— Des nouvelles ? m'interroge Elisha.
— J'ai transmis le nom à Viktor, j'attends l'adresse.
Je me fais l'effet d'être un sous-fifre, mais soit, je l'assume pleinement. Tant que nos intérêts convergent, je suis les ordres du mercenaire.
Un éclat de rire au rez de chaussée me fait lever les yeux au ciel.
— Je suis d'une humeur massacrante, je ne le supporte plus. S'il ne la ferme pas, je le décapite, qu'il me soit utile ou pas, grogné-je sans en penser un triste mot.
Alors que le rire gras de Zak s'élève une nouvelle fois, mes doigts se plaquent d'eux-mêmes sur le manche de la dague, que je fais tourner dans un geste rageur.
Elisha esquisse un sourire furtif, qu'elle efface aussitôt. Si elle déteste Zak, c'est pour des raisons très différentes, ancrées profondément dans ses entrailles, alors que pour ma part, c'est de l'exaspération pure et dure. Depuis qu'il m'a aidé à organiser l'assassinat du cinquième membre de l'Ordre il y a près de trois mois, il se sent investit d'une nouvelle quête : devenir mon coéquipier. Ou plutôt, me coller comme mon ombre. Je grimace rien que d'y penser.
Elisha colle son menton sur ses mains et me fixe en silence. Ses cheveux coupés à la garçonne laissent quelques mèches s'éparpiller contre son front, qu'elle repousse du revers de sa main. Son petit air mutin gagne jusqu'à l'éclat de son regard sombre.
— Quoi ?
Alors que ses yeux d'un marron presque noir m'analysent, et que sa bouche forme une moue trop sexy pour l'ambiance, elle persiste à me dévisager.
— Tu es bien trop nerveux. Qu'est-ce qui t'arrive ?
Elle me connait bien. Trop bien. Comment pourrait-il en être autrement lorsque l'on a l'impression de se côtoyer depuis toujours ?
Notre ressemblance physique est si flagrante qu'on nous prend souvent pour des frères et sœurs, mais au final, est-ce si loin de la vérité ? Je la considère comme ma seule famille, une famille de cœur, celle qu'on choisit. Et sans doute la seule personne en ce bas monde qui peut se targuer d'avoir mon entière confiance.
— Charlie Sanfield était l'un des commanditaires de l'assassinat.
Mon souffle s'amenuise rien qu'à cette pensée. Tout n'est qu'un immense jeu d'échec où chaque pièce est importante pour gagner. Je me sers d'eux ; je m'en débarrasse. Sans aucune once de culpabilité, bien au contraire !
— Il est puissant Sil, bien trop puissant pour que tu te jettes dans cette quête sans réfléchir aux conséquences.
Sa main cherche la mienne et nos regards s'enchaînent, silencieux, et pourtant si parlant.
— Pas si sûr... Il est entouré de sbires à sa solde, mais son pouvoir n'est pas si dévastateur.
— Risqué quand même. C'est un proche d'Adrae...
— Je sais...
— Il n'y a pas que ça. Pourquoi cette jeune femme te préoccupe tant ?
Je tique sur la question, sans doute parce que je ne suis pas certain de détenir une quelconque réponse, mais plutôt un infime espoir.
— Parce que j'ai pris conscience de son pouvoir. Incroyable. Immense. Donc je m'en méfie. J'ignore combien de temps on va devoir rester ici, alors je reste sur mes gardes.
Elle hoche la tête, perplexe. Elle doit sentir que je ne lui dis pas tout. Ses doigts pianotent sur mon poignet à un rythme régulier, son regard se perd dans le vide.
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Sang-Noir
ParanormalJe n'avais pas de passé, et pas d'avenir. J'aurais dû m'en contenter. Parce que soir-là, dans la ruelle, ma vie a basculé. Et me voilà propulsée dans un monde qui m'est inconnu. Un vampire sorti tout droit d'un magazine de mode a essayé de m'aspirer...