15 - James

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Deux jours. C'était approximativement le temps dont il avait eu besoin pour dépasser sa fierté et agir relativement normalement avec ses amis. L'égo de Remus devait avoir un temps de latence à peu près identique, puisque leurs relations étaient quasiment revenues à la normale. La seule exception était qu'ils avaient tous pris soin de ne pas réaborder le sujet sensible au cours de ces deux jours. James avait constaté, soulagé malgré lui, que Remus et Sirius n'avaient pas changé de comportement l'un envers l'autre. En réalité, presque rien n'avait changé, et on eût presque pu dire que tout cela n'était jamais arrivé. C'était en tout cas ce que pouvait se dire James, qui doutait fort que Sirius et Remus aient pu oublier un tel événement, eux. A bien y réfléchir, il lui semblait d'ailleurs que ç'avait été le premier baiser de Remus, ce qu'on n'oubliait pas si facilement. Cette pensée lui était un peu désagréable, mais il culpabilisait de penser ainsi. Arrête, songea-t-il. Il se faisait violence pour essayer de ne pas agir comme un con, ce qui n'était pas toujours évident.

James dégustait avidement une part de porridge en compagnie de Sirius et Peter, tout en jetant de brefs coups d'œil au plafond magique sur lequel se détachait une lune pâle, entre les nuages. Le ciel n'était pas tout à fait noir. Pour les trois amis, l'air avait cette atmosphère de pleine lune, un peu étrange. Remus était parti à l'infirmerie en milieu d'après-midi, pris de violentes migraines. Sirius donna un coup de coude à Peter :

- Mange.

Peter fit une grimace. Malgré les presque deux années passées à accompagner Remus tous les mois lors de sa transformation, l'adolescent ne s'était pas défait de sa nervosité. James n'était pas parfaitement détendu non plus - il craignait toujours que les choses ne se passent pas comme prévu - mais il s'était habitué à cette sensation. L'important était qu'ils ne laissent rien transparaître de leur programme de la soirée, surtout aux yeux de Dumbledore. Parfois, James s'étonnait même que le vieil homme n'ait pas encore deviné ce qui se tramait, lui qui était si perspicace. Ou bien peut-être qu'il savait, et qu'il fermait les yeux. C'était l'hypothèse la plus probable, en réalité.

Une fois le dessert terminé, les trois garçons quittèrent la table et filèrent dans la Salle Commune, montèrent au dortoir et se posèrent devant la fenêtre. Ils avaient une vue imprenable sur le parc, avec le Saule Cogneur en fond de paysage, ce qui leur permettait de savoir à quel moment descendre. La lune était haute et ronde, et ils savaient d'expérience que Remus ne tarderait pas à être escorté jusqu'à l'entrée du passage. La tension montait légèrement dans leurs poitrines.

- En forme ? demanda Sirius.

James hocha la tête en silence. Ils n'avaient pas tellement le choix, surtout lui. Ils se préparaient tous trois à passer une nuit éprouvante. Pas aussi éprouvante que lui, songea James. Une vague d'affection pour son ami déborda par tous ses pores. Il pouvait être sentimental, quand il le voulait. Au bout d'une quinzaine de minutes, Peter couina :

- Là !

Deux petites silhouettes venaient d'apparaître dans leur champ de vision, à peine auréolées par la lueur d'une baguette. Les trois garçons s'emparèrent de la cape d'invisibilité et se précipitèrent dans la Salle Commune. Ils avaient désormais du mal à tenir à trois sous le morceau de tissu. Peter n'était pas très grand, mais grassouillet et James avait pris des épaules avec le Quidditch. Sirius se serrait entre ses deux amis, à l'étroit. Ils se glissèrent maladroitement à travers le trou du portrait de la Grosse Dame et filèrent dans les couloirs. Ils devaient attendre d'être à l'abri des regards pour se transformer, surtout James. Un cerf dans les couloirs ne passait pas inaperçu. Arrivés au bas des marches, ils se précipitèrent vers la porte et déboulèrent dans le parc. Par précaution, ils gardaient la cape tout au long de la route. Ils croisèrent Mme.Pomfresh à mi-chemin, qui se pressait vers le château en grelottant, sa baguette pointée devant elle. C'était toujours elle qui escortait Remus.

Quatorze févrierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant