Chapitre V

16 6 6
                                    

          Le lendemain, Argan n'était pas revenu. Il avait définitivement disparut, et cela désespérait Baudering qui ne savait pas quoi faire : partir à sa rencontre, sans être sûr de le retrouver, en abandonnant Lise et Time ? Y aller avec elles ? Ou tout simplement rester ici que la situation avance ?

          Comme promis la veille, il ne partit pas le chercher, mais il en brûlait d'envie. Envie de tout et de rien à la fois. Rentrer chez lui, revoir ses parents et son frère Neonn, mais également de réduire à néant les dictateurs qui l'avaient envoyé sur terre. Il transpirait, et avait chaud. De plus, il faisait de plus en plus de cauchemars qui le réveillait soudainement en pleine nuit.

          - Tu as juste un peu de fievre, ça va passer, éclaircit Time en prenant sa température. Tu n'as jamais été malade ?

          Baudering se retint de dire que sur sa planète, les gens étaient tués avant de pouvoir être malades. Il répondit donc par un simple et faible « non ».

          - Tu en as de la chance, de ne jamais avoir été malade...

*
**

          Une nuit, Baudering se réveilla encore une fois en sursaut. Il alla boire de l'eau et lorsqu'il voulu regarder sa tête dans le miroir, il entendit du bruit, comme un frottement contre la grande porte en bois. Il se rapprocha sur le palier et tendit l'oreille, à l'écoute du moindre fait et geste. Argan était-il de retour ?

          Ça aurait en effet été une bonne nouvelle. Si seulement c'était Argan qui rentrait de son escapade. Mais ce n'était pas lui. Le brun reconnu à son grand malheur le bruit des zombies. Il se précipita donc dans la chambre des deux endormies pour les réveiller. Time, qui avait un sommeil léger, se leva presque aussitôt, mais Lise ne se réveilla pas, alors Baudering la hissa sur son dos et ils sortirent tous les trois de la chambre en silence.

          - Par où sort-on ? Ils sont devant la porte, on ne peut donc pas sortir par là.

          - Il y a un velux dans la chambre d'amis, prévint Time. On peut passer par là, il est assez grand.

          Baudering hocha la tête et ils se dirigèrent vers la pièce enfermée dans la pénombre, où seuls trônaient un lit et une table de chevet.

          Le Yesewis déposa délicatement sa collègue sur le drap gris et ouvrit la petite fenêtre par laquelle ils allaient passer. Il aida tout d'abord Time à escalader sa maison, puis, lorsque celle-ci fut sur le toit, il porta Lise encore endormie le plus haut possible pour que sa sœur puisse l'atteindre et la soulever.

          Il faisait très froid et le vent glaçait les mollets de nos trois protagonistes, bien qu'il y en ai une qui était endormie. Les arbres bougeaient tellement qu'on aurait pu les croire possédés et la neige ne voulait pas s'arrêter de tomber.

          Ils passèrent dans les branches mouvementées et réussirent sans trop de mal à atteindre la partie terreuse où l'on ne pouvait s'enfoncer. Le sol. Time, assez agacée par sa sœur qui dormait toujours malgré tout le bazar qui s'était produit croisa les bras et fixa Lise d'un mauvais œil.

          - Réveille-toi !

          - Laisse-la dormir, on aura besoin de ses heures de sommeil après. Tu es jalouse, on dirait...

          Time devint rouge comme une pivoine et secoua la tête négativement, ce qui prouvait bien le contraire. Baudering sourit d'un petit sourire en coin et posa sa main sur la tête de la réveillée.

          - T'es mignonne quand t'es jalouse. Mais allons-y, essayons de trouver tout ce qui peut servir pour passer la nuit.

          Ils marchèrent en silence dans la nuit noire, en essayant de rester calme et de ne pas faire de bruit pour ne pas rameuter les bêtes sauvages du coin. C'est alors qu'à une centaine de mètres devant eux, ils virent une petite lumière rouge clignoter dans la pénombre. Elle était infime et je pense que peu de personnes auraient pu la remarquer.

          L'homme et la femme s'échangèrent un regard compréhensible : il fallait aller voir d'où venait cette lumière pourpre.

*
**

          Cette lumière appartenait en fait à un fort qui semblait avoir été abandonné depuis un certain déjà. Les murs étaient en béton armé d'une couleur bleue claire. Le terrain était barricadé de barbelés et ne donnait pas envie de s'y aventurer. Mais Baudering se sentait obligé d'y aller.

          Il poussa la grille. Elle n'était pas fermée et Baudering compris pourquoi quand il vit la serrure : elle était remplie de lierre, prête à exploser. La porte blindée du fort était également ouverte mais il fallait la force de la pousser alors il se fit aider de Time.

          L'intérieur était vide. Le sol était fait avec du lino beige et un énorme cylindre trônait au centre de la pièce. Un écran gris était incrusté dedans, il grésillait.

          À leur gauche, dans un coin, une plateforme en bois était fixée. Elle était assez grande pour accueillir deux matelas, quelques caisses en bois et des plaques en métal. Pour y accéder, une échelle souple avait été accrochée pour monter la quinzaine de mètres qui séparaient le sol de la plateforme. Il y avait le même placement dans le coin Nord-Ouest de la base. À l'est, tout était vide. Les deux plateformes étaient reliées entre elles par une sorte de pont de singe avec des planches en bois qui ne semblaient pas être en bon état.

          La base ne paraissait pas être habitée par un quelconque habitant et semblait avoir été prévue pour cette apocalypse, avec ces deux habitats en hauteur. Mais vu la viellesse des équipements mis à disposition, on avait l'impression que tout cela avait été préparé il y a plusieurs centaines d'années. Mais qui aurait bien pu être au courant de ce stratagème pour anéantir l'humanité ? Baudering ne trouvait pas la réponse à cette question.

          Ils décidèrent donc de s'installer sur une des plateformes bien qu'elles n'avaient l'air guères puissantes ou résistantes. Ils choisirent celle au Sud-ouest, car c'était la plus proche d'eux puis ils grimpèrent les quinze mètres.

          Le lendemain, Baudering essaya d'inspecter la base, car si elle avait été prévue pour ce moment, il y avait forcément des explications quelque part. Cet alors qu'en passant devant, l'écran qui était grisé le jour précédent s'alluma sur une personne.

          C'était un homme qui était assis sur une chaise de bureau. Il portait une blouse blanche possédant quelques tâches rouges et bleues, ses cheveux défiaient les lois de la gravité et étaient grisâtres. Il avait des rides sous les joues et sur le front et semblait très fatigué. L'homme ouvrit la bouche et laissa entrevoir de belles dents blanches.

          - Je me nomme Pierces. Ce que je vais te dire va te sembler étrange, Baudering, mais je viens de deux millions d'années dans le futur.

Un avenir... Je sauverai le monde à ma façonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant