La Sélection : les Successeurs

Chapitre 24 -Presque sans scrupules

Les jours suivant l'arrestation de ma sœur, je vis dans une sorte de brouillard confus. Des dizaines de Sélectionnées rentrent chez elles, nous laissant au nombre de huit. Kelly, Scarlett, Tessa, Heather, Clove, une dénommée Ella que je connais mal, moi et Giana.

Si j'avais été dans mon état normal, je crois que j'aurais été en colère contre elle. Ou peut-être l'aurais-je considérée comme une alliée...

Maintenant, allongée sur mon lit, regardant le plafond, une pensée vide de toutes émotions emplie mon esprit.

« Comment vais-je pouvoir l'utiliser à bon escient ? »

Faut-il la dénoncer en échange de la libération de Malyss ? Ou la convaincre de m'aider à libérer cette dernière ?

Trois jours que je ne suis pas sortie de ma chambre. Trois jours que j'ai claqué la porte au nez de Laspen en lui disant qu'il aurait mieux valu qu'il me jette dehors aussi, car je ne pourrais pas l'aimer. Trois jours que j'ai balancé une lampe à la tête de Marcus –le manquant misérablement. Trois jours que je suis entrée comme une furie dans le bureau du roi en hurlant. Trois jours que j'ai essayé de convaincre la reine de sauver ma sœur.

Trois jours depuis que tous mes espoirs se sont écroulés.

Imaginez que vous avez perdu l'être le plus cher à vos yeux, et que soudainement il réapparaisse.

On a l'impression que toute notre vitalité revient. On se dit que plus rien ne pourra nous atteindre. On se dit : « quittes à trahir n'importe qui, je ferais n'importe quoi pour elle, pour ne plus jamais être blessée. »

Mais que tout s'écroule. C'est comme les dominos, une réaction en chaîne. Tous ses nouveaux espoirs retombent comme des bombes atomiques.

Je veux sauver Malyss. Je veux tuer Marcus.

Soudain, Alice entre dans la chambre en portant un plateau.

-Bonjour mademoiselle, fait-elle timidement, vous n'avez pas mangé depuis hier soir et...

Je me retiens de lui répondre sèchement et me redresse.

-C'est gentil, mais je n'ai pas très faim...

Elle fronce les sourcils et Charley déboule à sa suite d'un air sévère.

Avant qu'elle n'ait pu prononcer un mot, je me précipite vers la porte qui donne sur le couloir désormais vide. Elles m'appellent, clairement agacées de mon comportement d'enfant gâtée.

Je leur adresse un regard d'excuse et cours au hasard pour m'échapper de leurs réprimandes. Je n'ai pas faim, pourquoi insister ?

Je rencontre mon reflet dans un miroir qui prend tout un mur. Je ne porte qu'un legging noir et une tunique-sweat bleu pastel, sans compter des chaussettes de la même couleur. Mes cheveux tombent librement sur mes épaules, brillants grâce au bain que m'ont forcé à prendre mes domestiques.

Je m'assois sur banc qui donne vue sur le jardin et réfléchis sérieusement pour la première fois.

Je décide de faire le point sur le plus simple : que faire à propos de Laspen.

Je n'arrive pas à déterminer ses sentiments pour moi... et quand je me rappelle notre baiser, je suis incapable de savoir quels sont réellement les miens ? Est-il possible que par peur des responsabilités qu'impliquerait l'amour pour lui, je me voile la face ?

Je décide non, probablement parce que c'est plus simple.

« Dans ce cas, pourquoi ne pas lui avoir dit que tu ne l'aimais pas au lieu de dire que tu ne pouvais pas l'aimer ? » souffle une voix en moi. J'élude la question.