Chapitre 14

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- Ah merde...

- Alune ça va ?

J'ignore Harry derrière la porte de la salle de bain, préférant rester avachis contre le lavabo, le nez dégoulinant de sang et prise d'une douleur lancinante à l'arrière de mon crâne ; un arrière-goût ferreux a choisi d'accompagner l'odeur de sang qui s'est installé dans mes narines. Le miroir face à moi reflète avec perfection une image peu flatteuse de moi, mes cheveux sont désordonnés et mon visage arbore une teinte douteuse, allant très fortement vers le rouge tomate. A mesure que la pression que je ressens à l'arrière de mon crâne augmente, la quantité de sang s'écoulant de mes narines fait de même.

Cette sensation désagréable restera à jamais gravé dans mes souvenirs, j'ai du mal à respirer à cause et pour couronner le tout, je sens mon esprit s'en aller vers l'inconscience. Néanmoins, je peux sentir le regard de l'oiseau de glace derrière moi, il m'observe silencieusement, coupable de mon état.
Je lève la tête face au miroir pour lui lancer un regard mauvais.

- Je suis désolé...

- Epargne moi tes excuses, dis-je exaspéré.

- Je ne pensais que mes émotions pouvaient autant t'affecter.

- Qui est cette femme ?

- Je ne sais pas... Son visage m'est familier mais ça fait tellement longtemps...

- Combien de temps ?

- Bien trop de siècles.

Un soupire s'échappe de mes lèvres, repensant à mon entrevue avec l'officier de la haute autorité des chevaliers du Conseil, son regard pénétrant ne m'a pas laissé de marbre comme je le voulais, la seconde d'après j'ai perdu le contrôle de mes émotions, c'est l'être de glace qui a pris la relève et je n'ai pus être que spectatrice de la scène. C'est la première fois que ça arrive. Mon rôle externe n'a pas été très utile, j'ai pu ressentir toutes les émotions de l'oiseau, et celles-ci m'ont marqué, peut-être même bien plus que hier soir, lorsque j'ai ressenti d'étranges émotions envers Nedrag. Elles étaient plus effrayantes... Je ne sais pas ce que cette Illys a remarquée mais elle semblait s'en délecter.

- Ôte-moi d'un doute... Ce n'est pas le roi qui l'envoie ? demandé-je.

- Je ne pense pas, cette histoire de gardien des ruines semble plus sérieuse qu'il n'y paraît.

- Tu sais des choses là-dessus ?

- Tout ce que je sais, c'est qu'ils étaient là bien avant ma naissance et personne n'a jamais su quand ils sont apparus. Beaucoup disaient qu'ils étaient des créations des dieux mais je n'y ai jamais cru, selon moi ce sont des humains qui les ont construits, en revanche je doute que leurs rôles premiers étaient de protéger des artéfacts...

- Mmh...

Je remarque que le sang a arrêté de couler de mon nez mais la pression à l'arrière de mon crâne ne s'est pas dissipée. Je fais couler l'eau du robinet pour me débarbouiller du sang restant entre mes narines, l'oiseau me regarde attentivement à travers le miroir, décidé à ne pas disparaître.

- Il semblerait que je vais te voir plus souvent que prévu. Comment puis-je t'appeler ?

- Je n'ai pas de nom.

- Zhele ça te va ?

- Oui...

A l'intonation de sa voix, je conclue que ça lui fait plaisir, dommage que son visage animal ne soit pas très expressif. Ayant fini de me débarbouiller, je m'assieds à même le sol contre la porte dans l'espoir que la douleur passe et plutôt que de m'observer, l'oiseau nouvellement nommé Zhele, décide de grimper sur ma cuisse, une action qui me pousse à le regarder d'un air curieux.

La Commandante de Glace [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant