Chapitre XXIV

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          - Gardes ! Rapportez-moi le soldat Argan. Myint et moi-même avons à faire avec lui.

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         - Ce tunnel que vous et votre clique avez décidé de creuser... Je vais vous laisser le finir, puisque vous y tenez tant. De toute façon, quand vous aurez disparu, plus personne ne voudra l'emprunter.

         - Comment ça ? Qu'allez-vous faire de nous ? s'empressa de demander Argan.

         - Vous expédiez sur Terre. En creusant ce tunnel, vous vouliez pouvoir vous enfuir très loin, n'est-ce pas ? Ainsi, j'exaucerai votre vœu. C'est galant de ma part, puisqu'en tant que déserteur ou simplement futur déserteur c'est normalement la mort qui vous attend. J'ajouterai quand même une condition, donc une mission en échange de votre vie : exterminez-moi tous les Hommes, revenez en vie et je vous offrirai la liberté.

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De nos jours : Finalement, la construction du tunnel pouvait faire profiter les Hommes, espèce que le dictateur souhaitait voir disparaître. Ironie du sort, les travaux dont il avait exigé les finitions afin de montrer sa supériorité à toute épreuve à Myint avaient permis au groupe de soldats de s'embusquer ici même.

          - Allons-y ! lança Bao en élançant son bras dans la pénombre en guise de signal.

          - Son armée s'engouffra dans le précipice creusé par Baudering sept années plus tôt afin de remonter à la surface. A leur sortie, les lunes brillaient dans le ciel étoilé. A ce moment-là de la nuit, quiconque aurait passé sa tête devant une fenêtre ou un simple trou veillant sur la cour aurait aperçut de nombreuses silhouettes se mouvoir en toute discrétion. Mais personne ne le fit, si bien qu'au petit matin, tous les Hommes de l'équipe de Bao se tenaient prêts à embusquer n'importe quel Yesewis qui aurait l'audace de se promener au sein même de son fort.

          Lorsque l'une des créatures semblant être le général sortit dans la cour, Bao se jeta su r lui afin de bloquer tous ses mouvements. 

          - Alors c'est toi, Poochyèna ? s'écria-t-il ?

          - Poochyèna ? Pas du tout, il a été destitué de ses fonctions puis exécuté il y a maintenant six ans pour avoir formé deux déserteurs.

          - Alors le chef de l'Etat l'a échangé avec un poltron dans ton genre... Peu importe, ça n'a que très peu, même aucune influence sur notre mission. Appelle tous tes soldats à te rejoindre, sans arme, les mains au-dessus de la tête. Et n'essaie pas de me duper, je parle ta langue.

          Durant les années passées à bord du vaisseau, Bao avait été le plus assidu de tous concernant l'apprentissage de la langue Yesewis, si bien qu'il était parvenu à avoir une véritable discussion intéressante avec son mentor Myint.

          - Je ne le répéterai pas : fais ce que tu dois faire, ou je t'exécute.

          A vrai dire, tuer ne s'improvise pas : il faut jour après jour se former à effacer ses émotions et ce n'est pas si simple. Bao n'avait jamais tué qui que ce soit et espérait ne pas avoir à mettre ses menaces à exécution. Mais seul importait l'état dans lequel se trouvait la victime : ici, le général avait tellement peur qu'il ne prit pas la peine de visualiser le visage de Bao changer de regard glacial à moue dubitative.

          Lorsqu'on tue, surtout contre son gré où qu'on n'est pas partis avec cette idée-là, ce moment tragique vous hante sans fin, ou jusqu'à ce que vous acceptez d'avoir commis ce geste. Donc si vous n'êtes pas prêts à accepter la mort d'un autre par votre main, ne tuez pas.
          C'est ce que fit Bao. Il préféra attendre patiemment l'arrivée de tous les occupants afin de les ligoter et de les faire prisonniers dans propres cages, sans aucun mort ou blessé des deux côtés. Bien sûr, il fut aidé de sa troupe lorsque celle-ci eut vérifié que tout le monde eut bien déserté les locaux.

          - Mission accomplie, sourit Bao.

         - C'est la première fois que je te vois sourire ! s'exclama un de ses camarades.

         - Eh bien, garde-le bien en mémoire car tu n'en verras pas d'autres, rétorqua-t-il en se renfrognant de suite.

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          Le sol craquelant sous le poids de ses pas, Baudering marchait d'un pas déterminé entre les fissures et les crevasses qui se dressaient contre lui. Dans les landes qu'il traversait, il n'y avait pas âme qui vive : personne ne venait l'inciter à continuer coûte sud coûte son avancée ou au contraire le pousser à rebrousser le chemin, si bien qu'il se retrouva assez vite devant le mystérieux quartier général qui abritait ce satané dictateur, origine de la plupart des maux de Pluton.
          Devant lui se dressait une grande porte métallique blindée, qui semblait attendre de se faire ouvrir.

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          Zoya, en compagnie de son deuxième fils Néonn et de Lise, patientait en sirotant sur la place son thé lave suspicieux aux yeux d'un Terrien. Après avoir réussi à convaincre les citoyens Yesewis de se révolter, ils n'avaient plus qu'à attendre patiemment le retour de Baudering annonçant une bonne nouvelle.

         - Maman, arrête de boire, tu veux ? Ça ne sert à rien de se lamenter, crois juste en lui.

         - Je sais bien, mais je n'arrête pas d'y penser. Son adversaire n'est pas n'importe qui.

         - C'est vrai, admit Néonn, mais c'est le seul à pouvoir le faire.

         - Pourquoi ça ? intervient Lise.

         - C'est le plus à même d'en finir avec le dictateur, puisque c'est son père.

Un avenir... Je sauverai le monde à ma façonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant