Le feu et la glace

Chapitre 2

...Un jeune homme. Il semblait jeune en tout cas, bien que ses cheveux soient blancs comme le seraient ceux d'une personne âgée. Il portait un pull bleu qui semblait recouvert de givre, et un bâton solide également couvert d'une fine pellicule de glace gisait à ses côtés.

Quand il se rendit compte qu'on l'observait, il arrêta de ramper et observa les deux amis avec une certaine curiosité.

Harold, porté par un élan de gentillesse, s'élança pour l'aider :

-Vous allez bien ? demanda-t'il, tendant une main bienveillante vers l'inconnu.

Puis il se sermonna lui-même d'avoir posé une question aussi stupide. Evidemment, le jeune inconnu n'allait pas bien du tout, et chaque mouvement paraissait douloureux. Cependant, il sourit en entendant la question d'Harold.

-Alors vous pouvez me voir... fit-il d'une voix où l'on pouvait sentir la joie qui l'habitait.

-Bah... Oui ? 

L'inconnu essaya en vain de se relever, et étouffa un juron en grimaçant de douleur.

-Laissez moi vous aider ! s'exclama Harold en lui prenant la main.

Le jeune homme la serra fort dans la sienne et frissonna, relâchant quelque peu sa prise, presque comme si le contact soudain avait brûlé sa main. Harold crut qu'il avait froid, et ne s'en préoccupa pas pour le moment. 

-C'est vrai que sa main est très froide... pensa-t'il

Il l'aida à se lever sans trop de peine, car il était étonnamment léger, mais l'inconnu avait beaucoup de mal à marcher, alors il le porta aussi bien qu'il put jusqu'à Krokmou, puis il le posa doucement sur le dos du reptile.

Soudain, il se souvint du bâton qui était près du jeune homme, et courut le ramasser et lui apporter.

-Merci... murmura l'inconnu en saisissant l'objet d'un geste lent.

Harold lui répondit que c'était tout naturel, un sourire sincère sur le visage. Il décida de ne pas brusquer le jeune homme, Krokmou et lui marchèrent donc jusqu'au village, tandis que le blessé somnolait sur le dos du dragon.

Harold réussit ensuite, avec une discrétion incroyable, à faire rentrer Krokmou et son passager dans sa maison sans que qui que ce soit ne les remarque.

-Reposez vous, maintenant. Je vais aller chercher de l'aide, dit-il à l'inconnu en l'allongeant sur son lit, sans oublier d'allumer un bon feu dans sa cheminée pour le réchauffer. 

-Non, répondit celui-ci, personne ne vous croirait, parce qu'ils ne me verraient pas.

-Que voulez vous dire ?

-Je suis Jack Frost, l'Esprit de l'hiver. Les seuls humains à pouvoir me voir sont ceux qui croient que j'existe.

Harold fut bouche bée pendant un instant, puis il se força à sourire :

-Oui, si vous le dites. Vous devriez dormir, maintenant. 

Il ne croyait pas une seule seconde que l'inconnu dise la vérité. Il croyait en cet être magique qui apportait la neige et le givre en hiver, mais il lui semblait impossible que le jeune homme blessé et affaiblit qu'il avait accueillit chez lui puisse être ce puissant gardien du froid, qu'on disait de toute façon ne pas avoir de forme matérielle qui puisse être vue par le commun des mortels. Cependant, il joua le jeu parce qu'il voulait vraiment que sa nouvelle connaissance se rétablisse.

Jack savait que Harold ne le croyait pas, mais il ne dit rien de plus.

-Il verra le moment venu, pensa-t'il en s'endormant.

Il ne dormait normalement pas, n'n ressentant aucunement le besoin, mais cela permettait qu'il guérisse dès le lendemain de ses blessures. De plus, comme il le disait souvent, "la nuit porte conseil".

***

Harold, quand à lui, ne pouvait pas dormir. Dès qu'il fermait les yeux, il voyait son père mourir devant lui, sans qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, comme presque toutes les nuits. Il s'était donc pelotonné contre Krokmou, attendant le moment où il devrait aller vaquer à ses occupations de chef de Beurk. Puis, il se leva sans réveiller son ami et alla vérifier que "Jack" dormait bien. 

Cependant, en le regardant attentivement, le jeune viking remarqua qu'il ne semblait pas respirer. Il s'approcha et posa la main sur son cœur, qui ne battait pas.

-JACK ! s'écria-t'il en secouant l'Esprit de toutes ses forces.

A sa grande surprise, celui-ci se réveilla en sursaut et répondit d'une voix encore chargée de sommeil :

-Que se passe-t'il ?

-Je... Je pensais que vous étiez mort ! s'exclama Harold

Jack sourit, et eut du mal à ne pas rire devant la mine alarmée de sa nouvelle connaissance.

-Oui, je suis mort, depuis au moins cinquante ans si tu veux savoir. 

-Mais c'est impossible !

-Si, je suis Jack Frost après tout.

Harold commença alors à paniquer. Et si c'était bien le vrai Jack Frost ? Il marcha de long en large dans la petite pièce, alors que Jack s'étirait négligemment.

-Calme toi, petit viking ! Je n'ai jamais eu ton nom, d'ailleurs, fit-il.

-Je m'appelle Harold, répondit machinalement le jeune homme sans cesser son manège.

Jack, agacé par tout ce va-et-vient, lui agrippa la manche tandis qu'il repassait devant lui et le fit s'asseoir près de lui sur le lit. 

-Tu ne crois pas que je sois Jack Frost, n'est-ce pas ?

-Non je ne crois pas que vous... que tu sois lui.

L'Esprit leva les yeux au ciel :

-D'accord, j'arrête d'essayer. Mais tu crois en lui non ?

-Oui, depuis que je suis tout petit. Enfin, plus petit que ça.

Jack rit à la remarque du jeune viking, ce qui lui arracha une grimace de douleur :

-Ah. . . Saletés de courbatures !

-Attends... C'est toi qui est tombé du ciel, c'est ça ? demanda Harold.

-Euh, oui.

-Alors comment se fait-il que tu n'ais que des courbatures ? Et qu'est-ce que tu faisais là-haut ?

-Jack Frost, je suppose, déclara Jack avec un sourire moqueur.

Harold soupira et secoua la tête.

Soudain, la porte d'entrée s'ouvrit.

-Harold ? T'es où ? demanda une voix.

-Nom de Thor, c'est Astrid ! File te cacher ! s'écria Harold en poussant Jack dans une vieille armoire.