Chapitre 6

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Adèle 

Je rentre aux alentours de 23h, fatiguée, mon esprit encore tourmenté par les événements de la journée. En arrivant devant la porte de la maison, je découvre Sabrina assise sur le perron, visiblement inquiète. Dès qu'elle me voit, elle se lève précipitamment et se jette dans mes bras, m'enlaçant avec force. Je sens son étreinte, mais mon cœur reste distant. Ses trahisons récentes m'ont refroidie, et même si elle essaye de me montrer qu'elle tient encore à moi, il me faudra bien plus qu'un câlin pour effacer ce qu'elle a fait.

— Oh Mon Dieu, Adèle ! Je t'ai attendue toute la soirée, je m'inquiétais tellement ! Où étais-tu ?

Je garde mon calme, cachant ma méfiance derrière un sourire timide.

— Je visitais la ville, répondis-je en baissant la tête pour simuler de la culpabilité. Je n'ai pas vu le temps passer, désolée d'être rentrée si tard... J'espère que tu ne m'en veux pas.

Sabrina essuie ses larmes et sourit faiblement, soulagée. Elle me prend par la main et m'entraîne à l'intérieur.

— Ne t'inquiète pas, ça va. J'ai gardé des lasagnes pour toi. Installe-toi, et après, on pourra regarder un film, comme au bon vieux temps !

Elle sourit chaleureusement, mais je secoue la tête.

— Je suis épuisée, Sabrina. Je vais juste monter me coucher.

Alors que je commence à monter les escaliers, je m'arrête un instant et me retourne vers elle.

— Ah, au fait, désolée pour ton téléphone... Je l'ai cassé par accident en marchant dessus. Je t'en achèterai un nouveau dans quelques jours.

Sans lui laisser le temps de répondre, je continue mon ascension. La soirée se termine dans un silence glacial, bien loin de nos échanges d'autrefois. Je prends une douche rapide et m'allonge dans le lit, mon esprit encombré de pensées. En regardant le plafond, je ne pouvais m'empêcher de repenser à Christian, à cette rencontre étrange qui avait éveillé en moi des questions que je n'osais encore formuler. Puis, petit à petit, je m'endors, bercée par le silence de la nuit.

Christian :

Après avoir laissé Adèle seule à ses réflexions, je me dirige vers ma voiture, mais je tombe sur un groupe d'enfants qui s'acharnent sur une gamine en pleurs. Je reste à distance un moment, observant la scène. Le regard de cette fillette me ramène des années en arrière, à l'époque où, moi aussi, je persécutais quelqu'un, sans me soucier de la douleur que je lui causais.

Je soupire, me sentant idiot. J'ai été un vrai con à l'époque. Mais aujourd'hui, les choses sont différentes. J'ai changé, et je veux lui montrer ça, à elle... L'ex-binoclarde que je harcelais, Adèle. Peut-être que c'est la seule manière de me racheter.

Je m'approche du groupe et soulève la petite fille, l'éloignant des autres enfants.

— Hé, qu'est-ce que vous faites là ? Pourquoi vous l'embêtez comme ça ? Demandai-je en souriant pour ne pas les effrayer.

Les enfants baissent la tête, visiblement gênés d'avoir été pris en flagrant délit. Un garçon plus petit, mais visiblement le chef du groupe, me défie du regard, ses bras croisés.

— Elle est moche, et personne n'aime jouer avec elle. Vous avez vu ses griffures ? On dirait un animal sauvage, beurk ! Rigole-t-il avec mépris.

Je m'accroupis à sa hauteur, déposant la petite fille devant lui.

— Regarde-la bien et dis-moi ce que tu vois.

Le gamin hausse les épaules et dit calmement, sans hésitation :

— Elle est moche, Monsieur.

La petite fille baisse la tête, ses yeux remplis de larmes.

— Je vous ai dit que c'était mon chat qui m'avait griffée... Je ne voulais pas qu'il prenne une douche avec moi...

Le garçon ricane à nouveau, et je sens une montée d'agacement en moi. Je prends une grande inspiration et demande d'une voix grave :

— Tu aimerais que quelqu'un te dise ça à toi ? Que tu es moche à cause de quelques griffures ? Tu crois que ça te ferait plaisir ?

Le garçon ouvre de grands yeux, visiblement déstabilisé. Il baisse les yeux, comme pris en faute.

— N-non... balbutie-t-il, soudain embarrassé.

Je m'accroupis à nouveau, attrapant doucement l'épaule de la petite fille pour la rassurer.

— Tu vois ? Personne ne mérite de se faire traiter comme ça. On doit toujours être gentil avec les autres, peu importe leur apparence.

Le garçon finit par se tourner vers la petite fille, l'air gêné.

— Je... Je suis désolé, je ne voulais pas te faire pleurer. Viens jouer avec nous, je te promets que je ne me moquerai plus.

Il lui tend la main avec un sourire hésitant. La petite fille me regarde, cherchant mon approbation, et je lui fais un clin d'œil. Elle prend timidement la main du garçon et se laisse entraîner vers les autres enfants. Je reste un moment, les observant jouer ensemble. Un sourire sincère se dessine sur mon visage.

En retournant vers ma voiture, je me sens étrangement fier. J'ai fait une bonne action aujourd'hui. J'aurais aimé qu'Adèle soit là pour voir ça, pour voir que j'ai vraiment changé. Mais bon, je me contenterai de ce sourire reconnaissant de la petite fille.

Je démarre la voiture, l'esprit un peu plus léger, souriant tout le long du trajet de retour. Peut-être que la rédemption commence par de petites actions. Un pas à la fois.

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