Chapitre 15

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Adèle :

Je restais encore un moment immobile devant la fenêtre, mes yeux perdus dans la ville éclairée par les lumières nocturnes. L'idée de vivre ici, de me réveiller chaque jour face à ce paysage, germait malgré moi. Je me surprenais à imaginer les nuances du matin, du midi, et du soir que m'offrirait cette vue, dans un calme trompeur. Pourtant, cette pensée ne devait pas exister. Je me frappai légèrement les joues, sentant une chaleur monter à mes joues. Qu'est-ce qui me prenait ? Vivre ici, sous le même toit que lui... Inconcevable ! Je ne pouvais accepter une telle folie.

Je fermai les yeux un instant, cherchant à effacer cette absurdité, et pris une profonde inspiration avant de me détourner de la fenêtre. Le lit immense derrière moi semblait m'appeler, avec sa promesse de douceur et de répit. À peine ma tête eut-elle touché l'oreiller que le sommeil m'emporta, malgré quelques chuchotements que mon esprit refusa de saisir.

***

Une douce brise, accompagnée de quelques rayons de soleil, m'extirpa du sommeil. J'émergeai du confort du lit en m'étirant longuement, un bâillement si grand que je crus me décrocher la mâchoire. Mes pieds nus touchèrent le sol, et je me dirigeai vers la fenêtre pour ouvrir les rideaux, découvrant un lever de soleil éclatant qui embrassait l'horizon marin. La lumière dorée effleurait la mer, offrant un spectacle si paisible que je m'autorisai à oublier un instant la réalité.

Ce silence. Cette paix. Je laissai mon esprit vagabonder, oubliant un instant la trahison, la vengeance, la dispute avec mes parents, et ma situation ici, dans la maison de Christian. Pour un court moment, je me permis de rêver. Un monde irréel, loin des douleurs du présent. Mais cette illusion ne pouvait durer.

Mon ordinateur portable émit un bip, brisant l'instant de calme. Mon regard se porta immédiatement sur l'appareil posé sur le bureau, et une étrange appréhension me saisit. J'espérais trouver une bonne nouvelle, peut-être un Job qui me permettrait de m'échapper d'ici pour de bon. Mais ce que je vis me glaça.

Un message. De ma mère.

La surprise me paralyse un instant. Depuis notre violente dispute, ni elle ni moi n'avions eu le courage de reprendre contact. Pourtant, là, sur l'écran, son nom. Mes doigts hésitèrent à cliquer, partagé entre l'espoir d'une réconciliation et la crainte d'un autre sermon blessant. Finalement, je pris une longue inspiration et ouvris le message. Ses mots me percutèrent avec une violence inattendue.

"Je suis terriblement déçue de toi... une prostituée là-bas... indigne... Répond-moi, tu as des comptes à me rendre."

Ma gorge se serra. D'où venait cette accusation ? Comment savait-elle ? Mon frère, non, il m'avait promis de ne rien dire. Mais à peine avais-je pensé à lui que mon téléphone vibra, un message de lui s'afficha. La colère monta en moi, prête à exploser. Mais je me figeai en lisant ses mots.

"Ce n'est pas moi. Regarde la nouvelle publication de Sabrina."

Sabrina... Mon cœur se serra. J'avais cessé de la suivre depuis qu'elle m'avait trahie, mais mes parents... Ils la suivaient toujours. Tremblante, je consultai son compte Instagram. Et là, je vis. Une photo récente, d'elle, assise sur les genoux de Mike, mon ex, échangeant un baiser passionné. Son corps contre le sien, sa main serrant ses cheveux avec l'intimité qui m'avait autrefois appartenu. Une légende accompagnait cette horreur : "L'amour entre nous est bien réel, et les autres ne sont qu'amusement sans importance."

Je sentis une nausée monter. Mes yeux se remplirent de larmes, mon cœur se déchirant sous l'évidence. Malgré tout ce qu'il m'avait fait, je l'aimais encore. Et maintenant, tout me revenait en plein visage, comme une lame retournée dans une plaie déjà béante. Incapable de retenir mes sanglots, je m'effondrai, étouffant mes cris de désespoir dans l'oreiller.

Je n'avais plus la force de leur faire payer. Tout ce que je pouvais faire, c'était pleurer, le cœur brisé, seule. Mes mains se crispèrent autour de mon oreiller, cherchant à contenir ma douleur, mais rien n'y faisait. Les mots cruels de ma mère, la trahison de Mike et Sabrina... je suffoquais dans cette chambre qui, la veille encore, semblait si apaisante.

***

Le temps perdit toute signification. Les heures, les minutes, tout se mélangeait dans mon esprit, écrasée par un sentiment d'étouffement qui ne me lâchait plus. Puis, soudain, quelqu'un frappa à la porte. Je n'avais aucune envie de parler à qui que ce soit, mais les coups insistants finirent par s'interrompre.

Le silence revint, lourd, oppressant. Jusqu'à ce que la porte s'ouvre.

– J'ai frappé plusieurs fois, mais comme tu ne répondais pas, je me suis permis d'entrer. Je voulais m'assurer que tu allais bien.

Je ne me retournai pas. Je reconnaissais cette voix, et la dernière chose que je voulais, c'était qu'il me voie dans cet état.

- Comment as-tu fait pour entrer ? La porte était fermée à clé, grognai-je, ma voix rauque et tremblante.

– Je ne réponds qu'à ceux qui me regardent en face.

Je sentis la colère monter à nouveau.

– Fous-moi la paix ! Crachai-je, ma voix brisée par les larmes.

Un long silence suivit, puis des pas s'éloignèrent. Le calme revenait, mais il me paraissait désormais insupportable. Je serrai les poings, essayant de contrôler ma respiration, mais la douleur dans ma poitrine refusait de s'apaiser. Et alors que je pensais sombrer à nouveau, quelque chose d'inattendu se produisit.

Une couverture fut posée doucement sur mes épaules, et avant même que je puisse réagir, deux bras vinrent m'envelopper dans une étreinte. Une chaleur inattendue se propagea dans mon dos, apaisante. Je désirais me retourner pour confronter Christian de son attitude désinvolte, mais ce dernier m'empêcha de faire tout mouvement en resserrant son étreinte autour de ma taille.

– Chut... murmurait-il derrière moi. Fais-moi confiance, je ne tenterai rien de stupide.

Contre toute attente, je me laissai aller. Ce geste, aussi surprenant qu'il fût, apporta un réconfort inattendu. Les larmes continuèrent de couler, mais elles se faisaient moins lourdes. Ses bras autour de moi me rappelaient que, peut-être, tout n'était pas encore perdu. Peu à peu, la fatigue l'emporta, et je m'endormis en l'entendant murmurer à mon oreille : "Repose-toi bien."

L'équilibre Des Failles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant