17 - Le début d'une nouvelle vie

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Été 2022


J'ignore si je suis plus heureux que stressé ou l'inverse. Peut-être même que c'est la fatigue qui domine, je ne sais pas trop. Nous avons fait des kilomètres en voiture afin de rejoindre Bordeaux. C'est Sayaka qui nous a emmenés. Sora et moi sommes en train de passer le permis, nous avons eu le code, mais nous devons encore réussir la conduite, et comme je ne sais toujours pas comment faire un créneau, je m'inquiète un peu du résultat. Je vais essayer de ne pas rayer la voiture du moniteur, ça devrait le faire si je me tiens à ça... Du coup, c'est la sœur de Sora qui fait le voyage avec nous pour emmener nos affaires dans l'appartement qui sera le nôtre à partir de la rentrée.

En réalité, la location a déjà commencé, nos parents sont venus visiter avec nous et ils ont signé les papiers avec le vieux monsieur qui loue sa dépendance, mais Sora comme moi avons du mal à quitter notre village et notre famille, alors nous ne nous y installons pas encore. Et j'aimerais bien avoir mon permis avant ! Déjà que passer la conduite me stresse, alors si je dois le faire dans une ville que je ne connais pas, c'est sûr que je vais échouer.

Yuriko pense que nous ne nous servirons pas beaucoup de la voiture à Bordeaux. Akihito, qui connaît bien les lieux, a confirmé qu'il était plus simple de prendre les transports en commun. Malgré tout, mes parents m'ont acheté une voiture, et Sora et moi tenons à pouvoir la conduire. On ne sait jamais, ça peut être utile, et surtout, ça rendra les trajets entre ici et notre village plus facile. Je ne suis pas certain qu'il y ait des trains qui fassent le trajet direct. Sora doit savoir, il s'était renseigné quand on ne savait pas encore qu'on étudierait au même endroit et qu'on vivrait ensemble.

Quoi qu'il en soit, aujourd'hui est le jour où nous amenons le gros de nos affaires. C'est ce qui me rend à la fois heureux et stressé. Je suis ravi de commencer mes études supérieures maintenant que je sais ce que je veux faire plus tard, ravi aussi d'aller dans la même faculté que Sora et de vivre avec lui, mais en même temps, cela m'angoisse. Tous les changements m'effraient encore, je n'y peux rien.

— C'est là ? demande Saya.

Je n'avais même pas remarqué que nous étions à l'arrêt. La voiture est garée devant une petite maison que je reconnais sans mal, même si elle est semblable à toutes celles autour. Le portail est de deux couleurs différentes, vert et rouge, ambiance Noël, alors forcément, ça m'a marqué. Je suis plutôt bleu, blanc et argenté quand il s'agit de cette fête, mais tant que ça a un lien avec Noël, je suis heureux.

Je hoche la tête, puis je la tourne vers Sora qui sourit en me regardant depuis l'avant du véhicule.

— Quoi ?

— Tu regardes le portail, je sais à quoi tu penses.

Je rougis d'avoir été surpris dans mon addiction à Noël. Des années d'amitié avec ce jeune homme, un an et demi de couple, et je continue à être timide. Ça commence à être énervant ! Surtout que lui, il prend de plus en plus d'assurance...

Je le fuis en ouvrant la portière pour sortir du véhicule en emportant le sac qui se trouvait à mes pieds. Je pousse le portail, puis, muni de la clé, j'ouvre la porte de notre chez-nous, Sora sur mes pas.

Le propriétaire n'est pas là, sans quoi il serait sorti nous dire bonjour. Nous sommes venus à deux reprises, pour visiter, puis pour signer les papiers, et chaque fois, nous n'avons pas eu le temps de sonner, le vieux monsieur est sorti de chez lui en souriant pour nous accueillir. Il a l'air très gentil, de ce que j'en ai vu.


Je me déchausse et entre chez nous. Oui, c'est chez nous. Ça me fait quelque chose. D'un coup, je me sens devenir adulte, je me sens aussi plonger un peu plus dans ma relation amoureuse avec Sora.

Sora qui se poste à côté de moi et regarde les lieux comme je le fais. C'est un studio avec une cuisine et une salle d'eau en bas, ainsi qu'une mezzanine qui fait office de chambre. C'est petit, mais j'adore l'endroit, et je l'aimerai encore plus quand on aura ajouté tous les éléments qu'on a apportés, j'en suis certain.

Mon cœur bat vite dans ma poitrine. Encore une fois, j'ignore si c'est de peur ou de bonheur.

— Tu es prêt pour ça ? demande Sora, d'une voix douce.

— Je ne sais pas, réponds-je avec honnêteté.

Mon petit ami pose sa main sur mon bras avec douceur. D'un geste aussi tendre, il me force à me tourner vers lui. Je me retrouve prisonnier de son regard sombre que j'aime tant.

— Tout va bien se passer, Eli. Je te le promets.

— Je te crois, soufflé-je.

Il m'offre un sourire, puis ses lèvres se posent contre les miennes pour un baiser dont je suis particulièrement friand.

Je suis fou amoureux de ce garçon et tout autant de ses baisers !

D'un simple geste, il efface la peur et ne laisse que le bonheur. Comme toujours, c'est un magicien.


Il a raison, tout se passera bien. Avec Sora, il ne peut pas en être autrement. Avec lui, le changement n'est plus si effrayant, je le sais.

— Vous aurez le temps de vous embrasser plus tard, aidez-moi à décharger la voiture, dit Sayaka en soupirant.

Je sursaute en l'entendant et me détache brusquement de Sora. Lui ne bouge pas, il se contente de soupirer aussi, ennuyé que sa sœur nous ait dérangés.

Depuis quand est-il si confiant ? Avant, il rougissait aussi quand on se faisait surprendre. À présent, il fait preuve d'une assurance incroyable. Et pour être honnête, j'adore ça...


Lorsque je lève à nouveau les yeux que j'avais baissés pour observer mes chaussettes – magnifiques, mais surtout pratiques pour cacher ma gêne –, je vois la lueur amusée dans son regard. Il sait que j'aime cette nouvelle facette de lui. Il le sait parfaitement !

Sayaka ressort après avoir déposé un carton, je la suis. Mais avant que je ne franchisse le seuil, la main de Sora attrape la mienne. Il me fait pivoter, puis il prend mon visage entre ses mains pour m'offrir un nouveau baiser.

Et je fonds complètement.

C'est sûr, je vais me sentir bien ici. Le changement a du bon, Sora en est la preuve, et chaque fois que j'en douterai, je suis sûr qu'il me rassurera, comme il le fait en ce moment en caressant mes lèvres des siennes...

— Venez décharger la voiture ! hurle une voix de l'extérieur.

Les étoiles de décembre - Histoires bonusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant