Chapitre 1 : Le coup de blues

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Le 26 décembre

Assise en boule sur le canapé d'Isaac, je fixe le parquet. La petite rayure que j'ai fait, il y a un an de cela en déplaçant la table basse alors qu'il n'y avait pas de tampons dessous, m'appelle. J'ai l'impression qu'elle m'invite à venir avec elle. Ainsi, je n'aurais plus à songer au fait que je vais devoir retourner à l'hôpital demain. Parce que je me fondrais dans le sol, comme elle. Et on m'oublierait ici.

— Tu comptes prendre racine ?

La voix d'Isaac brise mon instant de contemplation et je relève la tête. Les yeux de mon ami croisent les miens et je soupire. Comment peut-il plaisanter alors que mon cœur est sur le point de m'abandonner ? Ne voit-il pas à quel point je suis en train de me noyer ?

— Parce que je ne suis pas contre le fait que tu me serves de décoration artistique, mais la position en boule, c'est vraiment dégueulasse. Donc si tu pouvais juste changer, ça m'arrangerait.

Je fusille du regard celui qui occupe la place de meilleur ami depuis mon arrivée à Ottawa. Malheureusement, je ne parviens pas à tenir bien longtemps et tandis qu'un rire s'échappe d'entre mes lèvres, je vois le visage d'Isaac s'illuminer d'un sourire.

— Ah ! Je savais que tu n'arriverais pas à faire la gueule bien longtemps.

Le canapé bouge sous son poids lorsqu'il s'assoit à côté de moi.

Bien sûr, étant mon confident, il a eu vent de mes exploits de la veille. Exploits que j'ai raconté en m'insultant de tous les noms. Car même si ce baiser avec Tae Woo restera gravé dans ma mémoire pour toujours, je me suis rendu en spectacle devant le personnel de l'hôpital et que désormais, je n'ai pas envie d'affronter leurs regards et questions demain.

Puis surtout, j'appréhende pour ma prochaine rencontre avec l'anesthésiste. Comment va-t-il réagir ? Fini le moment où je me disais que c'était dans la poche. J'ai eu le temps de me faire de la bile à propos du futur.

— Honnêtement, s'il ne veut pas de toi, c'est qu'il est con.

Le regard doux d'Isaac me détend un peu. Tout comme la musique qu'il a mise en arrière fond pour éviter d'avoir à affronter un silence désagréable. Isaac déteste les blancs, depuis aussi longtemps que je le connais.

Ceci dit, je préfère tout de même changer de sujet pour ne plus y penser.

— Comment tu vas depuis la gamelle d'hier ? demandé-je.

La veille, avec les amies, on a fait un before chez lui. Et lorsque nous avons tous les deux voulu danser un rock acrobatique, il s'est emmêlé dans ses pas ce qui fait que nous avons fini par terre alors que nous étions en train de faire un porté.

Il y a eu plus de peur que de mal heureusement. Enfin, pour moi surtout puisque je lui suis tombée dessus. Quant à Isaac, même s'il a voulu jouer au mec fort, j'ai compris au pli de son front qu'il avait dérouillé. Je suis fine, mais je me doute que subir mon poids lors d'une chute, ça fait quand même mal.

— Je suis un grand gaillard, rien ne m'atteint.

C'est ce qu'il dit toujours. Moi aussi d'ailleurs...

— Tu parles d'un grand gaillard oui ! me moqué-je.

Le sourire en coin d'Isaac me fait comprendre qu'il ne relèvera pas. Il a beau avoir de l'ego, il semblerait qu'il ait choisi mon bien-être au sien.

— Alors, après notre before, tu as fait quoi ?

Mon ami me regarde puis rigole et étend ses bras le long du canapé. Il adore faire ça. Même la veille, alors que Zoey, Maddie et Anna étaient là, il n'a pas pu s'en empêcher : il fallait qu'il joue au mâle qui a le contrôle sur tout.

Petit ami et compagnie 3 - Partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant