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PDV NOAH


J'ai l'enveloppe entre les mains, c'est la dernière, la dernière que je n'ai pas encore ouverte, la seule que je n'ai pas ouverte devant mes parents. J'observe le cachet de l'université qu'il y encore quelques mois, je n'aurais jamais pensé avoir entre les mains. Je n'aurais jamais postulé. Je ne l'aurais même pas évoqué dans mon choix de voeux. Je reste fixé, plusieurs secondes encore sur l'écriture grasse, le logo bleu roi en imaginant le gros Y et la tête du fameux bouledogue inscrite sur mon futur maillot.

J'ai été accepté à Princeton mais également à Colombia et en Pennsylvanie.

Mon père, Karl, était fou de joie en voyant la lettre de Princeton et son affection officielle. Pour lui, à la rentrée prochaine, j'intégrerais l'université des « princes » et son équipe fétiche et renommé afin d'amorcer, progressivement, ma carrière de footballer professionnel. Mon rêve, depuis que je suis gamin.

Un rêve de gosse, qui se concrétise après des années de travail, d'entraînements, de sueur et d'acharnement. Le coach Johann m'en a fait baver dés mon arrivé au lycée. Il n'a pas lésiné sur les entraînements, sur le travail de notre équipe et plus précisément, sur mon objectif final. Il a cru en moi dés la première seconde, il a vu en moi mes capacités, « mon talent rare » comme il me l'a évoqué une seule fois, une seule et unique fois après un match que je venais de perdre avec l'équipe. Suite à ce match, il m'a nommé capitaine et a reposé tout ses espoirs sur moi. Il m'a reboosté après cela. Je ne l'ai jamais déçu après ça.

Il a tout fait pour que je rentre à Princeton. Princeton est le rêve de tout lycéen joueur de football, ils ont la meilleure équipe qui soit, en plus d'un cursus intéressant. C'est une opportunité en or d'atteindre mon but, beaucoup d'étudiants deviennent professionnels avant même la quatrième année et terminent leurs études en parallèle de leur nouvelle activité professionnelle, juste histoire d'avoir un bagage, même si, bien souvent, il n'est pas nécessaire au vu du destin réservé à de nombreux joueurs de football. Tous mes joueurs fétiches sont allés à Princeton, toutes les meilleures équipe de cette décennie possèdent au moins trois joueurs venant de Princeton. Tous les joueurs de Princeton ont une chance réelle de passer professionnel et de vivre de leur passion par la suite. Princeton est une occasion unique, une opportunité à ne pas rater lorsque l'on souhaite atteindre ce but, mon but...

Puis j'ai rencontré Joy et maintenant, j'agis comme un putain d'égoïste, comme me l'a gentiment annoncé Trévor, qui heureux d'avoir été pris à Princeton tout comme moi, m'a sauté dans les bras. Je l'ai réceptionné avec moins d'entrain, car je suis définitivement partagé entre mon rêve, mon éventuelle future carrière et Joy, la fille à laquelle je suis tombé amoureux comme un con. Et Trévor a totalement raison...

Je suis un égoïste de ne pas laisser exploser ma joie face à ma candidature retenue alors que tous les joueurs de notre équipe ont postulé et seuls Trévor et moi avons été retenus.

Je suis un égoïste de vouloir laisser passer cette chance, pour une banale histoire de lycée.

Je suis un égoïste de rater cette opportunité, barrer cette chance de ma vie pour une « simple fille ».

Le soucis, c'est que Joy n'est pas « une simple fille » justement. Je l'aime comme un dingue. Je le sens dans mes tripes, dans mon être tout entier. Je connais mon visage d'abrutis lorsqu'elle éclate de rire à mes côtés et que je la regarde comme si elle était la plus belle chose au monde. Je sens ma peau frissonner lorsqu'elle me touche, caresse mon épiderme de ses doigts et que je me contiens pour ne pas la prendre dans chaque endroit de cette ville. J'entends mon organe vital, faire des drôles de vas et viens lorsqu'elle me regarde avec dévotion, qu'elle me sourit à moi seul ou qu'elle m'embrasse avec application.

Une seule règle : On ne s'embrasse pas...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant