II- Le début de la suite

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Aucun des deux ne prit la parole pendant quelques minutes. Pierre se redressa sur la tête de lit, et observa Benjamin de ses petits yeux rougis. Il attendait. Il était désormais spectateur de la suite de la discussion. Son cœur arrêtait de ressentir, comme s'il s'était mis sur pause, il avait été heureux, il avait libéré toutes les larmes de son corps de tristesse, il était maintenant en attente de savoir ce qui allait finalement se passer, et s'accrochait au visage de Benjamin pour essayer de déterminer ce qu'il pensait. Sauf qu'il ne laissait pas beaucoup d'indice sur son visage. Il avait juste l'air inquiet, ou plutôt angoissé. Il lâcha un long soupir avant de relever les yeux pour fixer le mur, se triturant les mains, et reprenant la parole :

" Je suis désolé Pierre. Pour tout. Je suis désolé que tu souffres autant, que tu sois malheureux. J'espérais réussir à te changer les idées mais je vois bien que ça ne suffit pas. Je m'en veux tellement Pierre, depuis le début à Maison Grise, depuis la première fois où j'ai cru percevoir sur ton visage de la tristesse, je n'ai rien fait. Enfin si, j'ai essayé de te changer les idées, te faire rire, mais ce n'était en réalité qu'en surface. J'aurais dû faire plus d'effort pour toi, essayer de te parler franchement, pour que tu puisses te confier, pour que tu puisses m'appeler à chaque fois que ça n'allait pas, pour que je puisse vraiment t'aider à remonter la pente au lieu de me contenter de quelques blagues dans la journée. Je te l'ai dis, ce voyage pour moi c'était une façon de te montrer que tu n'étais pas seul, et que tu avais toujours la possibilité d'être heureux. Mais je me rends bien compte que ça ne suffit pas Pierre, et je m'en veux de ne pas réussir à te consoler ou à t'épauler pour que tu sois heureux. J'avais l'impression que tu l'étais, mais finalement aujourd'hui je doute. Je sais que je suis pudique, réservé, que je montre pas souvent mes sentiments ou que je ne parle pas souvent de moi, mais c'est pas parce que je suis comme ça que tu n'as pas le droit de te confier à moi si tu en ressens le besoin bien sûr. Je sais plus quoi faire de plus pour obtenir plus que juste un sourire de ta part. Je souhaite tellement que tu sois heureux, sincèrement, et tout le temps, parce que tu le mérites Pierre, personne ne peut le mériter plus que toi. "

Benjamin fit une pause, fermant les yeux pour reprendre ses esprits et ordonner ses pensées. Il voulait dire ça bien, dans l'ordre. Pierre s'était redressé, comme s'il voulait tendre encore plus l'oreille pour se nourrir des gentilles paroles de son ami. Son cœur se réchauffait petit à petit à chaque fois qu'il comprenait que Benjamin faisait et voulait tout faire pour lui. Sous cet élan de tendresse, Pierre perdit le contrôle de sa bouche et s'entendit demander d'une petite voix :

" Qu'est-ce que tu m'as dit Ben quand j'avais cauchemardé ? "

Il eut soudainement peur d'avoir sorti la question de trop. Il regarda Benjamin, vit son visage se crisper quelque peu, puis fut certain qu'il avait pris une décision. Il l'observa déglutir, avant de tourner enfin les yeux vers lui et fixer les mains de Pierre qui se tordaient également, en reflet de son ami. Sa voix était un peu hésitante mais il articula chaque mot :

" Je t'ai dis que tu n'étais pas seul. Tu pleurais dans mes bras, tu te disais seul et incapable de recevoir plus jamais de l'amour de personne. Je n'ai pas pu m'empêcher de te contredire. Alors je t'ai dis que je t'aimais. Ça t'a si rapidement calmé je n'arrive pas à oublier ton visage mouillé mais apaisé que tu m'as présenté juste après, avec un grand sourire. Ce n'était pas juste pour te calmer Pierre, ça m'a calmé moi aussi. Pouvoir te l'avouer sans que tu ne t'en souviennes vraiment, pouvoir me confier sans avoir de mauvaises conséquences sur notre relation, ça m'a tellement soulagé le cœur. Et c'est sincère Pierre, je t'aime. C'est dur de l'avouer pour moi. Sache surtout que ça me brise de te voir aussi mal. Je tiens tellement à toi. J'aimerais tellement te donner tout le bonheur dont tu as besoin, mais j'en suis incapable et je viens de ruiner notre amitié. Je suis désolé Pierre.

- Arrête de t'excuser Ben, arrête ça."

La voix de Pierre était remplie d'émotion, mais elle était déterminée, il n'y avait plus aucune hésitation dans sa voix, et il respira un bon coup pour contenir toutes les émotions qui le traversaient avant de le rectifier :

" Je ne peux pas te laisser dire ça Ben. Tu as réussi. Tu as réussi à me rendre heureux alors que je déprimais à Maison Grise, les seuls instants de joie que j'ai eu ces derniers mois, je te les devais tous. Tu me motivais à continuer, je me levais chaque matin seulement pour te voir parce que je savais que tu réussirais à me faire sourire. Je ne savais pas que tu avais perçu ma tristesse, ça me touche tellement de savoir que tu faisais attention à moi. Et tu as réussi à me rendre heureux pendant ce voyage. Depuis mon anniversaire, j'ai redécouvert la joie de vivre, uniquement grâce à toi. Tu détiens tout mon bonheur Ben, évidemment que je t'aime, je t'aime tellement. Je l'ai compris le jour de mon anniversaire je crois, mais je sais au fond de moi que ça fait bien plus longtemps que je t'aime. Moi aussi ça me fait bizarre de le dire. J'ai peur de briser l'amitié aussi belle qu'on partage, c'est pour ça que je ne disais rien. Mais je t'aime tellement, et sincèrement, n'en doute pas je t'en prie. Ben, si aujourd'hui ça n'allait pas, c'est pas parce que tu ne réussis pas à me rendre heureux, c'est parce que tu n'étais pas auprès de moi. Je ne supporte plus être loin de toi, j'ai constamment peur de te perdre, je tiens tellement à toi je t'aime Ben, je t'aime."

Pierre avait les larmes aux yeux, mais ils brillaient majoritairement de joie. Benjamin lui sourit, timidement, avant de se rapprocher et de le prendre dans ses bras. Ils se serrèrent fort, comme pour s'assurer que ce moment était réel.

" Je suis désolé Pierre pour aujourd'hui. Avec la soirée d'hier, mes sentiments étaient trop forts, j'avais l'impression d'étouffer, et j'avais peur de craquer, tu étais tellement adorable hier soir ! Alors je suis parti me balader, pour me changer les idées et me calmer. Je voulais pas te blesser mon Pierre je suis désolé.

- Ben, qu'est-ce que j'ai dis ? Arrête de t'excuser ! Tu as le droit d'avoir besoin de te balader un peu seul, c'est moi qui m'excuse d'avoir du mal à être seul, en même temps tu m'habitues à une compagnie de très bonne qualité ! "

Ils se serraient encore l'un contre l'autre, la tête de Benjamin enfoui dans le cou de Pierre, qui lui caressait doucement le dos.

" Tu sais Ben, moi aussi j'ai peur de comment va évoluer notre relation, mais je sens au fond de moi que vu notre alchimie même en amitié, la suite ne peut qu'être prometteuse, j'ai confiance en nous, mais je suis pour qu'on aille doucement, à notre rythme. Tant que tu m'autorises à te considérer comme sortant avec moi, je ne peux qu'être heureux.

- Si tu veux bien de moi Pierre, évidemment que tu peux."

Et Pierre était le plus heureux des hommes, serrant fort entre ses bras son petit ami, le plus parfait des hommes qu'il connaissait, synonyme de son bonheur.

------FIN DEUXIÈME PARTIE------

VERRECROCE - Un 5 novembre imprévuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant