Deux idiots

Bibliothèque

Il a beau avoir fait le fier, il n'en mène pas large. Tsukishima ne s'attendait pas à croiser Kuroo sur ce campus. Après tout, il y en a plusieurs sur Tokyo, pourquoi a-t-il choisi la même que lui ? Enfin chronologiquement, c'est plutôt lui qui a choisi la même... Mais là n'est pas la question.

Lui est venu parce que c'est une des meilleures facultés d'histoire : même en jouant au volley et en y passant énormément de temps, jamais il n'a abandonné son rêve de travailler en musée d'histoire naturelle, entouré de dinosaures. C'est la première étape de son but, et il espère retourner à Sendai à la fin de ses études. La vie à Tokyo est intéressante, mais il ne peut réfuter que c'est un jeune de la campagne, et qu'à choisir, il préfère y vivre. Il a besoin du calme qui y règne, de la solitude qui l'entoure, sans jamais être seul. Étonnamment, en arrivant à Tokyo, l'absence de Yamaguchi, son ami d'enfance resté à Sendai pour son école de commerce, et de Hinata, parti au Brésil, lui pesait un peu. Il ne pouvait espérer croiser que Kageyama entre deux entraînements pour l'équipe nationale, mais il préfère éviter. Il n'est pas si perdu non plus.

Égaré dans ses pensées, il arrive à la bibliothèque universitaire. Il n'a pas cours ce matin, et cet après-midi il n'a que la réunion de bienvenue. Il voulait donc découvrir le lieu où il allait passer le plus de temps, du moins il le pense. Il remonte ses lunettes avec son index droit, et entre dans la bibliothèque universitaire. Il s'amuse en se rendant compte qu'il est pour une fois plus petit que les étagères : avec son mètre 95, il peut malgré tout atteindre facilement le haut. Il se fait d'ailleurs alpaguer par plusieurs étudiants en peu de temps, ce qui a tendance à l'énerver. Il souffle à chaque fois, histoire de faire comprendre que ça l'importune réellement. Sans oublier un petit air moqueur quand il donne l'ouvrage demandé. Il se fait d'ailleurs insulter plusieurs fois, mais il s'en fiche.

Il finit par s'asseoir sur une table, en faisant attention à ses genoux. Vraiment, comment se fait-il qu'il soit si grand dans ce pays ? Il aime sa taille, il en a fait une force au volley, mais ce n'est pas toujours pratique au Japon. Tsukishima sort enfin son ordinateur de son sac pour profiter du réseau Internet qu'il n'a pas encore chez lui. Il regarde ses mails, répond aux réseaux sociaux, et se balade sur le site de la faculté. Il finit par regarder les résultats des clubs de sport, et surtout de volley, bien évidemment. Il sourit en voyant les articles sur Bokuto et Yaku, les fiertés de la fac. Des photos des matchs de l'université sont aussi sur le site, et il voit des photos avec Kuroo, Yaku et Bokuto. Vraiment trop d'anciens joueurs qu'il avait déjà affrontés au lycée. Il est tiré de ses pensées par une voix qu'il connaissait.

- Tsukishima ?

- Oh, Akaashi!

Le jeune homme aux cheveux noirs et yeux bleus orageux se tient à côté de lui, surpris de rencontrer le jeune homme à Tokyo, dans la même université que lui.

- Les lunettes te vont bien.

- Merci, j'ai encore du mal à m'y faire, je t'avoue. Je suppose que c'est un passage obligatoire en faisant des études de lettres ! Et toi, que fais-tu ici ?, demande le brun en s'asseyant face au blond.

- J'ai intégré la fac d'histoire.

- Oh bien joué. Elle est plutôt cotée.

- Merci.

- Tu as croisé des personnes que tu connais ?

- Juste Kuroo...

- Ah, ok, je suppose qu'il distribuait les tracts devant... ça va être bientôt la fameuse soirée...

Akaashi enlève ses lunettes pour les poser sur la table. Il met sa tête entre ses mains, les doigts sur les tempes, avant de les faire revenir dans ses cheveux noirs. Tsukishima regarde le jeune homme d'un air dubitatif, se demandant si sa santé mentale n'était pas atteinte à force de traîner avec le chat et le hibou.

- Akaashi ?

- Oui, pardon, j'ai des bribes de souvenirs d'un Kôtarô bourré torse nu qui hurlait debout sur le bar qu'il était fou amoureux de moi, avant de finir par tomber. C'était mignon mais j'ai cru mourir de honte.

- Comment t'as pu trouver ça mignon ?

- Il faut croire que je suis aussi atteint qu'eux, dit-il en riant.

Tsukishima sourit, pour approuver ce qu'il dit. Sortir avec Bokuto, c'est quand même un exploit : oui il est doux et agréable quand il est normal, mais encore aujourd'hui, il a tendance à être lunatique. Moins qu'au lycée, promet Akaashi, mais quand même.

Akaashi finit par sortir ses affaires et commence à travailler sur les premiers cours de la matinée.

- Tu veux manger avec moi ce midi ?

- J'ai une réunion à 13h30, ça te gêne pas ?

- Je reprends à 13h, donc non. Je te montrerai la cafétéria comme ça. Je ne vois pas Kôtarô avant ce soir, si c'est ça ta question. Il est à l'entraînement jusqu'à 11h, puis il enchaîne sur 2 heures de physiologie et une heure et demie de management du sport, avant d'avoir son entraînement de volley avec la fac.

- C'est quoi ces journées de taré ?

- Celle d'un futur champion. Ce n'est pas aussi dur tous les jours, mais oui le lundi est compliqué pour lui. Et le samedi il a souvent ses compétitions universitaires, et celle avec les MSBY le soir en semaine. Il doit se reposer une journée par semaine, pour l'instant c'est le dimanche, après on verra.

- Et tu retiens son emploi du temps en plus du tien ?

- Si je veux savoir quand il peut rester avec moi et quand je peux le croiser, j'ai plutôt intérêt !

Il se remet à travailler, laissant le blond traîner sur son pc. Vers 11h30, ils décident de se diriger vers la cafétéria, et continuent de discuter de tout et de rien. Puis Akaashi abandonne le plus jeune, pour aller en cours. Tsukishima part s'installer à l'avance dans l'amphithéâtre pour sa réunion, qu'il redoute. Et il a bien raison : elle est d'un ennui mortel, le seul intérêt pour lui est d'avoir enfin son emploi du temps. Qu'est-ce qu'il en a à faire des remontrances du directeur de la section au sujet des étudiants qui abandonnent, de ceux qui passent plus de temps à s'amuser qu'à travailler, des questions toutes aussi inutiles les unes que les autres des autres étudiants... La réunion a été plusieurs fois interrompue par les différents clubs et associations étudiantes, dont celle de Kuroo, même si ce n'est pas lui qui se présente, puisqu'il a cours tout l'après-midi. Et ça déçoit presque le blond, qui remue vite la tête dès que cette pensée lui traverse l'esprit.