Alexia. Il fallait qu'elle en ait le cœur net.

— On aimerait bien pouvoir discuter un peu entre nous... fit Karine en désignant du menton ses copains Tom et Adam.

— C'est encore un peu tôt, il faut d'abord que l'état d'Alexia se stabilise. Ensuite...

— Ensuite, rien du tout. Vous venez de me dire que le traitement risquait de n'être que provisoire. Le Duc d'Astaroth vient d'éconduire les propres parents d'Alexia. Il les a proprement mis dehors... C'est quoi, ce délire ?

— Les choses sont assez compliquées, Karine, comprenez-moi... Nous sommes dans une situation tellement...

— Dingue ? Justement, vous en pensez quoi, vous, l'homme de science ?

Il se tut brusquement, mais Karine lut dans ses yeux qu'il retenait une furieuse envie de parler.

— Vous me faites penser à mes parents, quand ils ne voulaient pas m'annoncer un truc qui risquait de me contrarier: ils prenaient la même expression que vous maintenant ! Vous me cachez quoi ?

Pierres d'étoiles (Prix Wattys 2016)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant