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"Il est dans l'air. Il vole, mon Papa. Mais, il bouch'pas les bras."

—Il ne bouge pas les bras!

« Il se promène dans le ciel; Il monte, il descend, il se couche sur le dos, sur le vente... »

—Sur le ventre!

« Je sais que Maman est là aussi mais je la vois pas... »

—Je ne la vois pas.

« Ils sont tous les deux mais je ... ne ... vois que lui. »

—...!

« Après, on voit par terre. C'est des tapis d'herbes. Des grands carrés verts. On dirait des bouts de tissus coudus ensemble... »

—...cousus ensemble!

« Il y a plusieurs verts. Vert clair, vert foncé, vert comme une boutèl... »

—Une bouteille

« ou comme une pomme, vert comme son pull que Maman a cro lavé... »

—...trop lavé

« ...Plus loin, il y a la même chose avec du jaune comme le soleil, du jaune comme un œuf ou comme l'oiseau comment y s'appelle? ... »

—Comment il s'appelle? Le canari!

« ...Jaune comme un canari! Des fois ça brillait tellement le jaune que c'était presque rouge. C'était aussi comme du tissu le jaune. Il volait bien jusqu'à la mer; Elle avait aussi beaucoup de couleurs, la mer : bleue, grise, verte. Après, mon Papa se retournait sur le dos et il voyait le ciel. Il est tout blanc. Quand on le regarde longtemps, il y a des petits trous bleus. Des fois, un petit crayon de soleil passe par-là... »

—...un rayon de soleil

« ...alors, les nuages sont un petit peu roses ou jaunes. Pas toujours, hein? Leur ventre, souvent, il est gris. Pas vrai, hein? »

—N'est-ce pas?

« ...Après, il va dans les montagnes, elles sont brunes et noires. Mais, il va pas se salir : il vole. Là, il voit les forêts, les villages, la neige tout en haut. Et puis, il y a de la fumée comme une casserole et comme la voiture. Ça sent mauvais! Il est perdu dans la fumée. J'entends un chien qui grongue... »

—...qui gronde

« ...Très fort, il gronde comme un moteur. Et puis, il y a une explosion crè forte... »

—très forte!

« ...ya du feu, des boules de feu et des grosses pierres qui sautent en l'air. »

—Tu as rêvé d'un volcan

« Oui, un volcan et papa il était dedans. Je le voyais plus. J'avais peur. Et j'étais triste. C'était comme un orage, la pluie c'était des pierres. Tout ça s'est passé ... très vite. Et après tout était calme. Y avait du soleil et le ciel était tout bleu. Et dans l'air on voyait des petits points dorés qui volaient. Ils descendaient doucement sans jamais arriver par terre. Alors, j'étais plus triste, je savais dans mon rêve que touts les petits points c'était mon papa. Je sais pas comment expliquer? »

—Je ne sais pas

« Mais c'est pas vrai, hein? Papa? Papa? Tu es là? »

Et voilà, maintenant, je pleure. La maîtresse me dit qu'il faut pas mais je peux pas faire autrement. Et puis, elle me corrige tout le temps, ça m'embête. C'est difficile encore de parler pour moi et puis il y a des choses qui me font mal quand je parle. Alors les mots se bousculent et se cognent. Les mots, ils ont mal aussi. Je me trompe en parlant mais je me trompe pas dans ce que je dis. La maîtresse, elle n'écoute pas ça, elle entend seulement les fautes et elle me dit comment il faut dire. Je pleure parce que je me trompe, je pleure parce que Maman et Papa vont partir demain, je pleure parce que tous les autres se moquent, je pleure parce que je suis toute seule maintenant devant la classe.

"Allez, Mathilde, tu peux aller t'asseoir maintenant. C'est bien mais fais attention à ce que je t'ai dit. Qui veux raconter son rêve?"

—Moi!

—Moi!

—Moi!

—Moi!

—Moi!

—Moi!

"Un à la fois, toi!"

Les cahiers de JulieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant