In extremis

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Kazutora tourna lentement la page de son livre, n'osant pas découvrir la prochaine page. Il redoutait vraiment ce qui se trouvait dessus, qu'allait-il bien pouvoir se passer ? Le jeune homme allait découvrir la suite de l'histoire, son cœur battait à toute allure dans sa poitrine, comment pouvait-il être si stresser pour une simple histoire ? Non, non il n'en était pas capable. Il referma d'un coup sec le livre, faisant relever la tête à Chifuyu.
— Qu'est-ce qu'il te prend ?
— Bon j'ai besoin de savoir. C'est Karasuno ou Inarizaki qui va gagner, demanda Kazutora avec un regard perçant.
Chifuyu le regarda avec surprise, puis il éclata de rire. Kazutora avait demandé ça comme s'il s'agissait de la question du siècle, comme si c'était le problème le plus important au monde.
— Lis et tu verras bien, répondit Chifuyu en reportant son attention sur son ordinateur.
— Non mais Chifuyu, la pression est trop grande, je vais péter un câble. J'ai besoin de savoir, s'exclama Kazutora en se levant vivement pour faire les cents pas.
   — T'es grave Kazu, dit Chifuyu en riant. T'es pour qui ?
   — Mais je sais pas ! D'un côté y'a Karasuno avec Kageyama qui est très fort, et Hinata aussi, mais de l'autre y'a les jumeaux et Suna... En vrai, je serais dégoûté si Inarizaki perdait, genre c'est trop la honte pour eux, mais d'un autre côté, c'est nul si Karasuno perd maintenant...
   — C'est vrai que ce serait la honte s'ils perdaient à Inarizaki...
   — Donc ils gagnent ? En fait j'espère au moins que Suna va défoncer ce petit batard de Tsuki, s'exclama Kazutora en faisant le tour du bureau.
   — T'aime pas Tsukishima, releva Chifuyu d'un air amusé.
   — Mais je le hais ! Il est chiant, pas sympa, cynique, moche, il est là « ouais c'est qu'un jeu nianiania », c'est pas qu'un jeu ok ?! s'exclama Kazutora avec sérieux.
   Chifuyu explosa de nouveau de rire, alors que Kazutora se massait les temps d'un air épuisé.
   — Je t'assure je peux pas le voir. Oh non mais le pire, c'est quand il a dit « aRa Ra GOmEn », se souvint le jeune homme d'un air dégouté. Non vraiment je peux pas. « ArA RA gOmEN ». C'est trop pour moi. Avec ses lunettes oh mon dieu. Tu vois là y'a Kisaki...
   Kazutora leva sa main gauche au dessus de sa tête.
   — ... et là y'a Tsuki.
   Il leva sa main droite et la colla sous sa main gauche, ce qui tordît un peu plus de rire son ami.
   — Vraiment, les deux mêmes. Avec leurs vielles lunettes là. Kisaki, Tsuki, Tsuki, Kisaki, dit Kazutora en faisant la balance avec ses mains. Les deux c'est à la poubelle. Yaaa la place des bigleux c'est la poubelle !
   — T'es vraiment grave, dit Chifuyu en essuyant les larmes de rire qui coulaient sous ses yeux.
   — Mais en plus il fait trop l'insolent avec Suna, faut le remettre à sa place hein, continua Kazutora en s'asseyant sur le bureau de son ami. Suna il a mille fois plus de charisme que lui, lui je l'aime. 
   — Il y a d'autre personnage que tu n'aimes pas, demanda curieusement Chifuyu.
   — Hmm... J'aime pas Asahi, il sert à rien c'est une arnaque de ouf. J'aime pas Ushijima. Il est trop chiant avec Oikawa, « t'aurais du venir à Shirajesaispasquoi » mais s'il a pas envie il vient pas, merde à la fin laisse-le vivre ! Attends, entre Shirajesaispasquoi et Aoba Johsai où il y Iwaizumi, Iwa le sang en fait ! Il me fait penser à... à Kisaki avec Mikey. Encore lui tiens ! Putain, dit Kazutora d'un air énervé. Même dans les mangas Kisaki il me gonfle, c'est fort ça quand même !
   Kazutora soupira avec épuisement, il balança ses jambes dans le vide, alors que son regard se posait sur son ami, qui était repartit dans un fou rire en l'entendant parler. Chifuyu était installé sur le canapé de son bureau, ses jambes étendues sur les coussins. Son ordinateur reposait sur ses cuisses, des lunettes de repos se tenaient sur son nez, ses cheveux noirs étaient relevés en un petit chignon et deux mèches tombaient sur son front. Sa tête était rejetée en arrière, ses lèvres étirées en un grand sourire, d'imperceptibles faussets étaient apparues sur ses joues.
Kazutora sourit en voyant son ami rire ainsi, puis il descendit du bureau pour partir se rassoir dans son fauteuil. Là où il se mettait à chaque fois qu'il venait voir Chifuyu à son bureau. Le jeune homme aimait bien venir ici, même si c'était pour faire la même chose qu'à la maison. Ici c'était mieux, Chifuyu était là au moins. À force de venir, Kazutora avait même décidé de laisser des livres ici, comme ça il aurait de quoi s'occuper.
   — T'es vraiment bête, dit Chifuyu en se calmant.
   C'était peut-être vrai, mais ça le faisait rire.
   — Y'a des gens qui aiment Tsuki au moins, demanda Kazutora en reprenant son manga.
   — Bien sûr, certains le préfère à beaucoup de personnage. Il y en a même qui le voit avec Yamaguchi ou Kuroo et-
   — Oh non... mais Kuroo il va avec Kenma, dit Kazutora avec désespoir.
— Kenma va aussi avec Hinata, dit Chifuyu en reportant son attention sur son ordinateur.
— Je vais aller me pendre, salut. Kurotsuki et kenhina, rien que d'y penser mes yeux saignent. J'ai besoin de javel.
— Mais arrête tu me déconcentres, dit Chifuyu en riant de nouveau.
— Comme si tu travaillais, répliqua Kazutora avec un haussement de sourcil.
— Évidemment que je travaille, je te signale que je charbonne tous les jours pour pouvoir gagner de l'argent et t'offrir un toit, répliqua Chifuyu.
— Moi aussi je travaille, lança Kazutora. Pas tous les jours mais quand même.
— Oui mais c'est moi qui rapporte le plus. C'est avec mes billets que tu peux te payer des Louboutin.
— Je mets pas de Louboutin, je m'appelle pas Inui, répliqua le jeune homme d'un ton sarcastique.
— Tu penses qu'il se les paye lui-même, demanda curieusement Chifuyu. Ou c'est Koko qui lui offre ?
— Koko ne dépenserait jamais de l'argent pour quelqu'un d'autre que lui. Inui ne compte pas tant que ça pour lui, en fait il reste avec lui parce qu'il ressemble à Akane, donc il n'a pas de raison de lui offrir quoique ce soit, dit Kazutora en ouvrant son manga.
— Hmm... Ça me fait de la peine pour Inui.
— Pas moi, c'est un connard comme Koko.
— Pas vraiment. Seul il est gentil.
— Sauf quand il t'envoie son poing dans la gueule, répliqua Kazutora d'un ton amer.
— Je n'aimerais pas être à sa place... Être proche d'une personne, pour qu'au final celle-ci ne nous regarde jamais vraiment, mais ne voit que le fantôme d'une autre personne... c'est humiliant, rabaissant et blessant.
Kazutora comprenait ce qu'il voulait dire. Mais il avait du mal à éprouver de l'empathie envers une personne comme Inui. Il ne le connaissait pas réellement, et il ne l'aimait déjà pas pour avoir plusieurs fois frappé Chifuyu. S'il arrêtait de toucher à son ami, il pourrait peut-être l'apprécier.
   — Si Inui n'aimait pas cette situation, il partirait, dit Kazutora avec indifférence.
   — On arrive pas toujours à se séparer des personnes qui nous font du mal ou qui se servent de nous, dit Chifuyu. Tu es bien placé pour le savoir non ?
   Kazutora ne répondit pas. Il n'y avait pas pensé, il avait toujours du mal à se rendre compte que Kisaki et Hanma avaient abusés de sa faiblesse mentale pour le manipuler et tuer Baji.
   La porte du bureau s'ouvrît soudainement, Kazutora et Chifuyu relevèrent vivement la tête pour voir Inui entrer, suivit de Koko. Kazutora se figea, ne sachant pas du tout quoi faire.
   — Chifuyu où est Take... T'es qui toi, demanda Inui en dévisageant Kazutora.
   Le jeune homme échangea un regard paniqué avec son ami. Bon, la situation était soudaine, c'était le moment d'improviser.
   — Son frère.
   — Mon cousin.
   Oh non, il fallait que Chifuyu se taise ! S'il ne disait pas la même chose que lui, forcément ça n'allait pas être crédible.
   — Son cousin, dit alors Kazutora.
   — Mon frère, rectifia son ami.
   L'improvisation à deux était une très mauvaise idée.
   — C'est mon cousin, mais il est comme mon frère, s'empressa de dire Chifuyu.
   — Vous ne vous ressemblez pas du tout, constata Koko d'un air suspicieux.
   — Je ressemble à mon père mais on est liés du côté de ma mère, inventa Chifuyu. Vous voulez quoi ?
   — On veut voir Takemichi. Il n'est pas dans son bureau, on pensait qu'il serait avec toi, dit Inui en s'avançant dans la pièce.
   — Il est avec Mitsuya il me semble, répondit rapidement Chifuyu.
   — Pourquoi est-ce que ce mec n'est jamais là où il faut, demanda Koko en levant les yeux au ciel. Viens Inupi.
   Mais Inui ne l'écouta pas. Il s'avança lentement dans le bureau, Koko, qui s'apprêtait à partir, le regarda avec agacement mais l'attendit tout de même. Inui passa derrière Kazutora, et le jeune homme sentit son odeur traîner derrière lui. Une odeur fraîche, florale, qui allait parfaitement avec son apparence délicate.
   — Tu viens souvent ici, demanda Inui à l'adresse de Kazutora.
   Il s'était arrêté devant une armoire, celle où Kazutora laissait ses livres.
— Ça dépend selon mon humeur, répondit Kazutora d'un air implacable.
— C'est étrange, ton visage me dit quelque chose. Tu ne fais pas partit du Toman, je me trompe ?
— Non.
— Inupi bouge toi je t'attends, dit Koko d'un air impatient.
   Inui se retourna, mais il ne rejoignit pas son... ami (?) pour autant. Ses yeux clairs se plantèrent dans ceux ambrés de Kazutora, son regard était perçant, analytique. Le jeune homme se sentait sonder de l'intérieur, comme si Inui pouvait plonger dans ses pensées les plus profondes. Il avait déjà ressentit ça lorsque Chifuyu le regardait avec insistance, mais avec Inui c'était particulièrement désagréable. Kazutora soutint cependant son regard, ne voulant pas détourner les yeux.
— Je repasserai tout à l'heure, dit Inui au bout d'un moment.
Il détourna lentement les yeux, une expression neutre au visage et sortit du bureau en compagnie de Koko. La porte se referma silencieusement du bureau, leur pas résonnèrent un instant sur la moquette du couloir, puis plus aucun son ne se fit entendre.
— Faut que tu partes tout de suite, déclara Chifuyu en refermant son ordinateur.
Il devait avoir raison. Inui avait dit qu'il repasserait, ça ressemblait à une sorte de menace. Il allait sûrement revenir pour interroger Kazutora, c'était plutôt mauvais signe.
   — Il doit se douter d'un truc. Il a vu tes livres et vu ma tête, il a du comprendre qu'on était pas en train de vraiment travailler ou un truc comme ça.
   — Qu'est-ce qu'elle a ta tête, demanda Kazutora sans comprendre.
   Chifuyu enleva rapidement ses lunettes, puis il détacha ses cheveux avant de passer sa main dedans pour bien les remettre.
   — Quand t'es là je suis en mode détendu, expliqua Chifuyu. Les autres me voient jamais comme ça, encore moins Inui et Koko. Il est quelle heure ?
Kazutora sortit son téléphone de sa poche et l'alluma.
— Quinze heure et quart.
— Merde, à cette heure là y'a plein de monde ici. Si tu croises les anciens du Toman ils vont de reconnaitre, c'est mort.
Chifuyu s'approcha du mur de verre, qui faisait face à l'entrée du bureau, et regarda vers le sol. Kazutora le rejoignit pour l'imiter, ils étaient très haut au-dessus du sol, d'ici la rue d'en bas paraissait toute petite.
— Il y a la voiture du chauffeur de Kisaki, constata Chifuyu d'un ton ennuyé. Ça craint un max.
— Si je sors par les escaliers de secours ça devrait aller non, dit Kazutora.
— Ouais, il ne faut juste pas que tu croises quelqu'un dans le couloir et à la sortie se l'immeuble. En général, quand on est tous réunit ici, il y a des gardes à l'entrée des portes qui surveillent les allées et venues des gens.
— Putain ils font chier, vous êtes des stars ou quoi, s'énerve Kazutora.
— Quelle idée de venir ici aussi, s'énerva Chifuyu en tapant son pied au sol.
— Huh ?! Je fais ça tout le temps et tu dis jamais rien !
— Bah là je te dis un truc, t'es super con et irresponsable de venir au siège du Toman !
— Je suis pas con et je suis pas irresponsable, c'est de ta faute tout ça !
— De ma faute, s'écria Chifuyu avec incrédulité. Tu viens ici de ta propre volonté, tu ramènes tes affaires, tu n'es pas prudent, tu ne vérifies même pas qui est là quand tu viens, et c'est de ma faute.
— Ouais, de ta faute ! T'as... t'as qu'à être plus à la maison, s'exclama Kazutora d'un air indigné.
— Mais je rêve, tu te fous de moi ?!
— Non, je m'ennuie quand t'es pas là !
— Je ne suis pas là pour te divertir, répliqua Chifuyu d'un ton vexé. Si tu t'ennuies, joue avec Peke J !
Il se détourna de Kazutora en croisant les bras sur son torse, signe qu'il faisait la tête. Kazutora devait vraiment avoir un problème de communication, à chaque fois qu'il essayait de dire quelque chose à Chifuyu, ça tournait en chamaillerie et son ami se vexait. Il avait juste essayé de faire comprendre à son ami qu'il lui manquait...
— Je voulais juste dire que-
Quelqu'un frappa soudainement à la porte. Inui revenait déjà ? Chifuyu se retourna précipitamment vers Kazutora, il attrapa sa tête et la baissa d'un coup, le forçant à s'agenouiller derrière son bureau. Kazutora eut à peine le temps de disparaître qu'il entendit le cliquetis de la porte qui s'ouvrait.
— J'ai entendu des voix, je te dérange, demanda une voix familière.
— Euh...
— Tu n'es pas seul n'est-ce pas ?
Kazutora déglutit difficilement. C'était la voix de Mitsuya, il en était persuadé. Si Mitsuya le voyait, il allait immédiatement le reconnaître. Mitsuya devait avoir vu son manteau, il savait donc que quelqu'un se trouvait là.
— Non, je ne suis pas seul, avoua alors Chifuyu.
   — Je ne savais pas que tu étais casé, dit Mitsuya d'un air étonné. Je vais vous laisser terminer vos affaires, Chifuyu on te demande en salle de réunion.
   Kazutora entendit la porte s'ouvrir une nouvelle fois, puis se refermer. Aucun des deux garçon ne bougea. Kazutora n'osait même pas lever les yeux vers Chifuyu. Qu'est-ce que Mitsuya venait de dire ??? Il pensait que Chifuyu était en couple avec lui, et qu'ils étaient en train de... de... oh non... c'était extrêmement gênant.
   — Donc... la réceptionniste pense que je suis ton frère, Koko et Inui pensent que je suis ton cousin, et Mitsuya pense que je suis ton mec, récapitula lentement Kazutora.
   — S'ils en parlent entre eux, on aura vraiment l'air con, soupira Chifuyu en passant sa main sur son visage.
   — Je ferais mieux de partir tout de suite. Et tu as raison, c'était pas malin de venir ici, je vais arrêter.
— Dis pas n'importe quoi, tu peux pas te passer de moi.
Chifuyu attrapa le poignet de Kazutora pour l'entraîner derrière lui, il récupéra son manteau sur son passage, et ouvrit la porte de son bureau pour passer sa tête dehors, et ainsi vérifier que la voie était libre. Kazutora se pencha au-dessus de lui, mettant sa tête juste au-dessus de la sienne.
— Qu'est-ce que tu fais, murmura Chifuyu d'un air agacé.
— Je t'aide à vérifier que la voie est libre, répondit Kazutora avec sérieux.
Chifuyu serra les lèvres pour ne pas rire et enfonça son coude dans son ventre.
— Un peu de concentration je te prie, nous sommes en mission, dit-il en essayant de rester calme.
— Je suis super sérieux là ça se voit pas ?
Chifuyu leva la tête vers lui pour le regarder, et ses cheveux caressèrent le menton de Kazutora.
— Pas vraiment. Viens, la voie est libre.
Chifuyu tira Kazutora hors du bureau et se mit à trottiner sur la moquette du couloir.
— ... assure que j'ai vu une queue de cheval noire.
Chifuyu déploya son bras devant Kazutora, le stoppant brusquement. Des voix leurs parvenaient depuis le couloir qui coupait perpendiculairement celui dans lequel ils se trouvaient.
— Je me demande bien qui ça peut être, dit une voix étrangère à celles que connaissait Kazutora.
— Ce n'est peut-être pas une fille, fit la voix de Mitsuya.
— Chifuyu n'est pas gay.
— Il est totalement gay, assura une troisième voix.
— Pas du tout, il mate les filles dans la rue avec Takemichi, lança une quatrième voix.
— Tu mates les filles dans la rue, chuchota Kazutora en se retenant d'exploser de rire.
— Absolument pas. Je ne suis pas Takemichi, dit Chifuyu d'un air hautain.
— Et t'es gay ?
— Je te trouve bien intéressé d'un coup, répondit Chifuyu en haussant un sourcil.
Il se plaqua contre un mur, forçant Kazutora à faire de même, alors qu'un sourire en coin étirait sa bouche.
   — Je te plais ou quoi ?
   Kazutora ne préféra pas répondre, sachant d'avance qu'il allait bégayer. Il se pencha devant son ami afin de discrètement regarder où se situait Mitsuya. Il était un peu plus loin dans le couloir adjacent au leur. Il leur faisait dos, et les personnes qui se trouvaient avec lui semblaient passionnés par ce qu'il racontait. C'était le moment où jamais. Kazutora attrapa le bras de Chifuyu, puis il avança rapidement vers l'autre côté de son couloir, sans que Mitsuya et les autres ne le remarquent. C'était moins une.
   — Je crois qu'ils nous ont vus, dit Chifuyu.
   — Mais non t'inquiète.
   — Quelque chose vient de passer non, demanda la voix de Mitsuya.
   — Et merde, dit Kazutora alors que Chifuyu se mettait à rire. C'est de ta faute ça !
   — C'est toi tu me déconcentres.
— C'est ça. Bon bouge ton petit cul, j'ai pas envie qu'on ait des embrouilles.
— J'ai pas un petit cul, dit Chifuyu en courant derrière Kazutora.
— ... Si.
— Je sais mieux que toi.
— Crois-le, répliqua Kazutora alors qu'ils arrivaient devant un escalier.
   — C'est très flatteur de savoir que tu me mattes, lança Chifuyu en passant devant le jeune homme pour descendre les escaliers.
   — Je ne te matte pas.
— Alors comment tu sais que j'ai un petit cul ?
— ...
   — T'es bien obligé de me regarder pour me peindre non ?
   Kazutora se figea en plein milieu des escaliers.
   — Comment tu le sais ?
   — Quand j'ai remarqué que tu me tournais autour, et que tu me fixais en plissant les yeux, je me suis dit que ça avait peut-être un rapport avec tes peintures.
