La Sélection : les Successeurs

Chapitre 19 -Le Baiser

-Stasie ? Demande-t-il d'un ton étrange, pourquoi as-tu une bague gravée du nom de mon cousin, autrement dit le fils de Kota Singer, présumé être dans les cachots d'Illéa ? 

-... quoi ? Lâchais-je sans comprendre en m'écartant de lui.

Marcus fait une moue inquiète.

-Edwin est le fils du frère aîné de ma mère, explique-t-il, le fils de Kota Singer. Celui-ci a passé sa vie à essayer de devenir un Deux, et l'abolition des castes l'a mis dans une rage folle. Il faut dire qu'il venait d'épouser une Deux afin de mettre toutes les chances de son côté, sauf qu'il ne l'aimait vraisemblablement pas. Et il a élevé Edwin dans le même état d'esprit que lui. Alors le jour du défilé en l'honneur de la Grande Fusillade, il a participé à l'attentat responsable de...

Je déglutis et me retiens de lui hurler de se taire. Je ne veux pas en parler !

-...et il a finalement finit en prison. Pourquoi était-il au milieu des gardes et nous a-t-il défendu ? Termine le prince cadet avec un air préoccupé. A quoi ressemblait-il, Stasie ?

Il veut probablement vérifier qu'il s'agit bien de son cousin, mais pas la peine. Je suis certaine que c'était lui. Déjà sur le coup j'ai remarqué la ressemblance !

-Cheveux aux reflets presque rouges, m'exécutais-je malgré tout, yeux clairs. C'était lui, Marcus !

Il se passe une main dans les cheveux et observe de nouveau le bijou. J'ai l'impression d'avoir été souillée de son contact. Je suis restée au chevet de l'homme qui est responsable le plus directement possible de la mort de Malyss ! Quand j'y pense, une bouffée de colère empourpre mes joues.

-Je vais en parler à mes parents, décide Marcus en ébouriffant mes cheveux.

Je lui fais un croche-patte qu'il évite avec un sourire moqueur ; je sens un rire léger naître sur mes lèvres. Il a toujours eu cet effet sur moi, sauf quand ça m'exaspère et que ça me rend en colère. Je me rappelle notre rencontre, dans ce couloir mal éclairé.

J'ai l'impression que c'était il y a des siècles, avant le sang, la mort et les mystères qui ne laissent que le chaos derrière eux.

-Anastasia ? Vous allez bien ? Demande Laspen en s'agenouillant devant moi pour regarder mon visage, baissé sur le sol.

-Quelqu'un est mort dans mes bras, j'ai encore son dernier souffle ensanglanté sous les ongles, j'ai vu la mort, j'ai sauvé tout le monde et je viens peut-être de découvrir que j'ai eu pitié de celui qui...

Je m'arrête dans mon élan.

-...bref, non ça ne va pas vraiment, votre Altesse.

-J'en suis vraiment désolé, regrette-t-il. Je pense sérieusement à arrêter la Sélection à présent. C'est bien trop dangereux...

J'acquiesce lentement et essuie mes mains sur mes jupons eux aussi couverts de sang.

-... comment allez-vous choisir l'Elue ? Demandais-je en croisant son regard chocolat.

Je vois dans ses yeux qu'il hésite à me répondre quelque chose, mais qu'il s'en trouve incapable.

-Je dois vous avouer que je ne sais pas. Laquelle de ces jeunes filles voudrait donc rester avec le prince qui n'a même pas réussi à les sauver ?

Et d'un coup son masque tombe et je vois un petit garçon apeuré qui tente de gérer ça avec courage. De ne pas se laisser déborder. Et là-dedans il est censé trouver de l'amour.

Je le prends par la main.

-Venez donc vous assoir, lui dis-je en tapotant le lit à ma droite.