Chapitre 2

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Au matin, Léna se réveilla tôt et se dépêcha de s'habiller avant d'avaler son petit-déjeuner. Elle rejoignit ensuite son coéquipier du jour, une ombre d'une trentaine d'année accompagné de sa pupille de onze ans.

Tous trois sortirent à l'extérieur du Sanctuaire en plissant les yeux, éblouis par le soleil qui brillait déjà à cette heure matinale. On entendait les bestioles qui peuplaient la forêt fourailler dans les buissons, les oiseaux voleter dans les branches dans un bruissement d'ailes incessant. Ils devaient se rendre près d'un petit village non loin pour remplacer l'équipe de nuit. Ils se déplacèrent sans bruit sur le sol meuble de la forêt, sur leurs gardes au cas où un démon ferait son apparition, pour rejoindre le lieu de rendez-vous.

Derrière son buisson, Raphaël était réveillé. Le soleil avait vite eut raison de lui, mais il en fut extrêmement heureux lorsqu'il la vit sortir de la grotte. Elle, l'ombre, celle pour qui il attendait derrière un buisson depuis deux jours avec presque rien à manger. Aussitôt, il se leva et la suivit dans la forêt. Elle était accompagnée de deux autres ombres, dont une très jeune.

Tout en les suivant en tentant de rester discret, le jeune homme détailla le visage entraperçu au village dans un moment d'inattention de la jeune fille, lorsque la capuche avait glissé de quelques centimètres. Elle avait de longs cheveux d'un noir d'encre qui brillaient au soleil, des yeux noirs également, et de jolies tâches de rousseur. Ses oreilles pointues bougeaient dans tous les sens, à l'affut, ressemblant étrangement à celles des félins. Elle était magnifique, et dégageait une impression de puissance telle que Raphaël en était presque réduit à néant. Il attendait de pouvoir lui parler, entendre sa voix, voir ces yeux noirs se poser sur lui, lui dire peut-être à quel point son cœur battait la chamade quand il la voyait...

Une fois arrivés au point de rendez-vous, Léna et ses deux coéquipiers du jour débutèrent les rondes. Ils se séparèrent, tout en restant relativement proches les uns des autres pour pouvoir entendre les bruits d'une éventuelle bataille. La jeune fille s'enfonça donc seule dans la forêt profonde, toujours sur le qui-vive. Il lui semblait entendre des bruits de pas derrière elle, mais elle n'en était pas sûre, car elle ne pouvait concentrer ses sens là-dessus et manquer un éventuel démon. De toute façon, c'était sans doute un animal car les créatures maléfiques avaient un pas plus lourd.

Peu à peu, cette sensation d'être suivie s'estompa pourtant, au profit du calme plat de la forêt. Trop calme peut-être, car la jeune fille redoubla d'attention. Quelque chose clochait avec ce silence.

Un cri troubla soudain la quiétude des lieux et Léna fit aussitôt volte-face, les oreilles dressées, le nez en l'air. Ce ne pouvait être une ombre, ils apprenaient tous à rester calmes face aux démons pour être capables de les combattre. Ce devait donc être un humain qui s'était aventuré un peu trop loin dans la forêt. Mais cela n'arrivait jamais, personne ne s'aventurait si loin, à l'exception des ombres... La jeune fille se rua en direction des cris, courant à en perdre haleine dans les broussailles. Enfin, elle débarqua dans une petite clairière au bord de la montagne et le spectacle qui s'offrit à elle la laissa sans voix.

Debout, acculé à la paroi, se trouvait un humain. Un jeune homme qui devait avoir à peu près son âge, avec des cheveux châtains en bataille et des yeux verts, de magnifiques yeux verts qui se posèrent sur elle lorsqu'elle atteint la clairière. Malgré la détresse qu'elle y lisait, elle vit que le regard de l'humain était empreint d'une admiration sans faille, et son cœur s'accéléra, la figeant presque sur place. Ils échangèrent ainsi un long regard, sans faire un seul geste. Mais le démon qui menaçait le garçon rappela Léna à l'ordre d'un rugissement féroce. Il était grand, noir, avec cette forme indéfinissable, légèrement floue, qu'ont les démons en raison de leur magie qui trouble leurs traits, comme si on ne les avait pas finis, laissant leurs contours tremblants, variables. Celui-ci était plutôt petit, ce devait être un jeune, mais il n'en était pas moins féroce.

La Nuit des OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant