Chapitre 1

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21 avril  2010- Londres.

Le crachin qui recouvrait la ville n'avait pas cessé ce jour-là. Avril était gris et Londres maussade. Tout était gris: les arbres, les murs, les rues, les gens aussi étaient gris. Pas un gris joyeux ou lumineux; non, un gris sale et sans éclat comme l'humeur d'Oliver. Il rentrait ce soir, trempé comme une soupe, ses vêtements dégoulinant de pluie et transi par l'humidité ambiante. 

Arrivant chez lui, Oliver fouilla frénétiquement les poches de son manteau pour trouver ses clefs et le biper qui lui servait à ouvrir la porte d'entrée de l'immeuble. Il finit par les trouver et, maladroitement les fit tomber dans la flaque d'eau qui se formait à chaque fois qu'il pleuvait au pied du perron. Il jura tout bas et les récupéra en soupirant. Cette journée n'en finissait pas d'être pourrie comme le temps. Elle avait commencée avec une panne d'oreiller et s'était poursuivie par la panne de batterie de sa vieille Volkswagen. Il était arrivé avec trois quart d'heure de retard pour donner son premier cours de la journée. Les étudiants ne s'en plaignaient pas; un avant-goût du week-end avant l'heure. Lors de sa pause de midi, au lieu d'aller manger, il était allé acheté une batterie toute neuve, s'offusquant du prix et peinant sous le poids de la grosse pile. Il avait dû porter ce fardeau jusqu'à maintenant à travers toute la ville. Trois quart d'heure de bus, trois changements, en pleine heure de pointe. Il était maussade comme tous les londoniens qui l'entouraient, apanage des grandes cités d'Europe, semble-t-il. En temps normal, son trajet ne lui prenait qu'un quart d'heure en prenant les bons raccourcis. Et il n'avait pas à marcher pendant un quart d'heure sous cette pluie en portant une batterie qui pesait un âne mort. Oliver décida de ne pas aller courir ce soir, il valait mieux changer tout de suite la batterie car il n'aurait plus le courage de sortir après être rentré au chaud. Résultat, il s'était arraché la peau des doigts en desserrant les vis de l'ancienne batterie rongée par l'oxydation . Journée pourrie! Oliver y était parvenu après quelques jurons biens sentis et il allait enfin pourvoir rentrer chez lui.

Arrivé au sec dans le hall de l'immeuble qui sentait le chien mouillé, il releva son courrier. Sa boîte était pleine de prospectus et autres publicités sans intérêt. Une semaine qu'il n'avait pas dû l'ouvrir. De toute façon, c'était pas comme s'il attendait du courrier. Il jeta les supports promotionnels dans la corbeille en fer fixée au mur. Il se dit une fois de plus qu'il faudrait qu'il mette un "stop pub" sur sa boîte. Il garda le reste: des factures et une énorme enveloppe craft. Il s'étonna un peu et pensa à une erreur de distribution, mais non, c'était bien lui le destinataire. Son nom et son adresse figurait sur l'enveloppe, tracés à la main d'élégante manière mais quelque peu vieillotte. Cela l'intrigua vraiment. Il ne recevait jamais de courrier mis à part des factures et de temps en temps des cartes postales d'amis. Cette enveloppe eut le mérite de faire disparaitre sa mauvaise humeur. 

Oliver monta lentement les deux étages et ouvrit la porte de son appartement tout en scrutant l'étrange courrier. Il laissa son manteau dégouter sur la vieille patère qu'il avait accrochée là, rare preuve de son manque de passion pour le bricolage. Après plusieurs mois, il s'attendait encore à voir Miss Marple l'accueillir et lui réclamer à manger. Mais Linda avait gardé Miss Marple. Il soupira. Cette chatte lui manquait. Plus que Linda. Il commençait à songer à en adopter un nouveau au refuge mais ce ne serait pas pareil: Miss Marple était unique. Il secoua la tête pour penser à autre chose et jeta son courrier sur la table du salon. La priorité : se réchauffer, prendre une douche et manger un peu.  

Trente minutes plus tard, Oliver sortit de la douche, une serviette sur les hanches et se dirigea droit vers la cuisine. En chemin, il s'arrêta devant le téléphone fixe et vérifia les messages sur le répondeur. Aucun. Comme tous les jours. Pourtant, avant, quand il vivait encore avec Linda, il y avait toujours un message: la mère de Linda, la sœur de Linda, la copine de Linda - celle qu'il ne pouvait pas voir, le coiffeur de Linda... C'était un vrai défilé! En y réfléchissant, son univers social s'était considérablement étrécit depuis qu'il s'étaient séparés.

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