Les étoiles de décembre - Histoires bonus

8 - Le tatouage

Printemps 2021

— Arrête de bouger.

— Tu me chatouilles, répond Sora.

Sayaka est en train de le tatouer, ou plutôt, elle essaye de le tatouer, mais mon petit ami ne cesse de s'agiter. Je pensais que se faire marquer à vie était douloureux, mais il faut croire que ça a plus tendance à chatouiller...

— C'est toujours comme ça ? demandé-je.

— Comme quoi ? demande Saya en tournant la tête vers moi.

— Quand tu tatoues, ça se passe toujours comme ça ?

— Heureusement que non. Sora est juste trop chatouilleux.

— Attache-le à la table.

Nous tournons tous la tête vers la porte. Hiroki se tient à l'embrasure, un grand sourire sur les lèvres. La situation l'amuse. Forcément, c'est un monstre qui adore torturer son petit frère... Heureusement que sa jumelle n'est pas pareille. Sayaka manque de patience, mais elle n'ira pas jusqu'à attacher Sora à la table. Enfin, je crois...

— Qu'est-ce que tu fais là ? s'agace mon copain.

— Ton premier tatouage, je ne pouvais pas manquer ça !

— Vous comptez tous me regarder pendant que je me fais tatouer ? soupire-t-il.

— Moi, j'ai payé.

Sans moi, il n'aurait pas de tatouage. C'est mon cadeau de Noël, je mérite bien de voir ça. Je ne vais pas voir grand-chose parce que dès que mes yeux se posent sur le torse nu de Sora, je tourne la tête en rougissant, mais l'idée est là.

— Faites ce que vous voulez, finit-il par lâcher en soupirant à nouveau.

Je ne sais pas si c'est l'agacement ou le fait qu'Hiro soit là et qu'il a peur que ce dernier l'attache vraiment à la table, mais Sora ne bouge plus après ça. Sayaka commence à tracer le cerisier, ses branches, ses fleurs. L'encre noire recouvre la peau de mon petit ami et j'en oublie complètement ma gêne. Je suis fasciné par la façon dont Saya dessine avec ce drôle d'engin sur la peau de son frère. C'est captivant, assez pour que je ne sois plus mal à l'aise de regarder.

— C'est magnifique... lâché-je en voyant le dessin prendre forme.

— Arrête, tu le fais rougir.

Je lève la tête en entendant la voix rieuse d'Hiroki. Mes yeux tombent sur le visage de Sora qui ne me regarde pas, mais dont les joues sont effectivement rosies. Il commence à s'agiter un peu. Je prends alors conscience que je suis presque collé à lui, que ma main est sur son bras, et que je suis en train de... le reluquer !

Je m'écarte d'un coup, le visage cramoisi.

— Sortez tous d'ici ! s'écrie Sayaka.

Elle a finalement perdu patience.

— Sauf toi, ajoute-t-elle à l'attention de son petit frère.

Je voulais voir ça, mais une Saya qui s'énerve, c'est une Saya effrayante, alors je file sans demander mon reste, suivi par Hiroki qui continue à rire.

Tout ça, c'est de sa faute !

Une heure plus tard, la porte de la pièce s'ouvre et Sora en sort, entièrement habillé. Hiroki lui demande de lui montrer le chef-d'œuvre, mais il l'ignore et m'attrape par la main pour m'entraîner hors du salon. J'entends son frère se moquer à nouveau alors que Sora monte sur son vélo et me fait signe de grimper derrière lui. Sans un mot, je m'exécute.

Nous roulons dans le village depuis un petit moment quand j'ose demander :

— Ça a été ?

— Oui.

— Le tatouage te plaît ?

— Oui.

— Tu vas répondre oui à toutes mes questions ?

— Pas forcément, dit-il en riant.

Je ris avec lui, puis je serre un peu son cou.

— Pourquoi tu n'as pas voulu montrer le tatouage à Hiroki ? demandé-je.

— Je lui montrerai plus tard.

— On doit aller quelque part ?

— Non, je ne voulais juste pas lui montrer maintenant.

Je n'y comprends rien. Pourquoi pas maintenant s'il n'y avait pas d'urgence ? J'ai l'impression de passer à côté d'un truc. Un truc que je saisis quand, d'une petite voix, il me dit :

— Je veux que tu sois le premier à le voir...

Mon cœur s'emballe, et mes joues changent sûrement de couleur, comme d'habitude. Il me faut un petit temps pour me remettre de cet aveu qui veut dire beaucoup pour moi, mais lorsque c'est fait, je serre Sora de toutes mes forces. Je manque de nous faire tomber du vélo, alors il s'arrête le long du trottoir.

Là, à son oreille, je murmure :

— J'ai hâte de le voir.

Quelques mots qui témoignent de bien plus qu'une envie de voir la superbe pièce qui s'étend sur ses côtes, il le sait...