Chapitre 9

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Le claquement de la porte, les crissements d'un cabas, le bruit d'un paquet cognant contre un meuble signèrent la fin de ma solitude. Craignant que ce branle-bas ne soit pas assez flagrant, ma mère me cria sa présence avec les accents d'une sauveuse voulant rassurer l'enfant abandonné. Je supposai que c'était sa façon d'appeler mon concours pour ranger ses achats et me forçai à refermer mon livre bien entamé. Mais un bruit de course se fit entendre dans l'escalier et, la seconde d'après, Sacha me rejoignait dans la chambre.

Tout en lui faisait montre de vitalité, jusqu'aux minces et pâles tâches de sueur sur son T-shirt qui attestaient du dynamisme dont il avait empli son après-midi. Ses poings s'égayaient dans les poches de la veste en coton qu'il avait emportée pour ne pas s'enrhumer au rayon surgelés. Il avait l'air parfaitement réjoui. Je ne pus réprimer un rire d'incrédulité qui le froissa. Il s'appuya contre le mur et resta planté là jusqu'à ce que je m'excuse, faisant rouler sur ses traits une exaspération feinte.

- Je suis ravi de te retrouver de si bonne humeur, mais j'avoue que je ne comprends pas.

- Quoi ? riposta-t-il d'un ton dont je devinais qu'il n'était que faussement énervé.

- Tu t'es déjà remis de ce matin ? Je pensais que tu allais rester prostré des jours, exagérai-je intentionnellement face à l'étincelle dans ses yeux qui cependant faiblit à mes mots.

- On n'est pas obligés de revenir là-dessus.

Son avertissement sonna soudain un peu trop juste. Nous allions redevenir sérieux. Je posai à terre mes jambes croisées sur le lit et me préparai mentalement à toute éventualité.

- Sacha, commençai-je, tu n'es pas obligé de te forcer. Tu n'as pas à accompagner ma mère au supermarché pour te faire bien voir ou je ne sais quoi.

- Me faire bien voir ? Tu rigoles ! se récria-t-il.

Mes mains croisées se séparèrent en signe d'incompréhension.

- Donne moi une raison alors.

- Attrape.

Sa main droite sortit de sa poche une boîte qui me fut expédiée par la voie des airs.

- Ça pourra être utile, dit-il tandis que je décryptai l'emballage.

Le plafond me tomba sur la tête. Ce que je découvris provoqua des convulsions dans ma poitrine :

- T'as fait acheter des capotes à ma mère ?!!!

- Nan, c'était du vol à l'étalage.

Je levai le nez vers lui, catastrophé :

- Mais... Mais non ! T'as pas fait ça !

- Tu préfères quoi ? Ta mère ou du vol ?

- Urgh...

La boîte me tomba des mains alors que ces dernières sautaient à mon cœur qu'il me fallait soutenir. Je m'effondrai sur le matelas comme Sacha un peu plus tôt. Comme l'arme du crime avait glissé sur le sol, il s'approcha et se baissa pour la ramasser, se justifiant avec le plus grand calme :

- Il nous en restait plus tellement...

Les mains plaquées sur mon visage écrevisse, j'écartai seulement mes index de devant mes yeux pour le voir.

- Sacha, dis-moi la vérité.

Il me rendit longuement mon regard. Et soudain son rire éclata. Je l'attrapai par la veste, il se défit des manches, m'abandonna le vêtement et s'enfuit dans une autre pièce. Il me fallut lui courir après, mais alors ma mère se mit dans mes pattes :

Sacha et MartinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant