TRINITY - Tome 1 : Les humains viennent des étoiles. Et nous ?

[ 9 ] Retrouvailles impromptues, mallette et drôles de bougres 2/2

Lorsque je me retourne, mes yeux s'exorbitent en tombant nez-à-nez avec l'imposant canon d'une mitraillette. J'ai si mal que je n'arrive pas à me concentrer suffisamment pour manipuler l'homme qui me regarde avec un sourire sadique. Un éclair bleuté m'éblouit. Lorsque je rouvre les yeux, son corps convulsant s'écrase au sol. Je tourne encore la tête pour trouver Thunderbird.

― Bouge ! me hurle-t-elle tout en lançant un nouvel éclair. Reste pas statique !

Elle a raison, si je reste là je suis morte. Je fais fi de la douleur cuisante et rampe jusqu'à la mallette qui ne se trouve pourtant qu'à trois ou quatre mètres de moi. Est-ce que ce qu'elle contient vaut vraiment tout le mal que l'on se donne ? Est-ce que cela vaut vraiment le coup que nous nous mettions à ce point en danger toutes les trois ? Et en même temps, ce serait tellement bête que nous abandonnions maintenant, si proches du but.

Je serre les dents, attrape cette putain de mallette et me traîne derrière une voiture noire. Des taches noires commencent à brouiller ma vision. Je me penche pour la refermer. Une vive douleur inonde mon épaule. On dirait que mes nerfs se rétractent tous sur eux-mêmes pour s'agglomérer. Ma main comprime la plaie, je me mords violemment la lèvre inférieure pour m'empêcher de crier. Autant éviter d'attirer l'attention. De grosses gouttes de sang passent entre mes doigts, s'échouent sur le tableau à découvert.

Merde, merde, merde... Fait chier !

― Derrière toi ! entends-je Thunderbird hurler.

Les yeux écarquillés par la peur et l'incompréhension, je veux bouger, mais des bras forts m'en empêchent en me plaquant contre le grand corps auquel ils appartiennent. Je ne comprends plus rien, tous mes sens sont noyés par les stimulus de cette bataille : fumé de canon, bruits de mitraille, cris de ferveurs ou de douleurs, odeur de poudre et de sang, l'eau des flaques gorgeant mes habits... Puis je sens ce fameux corps être secoué de plusieurs soubresauts, concordant avec les bruits de tirs et d'impacts de balles dans la chair.

― Aïe... fait une voix masculine pour se plaindre.

La poigne autour de moi se desserre, ce qui me permet de me retourner. Quelle n'est pas ma surprise lorsque je vois le jeune homme aux yeux rouges de tout à l'heure, accroupi derrière moi, faisant barrage de son corps. Je l'observe en train de rouler des épaules comme si quelque chose le gênait dans son dos. Ma bouche s'entrouvre. Il a pris les balles à ma place, dans le dos. J'entends le cliquetis que fait le métal lorsqu'il tombe sur le goudron, mais dans l'immédiat je suis un peu trop secouée pour y prêter attention ni comprendre ce que cela signifie.

― Mais... qu'est-ce que tu fais ? ne comprends-je pas. Tu viens de te faire tirer dessus !

Pour peu que ma réflexion ne soit pas trop court-circuitée par la douleur de tisonnier enfoncée dans mon trapèze, je m'affolerais à propos de l'intégrité corporelle et de la santé mentale de ce type.

― T'inquiète, j'ai un corps dense, affirme-t-il avec désinvolture alors que j'entends très bien la grimace endolorie dans sa voix.
― Mais pourquoi t'as fait ça ?
― Je suis pas un mauvais bougre, tu sais ? ne trouve-t-il rien de mieux à me dire.

Je remarque finalement l'homme qui nous a tiré dessus, derrière l'homme aux yeux rouges. Il est resté figé plusieurs secondes, apparemment déconcerté par la robustesse du super-héros. Mais maintenant il se ressaisit et nous met à nouveau en joue.

― Moi si, affirmé-je en faisant référence à la dernière phrase de mon « sauveur ».

Je tends la main vers notre attaquant.

― Meurs, lui ordonné-je.

Il se tire dans la seconde une balle dans la tête. Le jeune homme aux yeux rouges le regarde s'effondrer puis reporte son attention sur moi. Il ne semble pas habitué à voir des gens être aussi froidement abattus.