TRINITY - Tome 1 : Les humains viennent des étoiles. Et nous ?

[ 33 ] Café, croquis et mission enflammée 1/2

[ Institut Électre Even, Île de Logres, Ontario, Canada04 Juin 20**07H06 ]

[ Tjana ]

Jetant un dernier coup d'œil sur les deux masses endormies sous les couvertures, je souris affectueusement. Il faut croire que Trixie et Taima se remettent encore de cette sacrée soirée. Je referme silencieusement la porte sur la chambre derrière moi, veillant même à m'éloigner sur la pointe des pieds pour être sûre de ne pas réveiller Tai' et Trix'. Il est encore un peu tôt mais le soleil est levé, alors moi aussi. Et puis, j'ai le sommeil troublé ces derniers temps...

Après être rapidement passée par les cuisines pour m'enfiler un thé, un œuf brouillé et du bacon, je sors dans le parc. J'entame un footing, ma queue-de-cheval se balançant dans mon dos en rythme. J'ai bien le temps de me vider l'esprit à coup de foulées abrutissantes et répétitives avant que mes élèves n'arrivent au gymnase.

Pendant que mes pieds frappent le chemin de terre battue entourant le parc, je repense à ces dernières semaines, à ces derniers mois, même.

Une certaine routine s'est installée. Taima passe beaucoup de temps au laboratoire souterrain pour élaborer ses inventions en compagnie d'Alejandro. Elle se rend souvent au repaire de geeks aussi. Je crois qu'elle y rejoint quelqu'un. Mais la brune est pudique sur ce genre de choses alors Trixie et moi n'insistons pas. Je suis juste contente de voir Taima sourire sans raison apparente lorsqu'elle regarde sa tablette après que cette dernière a produit un petit tintement. Trixie, elle, s'entraîne toujours aussi régulièrement avec le Prof.

Le reste du temps que nous passons toutes les trois est partagé entre prélassement au salon commun, sorties chasse en ville ― quoique Taima se contente du sang servi au réfectoire dès qu'elle peut ― ou encore entraînement au combat pour ne pas nous ramollir. On se joint aux membres des Marked-men, ce qui est stimulant puisqu'on peut se mesurer à de puissantes capacités surhumaines très différentes.

Quant à moi, j'ai mes cours à donner aux jeunes de l'Institut.

En passant à l'ombre de chênes au garde-à-vous, je me souviens avec un sourire que le tout premier groupe que j'ai entraîné a tenté de prévenir le suivant de ce qui l'attendait et je dois avouer que les neuf autres groupes ont à chaque fois été un peu plus démerde, mais c'était encore loin d'être la fête... Enfin ma fête... Enfin bref.

Je les entraîne à se dépasser, à découvrir l'ensemble de leur potentiel, même si pour certains, il faut gratter ― voire décaper. Pas qu'ils soient nuls ou qu'ils manquent de talent. C'est un peu comme si on disait à un humain normal en parfaite santé et en pleine force de l'âge « Cours et saute cette barrière » mais que l'humain en question refusait car il se persuade que la barrière est trop haute. Et bah plusieurs de ces jeunes s'imposent tout seul des tonnes de barrières en les croyant bien plus imposantes qu'elles ne le sont. Je ne leur jette pas la pierre. Ils ont souvent connu de mauvaises expériences découlant de l'apparition de leurs pouvoirs et ils ont peur.

Mes propres capacités étaient imprévisibles au début. Paradoxalement, je n'en ai jamais eu peur car j'ai toujours eu l'intime conviction qu'elles me protégeaient. Je prenais chaque découverte comme elle venait, ayant juste conscience qu'elles pouvaient êtres dangereuses et que je devais apprendre à les gérer. Par contre, j'ai observé Taima qui, elle, avait peur de ses éclairs. Alors j'essaie de me mettre un peu à la place des pensionnaires, pour mieux les comprendre et mieux les aider. Pour mieux les pousser, également.

Les épreuves que je leur fais passer, presque chaque jour, sont aussi nombreuses que diverses, mais elles ont toujours pour but de faire comprendre aux élèves que leurs pouvoirs ne sont pas dangereux et qu'ils peuvent être modelés, adaptés selon la situation. Une fois, ils ont dû récupérer le plus vite possible un bâton de relais que j'avais gentiment laissé flotter à la surface d'un étang, retenu à une bouée. Pour leur montrer l'exemple, je n'avais eu qu'à léviter sur un disque pour effectuer l'aller-retour.