VERRECROCE - Un 5 novembre imprévu

II- Le premier jour des vacances

         Pierre émergea doucement d'un sommeil lourd et paisible. Il regarda autour de lui et mis du temps à reconnaître où il était. Il se frotta alors plusieurs fois les yeux, persuadé d'être encore dans un rêve. Mais le mouvement que fit le corps à ses côtés, se retournant dans le lit, lui rappela que non il ne rêvait pas, que oui il partageait un lit avec Benjamin dans SA caravane aux États-Unis. Il laissa sa tête reposée sur l'oreiller et sourit doucement, se laissant remplir d'un sentiment de joie et d'affection quand il tourna les yeux vers le brun allongé à ses côtés, qui dormait encore profondément. Il prit le temps de prendre de profondes inspirations, les yeux fermés, il n'avait pas l'habitude de ce sentiment de bien être, dès le réveil, et il lui semblait que faire un mouvement de plus aurait fait disparaître ce moment de paradis, comme lancer un cailloux dans une mer calme. Il craignait les remous, comme depuis le début de son mal être depuis plusieurs mois, il vivait encore dans la peur constante que chaque instant heureux se termine. Du mouvement se fit à ses côtés, ce qui le fit rouvrir les yeux, son regard se posant sur le visage de son ami qui baillait à s'en décrocher la mâchoire. À bien l'observer, Pierre remarqua qu'il avait l'air épuisé, ce que son ami ne manqua pas de lui confirmer rapidement :

" Je suis éclaté ! Souffla son ami en chuchotant, comme si le son de sa voix l'aurait trop brusqué dans son réveil, puis il se tourna vers Pierre : bonjour toi ! Ça te fait quoi d'être vieux ? "

         Pierre rit doucement :

" Je n'ai que rejoins ton âge cher ancêtre ! Mais je vais très bien, et c'est grâce à toi ajouta-t-il presque timidement, et il se délecta du rouge que prirent les joues de son collègue avant de continuer : et toi, t'es crevé, t'as pas bien dormi ?

- Je serais bien tenté de dire qu'être dans le même lit que toi ne pouvait qu'être synonyme de mauvaise nuit, mais même pas j'ai dormi d'une traite ! C'est plutôt la nuit dernière qui s'était transformée en insomnie... "

         Et Pierre comprit à quel point son ami avait dû appréhender la journée d'hier, c'est vrai qu'il avait fait très fort pour son anniversaire, un peu fou même, et Pierre pouvait très bien imaginer les inquiétudes qu'avait dû traverser Benjamin alors il se permit de le rassurer :

" Tu as géré Ben, t'aurais pas dû t'en faire autant et en faire autant pour moi. Repose toi, on a deux semaines devant nous !" Répondit-il sur le ton de l'humour, sachant pertinemment que c'était bien rare que lui-même dise cela.

         Benjamin souffla du nez, et ferma simplement les yeux, en restant sur le dos. Pierre l'observa quelques instants sans rien dire, profitant du silence et de la quiétude du moment. Mais assez vite il quitta discrètement le lit en remarquant que ses pensées envers son "collègue" devenaient bien trop tendres. Il redécouvrit alors la caravane, sa caravane, sous la belle lumière du jour. Il ouvrit ensuite le frigo et les placards, à la recherche de quelque chose à manger et il avait vu juste, son ami avait été plus que prévoyant, et avait amené des sachets de café et du pain, l'avion ne permettant de toute façon difficilement plus. Benjamin fut alors de nouveau réveillé, mais cette fois-ci par l'odeur d'un café fumant qui atteignit ses narines. Ça suffit à le motiver et il sortit rejoindre Pierre, qui commençait à sortir une table pliante pour dehors. Et c'est ainsi qu'ils partagèrent leur premier petit déjeuner des vacances, sous le soleil timide de novembre, dans leur bulle de calme et de bonheur, qui ne pouvait que donner bon augure pour le reste du séjour.

         La première journée fut simple. Pierre découvrit tout d'abord où ils étaient précisément garer. Ils discutèrent ensuite gaiement de ce qu'ils voulaient faire des prochains jours, Benjamin laissant Pierre choisir, et Pierre insistant pour savoir ce qui donnait le plus envie à Benjamin. Pierre ne sut dire s'il y avait toujours eu cette dynamique entre eux, celle de vouloir toujours rechercher le bonheur de l'autre, constamment, parce que c'est ce qui semblait faire leur propre bonheur. Ils finirent d'imaginer un possible trajet pour leur road trip, que Pierre prit soin de laisser en hypothèse, histoire de voir comment les premiers arrêts se passeraient, histoire de voir ce qu'ils préféraient faire. Tout compte fait, c'était assez inédit pour Pierre de partir en voyage avec Benjamin. Ou plutôt en vacances. Les voyages pour les tournages, ils en avaient fait plein, mais un voyage de vacances, que tous les deux, c'était une première. Et c'était une première à organiser, Pierre ne voulait pas risquer de gâcher ces deux semaines en imposant à Benjamin une escale ou une activité qui ne lui plairait pas. Sauf que Benjamin ne l'entendait pas de cette manière, et essayait d'assurer à Pierre que tout lui irait. En vérité, tout lui allait s'il y avait sur le visage de Pierre son grand sourire de bonhomme heureux, tant que ça plaisait à Pierre, ça plairait à Benjamin, mais ça il était difficile pour le brun de l'admettre et de l'avouer à voix haute au blond. Alors après avoir fait quelques plans pour les prochains jours, Pierre prit pour la première fois le volant, direction le supermarché le plus proche, et ils y firent des provisions pour leur séjour. Cette fois-ci, ce fut Benjamin qui mena la danse, et Pierre le suivait, émerveillé de le voir imaginer les repas qu'il pourrait leur préparer dans la cuisine de sa caravane. Pierre se sentait bizarre, il avait l'impression de faire les premières courses juste après un emménagement avec son petit copain. Et loin de lui l'idée que cette impression le répugnait, bien au contraire, cela fit revenir des sensations dans son corps, au niveau de son estomac. Et il souriait démesurément quand il rattrapa Benjamin en l'arrêtant d'un main posée sur son épaule :

" Dis Ben, au lieu de prévoir que tu nous fasses la cuisine, tu voudrais pas en profiter pour m'apprendre ? Comme ça je pourrais t'aider au lieu de ne faire que mettre les pieds sous la table, et puis ça me sera toujours utile plus tard de savoir faire autre chose qu'un plat surgelé !

- Va pour des leçons de cuisine, je t'accepte comme assistant, mais c'est bien parce que j'ai personne d'autre sous la main ! " S'exclama Benjamin.

         L'idée semblait bien plaire au brun, Pierre venait de lui proposer une activité ensemble, ce qui de toute façon était inévitable puisqu'il allait passer les deux prochaines semaines ensemble, mais Pierre lui montrait un intérêt pour la cuisine et lui demandait de transmettre son savoir en la matière. Et que Pierre s'intéresse ainsi à l'une de ses passions plaisait bien à Benjamin, même s'il adore faire de bons plats pour les faire goûter à ses amis, il aima tout autant savoir que Pierre voulait aussi être capable de faire cela. Alors Benjamin réfléchit avec encore plus de sérieux et de minutie à ce qu'ils achetèrent. Ils rentrent ensuite à la caravane y déposer les achats, et après avoir réussi à la stationner en bordure de New-York, ils passèrent le reste de la journée à visiter cette grande ville.