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En revenant déçu de chez Julie, la nuit était noire. Je descendais vers le lac. Les lumières des rues s'éloignaient, je pouvais voir les étoiles. Je m'assois toujours sur le même banc pour les regarder. Si l'on s'attarde un peu, elles arrivent à nous éclairer aussi fort qu'une pleine lune. A ce moment, je comprenais entièrement le mot "briller". Leurs lumières nous arrivent par à-coups. Leur luminance ne se donne pas immédiatement. Comme le sang que le cœur envoie à chacun de ses battements, la lumière s'éteignait un peu pour s'allumer plus forte encore. Comme une respiration, comme un pouls, la lumière me battait aux tempes. Le froid doux me faisait pleurer. Je gardais le regard fixe pour que les étoiles ne s'éloignent pas de moi. Doucement, des couleurs les auréolaient. L'une rouge, l'autre jaune ou brune. Le vert de l'une narguait le bleu d'une autre. Ainsi, il m'arrivait de rester plusieurs heures sur ce banc qui m'avait adopté. En journée, j'y lisais, écrivais ou y emmenait mon amie. On s'y asseyait, sans parler, à regarder le lac et les canards. Depuis, elle est partie. J'y retourne encore et je fixe les étoiles espérant la reconnaître là-haut.

Il y a des nuits où des joggeurs cassent le silence qui m'entoure. Je les entends au loin à leur souffle court et au fracas de leurs pas écrasant le sol de leurs efforts. Le bruit augmente et puis s'apaise. Souvent, ma rêverie est inondée par des phares anonymes qui, sur la route, à l'horizon, noient le ciel. Après l'avoir balayé de leurs tracés humides, les phares effrayent les étoiles de ces lumières trop intenses pour elles. Je ne les reverrai plus cette nuit. Elles ont perdu ma confiance. Les étoiles sont comme les hommes. La nuit, elles rayonnent. Certaines brillent mais n'existent plus depuis longtemps. On n'en voit que leurs lumières. Aussi, il arrive qu'une étoile s'éteigne, que le souvenir se tarisse.

Les étoiles errent dans l'espace selon une trajectoire définie. Il arrive qu'au choc d'une autre étoile, d'un astéroïde ou par l'attraction d'une planète, cette trajectoire change. Par un hasard que l'on pourrait qualifier de mathématique, certaines étoiles se rencontrent, se frôlent, s'attirent, se pulvérisent et leurs poussières se fondent en une nouvelle étoile plus grande, plus brillante, plus belle. Ainsi le destin des hommes est tout tracé. Destin? Révolution elliptique, plutôt !

Nous nous rencontrons, nous nous frôlons, nous nous aimons. La passion nous fait exploser et nous fusionnons jusqu'à l'implosion finale. Celle après laquelle nous espérons un peu de soleil pour réchauffer nos vieux os, un peu de souvenir pour ne pas mourir tout à fait.

Les cahiers de JulieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant