Chapitre 20

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Noam Dellister

Après avoir pris un petit-déjeuner agréable avec ma mère, cette boule au ventre que je garde depuis la nuit dernière recommence à peser dans mon estomac. Elle revient dès que je suis seule et faible. Ce rêve était la chose la plus effroyable que j'ai pu vivre dans ma vie.

Je vivais et ressentais tout, je me suis sentie mourir. J'ai réellement cru que j'étais mort. Et je sais que moi, j'ai eu la chance de me réveiller, mais que ce n'est pas le cas de ce moi des années 60. On est parti, ensemble. Et je ne peux pas m'empêcher de me sentir coupable, j'ai l'impression que c'est à cause de moi. Et le pire, c'est que je sais qu'Adelya avait déjà fait ce rêve avant moi, mais qu'elle ne m'a rien dit. Elle a sûrement dû se réveiller dans un état pareil au mien, et elle a pris sur elle, seule.

Voici une des raisons pour laquelle je traverse la route pour me rendre chez elle. En sachant aussi que j'ai envie de la voir, elle et son doux sourire. Peut-être que cela sera aussi l'occasion d'officialiser notre relation.

Je toque chez elle et quand on m'ouvre la porte, je suis surpris de voir son père sur le palier et non la fille que j'aime.

— Ah euh, bonjour. Je suis un ami d'Adelya, puis-je la voir ? C'est important.

Il me dévisage durement et fronce ses épais sourcils broussailleux.

— Adelya ne peut voir personne actuellement.

Et il me ferme la porte au nez. Je reste sur le cul et recule me demandant si cela vient vraiment d'arriver. Au moment où je m'apprête à partir, une jeune fille que je ne connais que trop bien arrive par son jardin, m'attrape par la main et court avec moi jusqu'à des buissons qui nous cachent de sa maison.

Elle sourit en me voyant et vient poser un baiser sur mes lèvres. Pendant quelques secondes, j'avais déjà tout oublié de la nuit dernière et de la raison principale de ma venue. Son regard se perd quelques secondes dans le vide et je comprends directement qu'elle sait quelque chose.

— Je sais que tu as vu la fin, la fin de notre dernière vie. Cette nuit, je l'ai sentie. Ça m'a réveillée et j'ai eu tellement mal, comme si on m'arrachait le cœur, j'ai même dû aller vomir. Je savais que le choc serait violent pour toi, mais je ne me rendais pas compte que ça le saurait autant.

Rien ne va dans sa phrase. Il me faut quelques secondes pour assimiler.

— Tu dis "notre dernière vie" comme si on en avait eu plusieurs ? Pourquoi est-ce que tu dis que "le choc serait violent pour toi", il ne l'a pas été pour toi ? Ça ne te fait rien de nous voir mourir ? De te dire que si on ne s'était jamais rencontré, aucun de nous deux ne serait mort ?

Elle me prend les mains et plonge son regard dans le mien, un geste se voulant réconfortant et rassurant.

— Je ne sais pas si on en a eu plusieurs, peut-être bien que oui, peut-être bien que non, qui sait ? Je me dis que si c'est arrivé, c'est que ça devait arriver, c'est que c'était notre destin. Alors oui ça me choque, mais je pense que la vie sait ce qu'elle fait. Et ça ne m'importe pas de savoir ce qu'il s'est passé dans cette vie-là, le principal, c'est que l'on soit tous les deux de nouveau réuni dans cette vie-ci actuellement non ?

J'enlève mes mains des siennes et me recule en la regardant. Je réfléchis en continuant d'observer son regard désolé et me prend la tête dans mes mains. Elle tente de s'approcher de moi une nouvelle fois.

— Ne te prend pas autant la tête Noam.

— Je me sens coupable Adelya. Je veux dire, et si c'était parce que je t'avais prise à mes côtés que l'on est mort ? Peut-être que ces rêves sont un message du destin, comme tu dis, pour nous faire nous rendre compte que l'on doit cesser de se voir. Que cela risque d'arriver de nouveau. Peut-être que notre rencontre est une erreur. Et cette vie, c'est flippant à quel point elle ressemblait à celle que l'on a aujourd'hui à quelques détails près, c'est juste invraisemblable.

Le temps du destin (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant