Hetna

13. Vidänz

    — Il faudrait songer à partir, maintenant, je vais fermer.

    Vidänz ferma le livre en un claquement sec. L'archiviste retint un grognement de mécontentement et Vidänz lui lança un regard désolé. Rares étaient les livres papiers sur Hetna, ils en prenaient donc un soin immense afin de les conserver pour les générations suivantes. Tous les documents rédigés par leurs ancêtres étaient ainsi protégés dans la tour du gouvernement. Tout le monde ne pouvait pas y accéder. 

    Ce qui l'avait amené à se rendre aux archives ce jour-là, était le souvenir de sa rencontre avec les terriens. Il n'y avait pas cru au départ lorsque son frère lui avait annoncé leur présence sur Hetna. Vidänz avait toujours été persuadé que le jour où les terriens les découvriraient ne viendrait jamais. Pourtant, il les avait vus, leur avait parlé. Finalement, leurs homologues humains n'étaient pas si stupides. 

    Il avait donc passé les jours suivants leur rencontre à mener quelques recherches. Tous les hetniens n'étaient pas au courant de l'histoire qui les liait aux terriens. Seuls ceux ayant eu accès aux archives la connaissait. Et de ce qu'il en savait, à peine une poignée de personnes avaient été autorisée à y entrer. Lui-même avait de la chance d'avoir pu obtenir ce droit. Son statut n'était pas supposé lui permettre ce genre de choses. Mais de quoi pourrait-il se plaindre ? De n'être qu'un faire valoir pour son frère ? Non, bien sûr, il devait en être reconnaissant. 

    Il chassa ses pensées d'un léger mouvement de tête et se leva pour aller reposer, avec plus de douceur cette fois, le livre qu'il avait pris. Il pouvait sentir le regard de l'archiviste sur lui mais décida de ne pas y faire attention. 

    Une fois sorti de la pièce, il leva son poignet devant lui. Des chiffres jaunes se mirent à flotter au-dessus de son bracelet connecté. Il était déjà tard. Il regarda autour de lui, réfléchissant à quoi faire et où aller. Il n'était pas particulièrement impatient à l'idée de rentrer chez lui. Il n'avait rien d'intéressant à y faire.

    Même si aucune caméra n'était visible, il savait que toute la tour était surveillée. Mieux valait ne pas s'attirer d'ennuis en fouillant dans la tour. Il jugea donc préférable de rentrer sans causer de problèmes. De toute façon, il avait déjà appris beaucoup de choses durant ses lectures d'archives. Des informations qui correctement utilisées pourraient lui permettre d'obtenir ce qu'il désirait. 

    Il passa ainsi les trois jours suivants dans les archives. Personne ne lui demandait quoi que ce soit, personne ne l'empêchait de s'y trouver, alors il profitait du savoir de ses ancêtres. Mais voilà qu'alors qu'il était plongé dans la lecture du journal d'un explorateur, la tour fut secouée de tremblements. Un bruit sourd d'explosion parvint jusqu'à lui. 

    Plus que surpris, il quitta les archives en vitesse et se précipita vers l'ascenseur. Dans les couloirs, tous ceux travaillant pour le Gouverneur se regroupaient, tentant de comprendre. Vidänz parvint à atteindre un ascenseur et entreprit de rejoindre le seizième étage. Alors qu'il sortait de la cabine, quelqu'un lança :

    — Qu'est-ce que c'est ?

    Vidänz se tourna vers la vitre que désignait l'homme. Au-dessus de la capitale, au beau milieu du ciel bleu, ils pouvaient voir des lumières cyan, rouges, comme des flammes et un énorme nuage de fumée grisâtre. Autour de la capitale semblait se dresser un bouclier bleu translucide. 

    Ne perdant pas plus de temps, Vidänz poussa la double porte menant au bureau de son frère. À l'intérieur, c'était l'effervescence. Vidänz trouva son frère, l'air furieux.

    — Est-ce qu'ils se fichent de moi ? Ces idiots ! Ils ne savent pas ce qui les attend !

    Vidänz avait rarement vu son frère énervé. D'autant plus qu'il avait une petite idée sur la situation. Même si un autre détail l'intriguait. Son frère le remarqua ce qui ne le fit que soupirer davantage.