   — Ah... mais t'aime bien ?
   — Ouais c'est grave stylé. Si un jour je suis ruiné, je revendrais tes toiles hyper cher, dit Chifuyu avec sérieux.
Kazutora se remit en marche et rattrapa son ami, qui était déjà au bas des marches.
— Fais-en ce que tu veux, après tout c'est toi qui est dessus.
— Oh non Kazu...
— Quoi ?
— ... J'ai pas de chaussures.
Le jeune homme baissa les yeux sans comprendre, et constata qu'effectivement, Chifuyu était bel et bien en chaussettes. Mais qu'est-ce qu'il faisait en chaussettes ? Kazutora fronça les sourcils, en essayant de se rappeler à quel moment son ami avait enlevé ses chaussures. Mais oui ! Quand il s'était installé dans son canapé ! Il avait enlevé ses chaussures pour ne pas salir les coussins !
— Mais t'es pas possible toi alors, s'exclama Kazutora en riant.
— Je te jure que j'avais pas remarqué, assura Chifuyu en riant à son tour.
— À quel moment tu ne remarques pas que tu es pieds nus, s'écria Kazutora avec hilarité.
— Mais je sais pas j'ai paniqué !
— T'es vraiment con toi !
— Arrête de rire, dit Chifuyu d'une voix qu'il tentait de maîtriser. On va se faire repérer !
Kazutora serra les lèvres pour se forcer à se calmer, puis il suivit son ami dans un nouveau couloir.
   — N'empêche tu-
   Kazutora percuta soudain quelqu'un et manqua de tomber en arrière. Il recula précipitamment, et vit avec horreur que Takemichi se tenait juste devant lui. C'était la pire situation possible. Il se tenait là, debout devant le jeune homme, en chair et en os, le regardant avec incrédulité. Kazutora ne se posa pas plus de question que ça. Takemichi ne l'avait pas reconnu pour l'instant, il fallait agir immédiatement. Il leva son poing et l'enfonça dans le visage du pauvre garçon, avant de littéralement partir en courant.
   — Tu viens de le frapper, s'écria Chifuyu en aidant Takemichi à se relever.
   Mais quel idiot celui-là. Kazutora fit vivement demi-tour, et courut vers son ami.
   — Mais t'es qui toi, demanda Takemichi d'une voix pâteuse.
   — Oh tiens y'a Mikey là-bas, s'exclama Kazutora en pointant son doigt derrière Takemichi.
   Celui-ci se tourna aussitôt, et Kazutora profita de son inattention pour prendre la main de Chifuyu et le tirer avec force vers lui.
   — Attends je-
   Kazutora n'écouta pas Chifuyu. Il serra sa main dans la sienne, sans même se rendre compte que c'était la première fois qu'il lui prenait la main. Les deux hommes arrivèrent devant l'ascenseur, puis s'engouffrèrent dedans, avant de faire précipitamment se refermer les portes.
   — T'as frappé Takemichi, s'exclama Chifuyu d'un air incrédule.
   — Désolé, j'ai paniqué. De toute façon il est habitué non ?
   Chifuyu le regarda sans savoir quoi répondre.
   — Ça se fait pas de dire ça ?
   Chifuyu haussa les épaules, un léger sourire au visage. Le voir comme ça détendît Kazutora, il s'adossa contre le mur de l'ascenseur et baissa les yeux sur ses chaussures. Son cœur battait plus vite que d'habitude dans sa poitrine. Et il était légèrement essoufflé pour avoir courut. On aurait dit qu'il était en train de s'échapper d'une prison particulièrement sécurisée, c'était amusant.
— Tu devrais retourner dans ton bureau, les autres vont sûrement aller te voir, dit Kazutora en penchant la tête.
   — Ouais t'as raison..., dit Chifuyu alors que les portes de l'ascenseur s'ouvrait sur le hall d'entrée.
   — Chifuyu, dit Kazutora en sortant.
— Hmm ?
— ... Tout à l'heure, je voulais juste te dire que tu me manquais.

Issue - Là où apparaît la couleurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant