𝐟𝐨𝐮𝐫𝐭𝐞𝐞𝐧

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2020

- j'ai envie de mourir.

c'est en ces mots que je conclus la séance de deux heures de sport que je viens de subir en m'adressant à mike. il me lance un sourire entendu. nous baignons tous deux dans notre sueur et arborons dans notre regard cette même expression de lassitude : nous ne sommes pas de fervents adorateurs des activités physiques. je vole à mon ami sa bouteille d'eau alors qu'il allait en prendre une rasade pour avaler goulûment quelques gorgées, et sens se poser sur moi ses yeux réprobateurs, qui se radoucissent néanmoins lorsque je lui rend l'objet de ses désirs.

c'est ce moment que choisit will pour arriver en trottinant, comme si les heures précédentes n'avaient eu aucun effet sur son potentiel énergétique. il pose sa main sur l'épaule de mike comme pour marquer son territoire, avant de le lancer un regard perplexe.

- c'est bizarre, il commence. la bande de jane n'a pas arrêté de te regarder pendant la séance.

- c'est étrange en effet, intervient mike. on peut pas dire que quelqu'un veuille t'observer faire du sport. c'est une vraie torture pour les yeux.

je lui assène un coup sur le crâne avant de répliquer :

- parle pour toi wheeler. t'as autant d'élégance qu'une hippopotame qui mettrait bas.

il lève les yeux au ciel et je souris, satisfaite.

- bon les gars, je vous laisse ! on se retrouve à la cafet, je vais me changer histoire de...

je m'arrête quelques secondes, le temps de désigner ma tenue d'un geste de la main.

- moins ressembler à ça.

sur ces mots, je m'élance vers les vestiaires et me change rapidement, mais remarque à mon grand désarroi qu'il me manque une chaussette. alors que je me mets à sa recherche, je sens une présence au dessus de moi, et lève donc les yeux pour les planter dans ceux de celle qui me surplombe. greta keene.

- oui ? je demande, intriguée.

- ça te plaît, hein ?

- je suis pas sûre de saisir.

- ça te plaît de t'éterniser dans les vestiaires pour pouvoir mater des filles.

je reste interdite alors que des ricanements font échos à ses propos.

- et fais pas l'innocente, je t'ai vu me regarder avec insistance. t'es une putain de gouine prédatrice.

je sens mon cœur descendre dans mes pieds. j'ai l'impression que tout autour de moi est en train de s'écrouler. ce genre de chose ne s'est jamais produit , on m'a toujours laissée tranquille, alors pourquoi greta agit-elle de la sorte avec moi ?

derrière elle, assise sur un banc, se tient jane, la bouche en cœur. je lui lance un regard suppliant, un regard qui signifie "aide moi s'il te plaît. je sais que nous ne sommes plus amies mais j'ai besoin de toi." mais rien ne se produit. mais l'adolescente plantée devant moi continue, sans se faire arrête par quiconque.

- et personne ne veut d'une gouine prédatrice dans nos vestiaires.

elle ponctue sa phrase d'un crachat qui vient atterrir sur mon visage. je l'essuie d'un revers de la main, combattant les larmes, alors que des rires emplissent la pièce et amplifient ma honte.

je reste figée. immobile. je n'ose même pas lever les yeux de peur que les propos de greta trouvent une preuve. lorsque je relève la tête, pensant le lieu désert, je croise le regard de jane, interdite.

- t'aurais pu faire quelque chose.

je voudrais mettre de la haine dans mes paroles mais ils sont empreints de honte et de tristesse. le silence résonne dans la pièce, il est assourdissant.

je ne sais plus qui est la fille en face de moi.

𝐒𝐄𝐕𝐄𝐍 𝐌𝐈𝐍𝐔𝐓𝐄𝐒 𝐈𝐍 𝐇𝐄𝐀𝐕𝐄𝐍 ! elmax Où les histoires vivent. Découvrez maintenant