Le caméraman

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Image, élaboration.

Scénario, réalisation.

Lumière, projection.

Que manque-t-il ?

La diffusion.

Une simple fleur arriva au bureau du lieutenant Lyster.

Un chrysanthème, magnifique, unique, écarlate.

Son nom signifie "fleur d'or" et c'est le symbole des condoléances en France.

Elle signifie l'hommage, le respect, l'immortalité, le souvenir...

Elle signifie le soutien, l'amitié, le courage, l'espoir...

En France !

Car ailleurs, elle est une fleur de joie et de bonheur.

En France, elle est une fleur associée à la tristesse et au deuil.

Cette fleur n'arriva pas seule.

Elle était accompagnée d'un DVD.

Et toute la brigade le regarda.

Estomaquée.

Ce fut le premier DVD d'une longue série.

Il était intitulé le Train...

Ceux qui suivirent portaient des titres simples comme l'Autoroute, l'Incendie, l'Attentat...

Et enfin...

Il y eut l'Accident...

Et toute la brigade le regarda.

Dans le bureau du lieutenant Lyster, il n'y avait plus rien qui venait d'elle.

Le mur avait été repeint et l'image de Ghost fut recouverte d'un blanc soyeux.

Le bureau avait été déplacé et les vitres soigneusement vérifiées.

Pas de volets qui claquaient.

De toute façon, le vent ne soufflait plus et le monde était silencieux.

" Comment ce salopard a-t-il pu filmer tout cela ?, s'énervait Adrien Maillard, les yeux pâles des nuits sans sommeil et des larmes effacées.

- Un drône !, tentait le nouveau lieutenant en charge de l'affaire, Marc Pelletier.

- A-t-on vu un drône à proximité du métro ?

- Non, mais tu n'es pas chargé de cette affaire, Adrien ! Fous le camp ou je fais un rapport sur toi à la direction."

Porte fermée et fin de non-recevoir.

Adrien Maillard était trop proche de l'affaire, trop proche de la victime, trop proche de perdre la tête.

Psychologue, dépression, médicaments, repos forcé...

Il s'enfonçait dans sa propre nuit.

Mais les images de l'Accident tournaient en boucle dans sa tête.

" Nous avons examiné votre dossier, il est excellent, Mlle Traoré. Mais au regard des récents événements, il nous a semblé mieux pour vous de vous déplacer dans un autre service.

- Un autre service, monsieur ?, demanda en souriant Mlle Traoré.

- La mort tragique de votre lieutenant nous a tous marqués. Vous ne pouvez pas travailler sereinement dans de telles conditions."

Ils étaient gentils, ils ne voulaient que son bien-être et Fatou Traoré apprécia le geste.

" Si un policier ne peut pas supporter la mort d'un collègue, peut-il légitiment supporter la pression du métier ?"

MORT ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant