6-qu'est-ce qu'on fait?

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Lundi matin, 8h25.

Charlotte, écoutant d'une oreille distraite le cours de Français, griffonnait dans la marge de son carnet. Comme prévue, elle s'était questionnée sur le baiser de la veille toute la nuit. Impossible de fermer l'œil. Avery lui avait dit de lui laisser un peu de temps, voilà pourquoi elle ne lui avait pas téléphoné le soir même. Elle patientait.

Elle avait espéré que son amie viendrait lui parler avant le début des cours. Elles n'étaient pas dans la même classe cette année, elles ne partageaient que le cours de sport qui n'aurait lieu qu'en fin d'après-midi. Hors, lorsque la brune était entrée dans la cour du collège ce matin, au lieu de venir s'assoir sur le banc en face du portail où Charlotte l'attendait, la gothique avait accepté de participer au pseudo match de foot que ses copains avaient attaqué en tapant dans une stupide balle de tennis. Pas de conversation. Rien. A peine un salut de la main accompagné d'un sourire.

Lundi matin, 10h. Récréation. Comme chaque matin depuis leur entrée en sixième, Avery faisait la queue devant la fenêtre du foyer pour acheter deux pains aux chocolats. Leur nombre était limité et inférieur à celui des clients. Comme à son habitude, elle joua des coudes et terrorisa quelques sixièmes pour atteindre la nourriture tan convoitée et en apporta une à Charlotte, un sourire fière de sa victoire sur le visage.

Elles discutèrent des dernières nouvelles dans leurs classes respectives, du prof de français, de comment Avery avait presque tordu la cheville d'un de ses camarades plus tôt dans la matinée en taclant la balle de tennis, mais pas un mot sur la veille.

Lundi matin, 11h45.Charlotte aurait voulu initier la conversation d'elle-même, mais les mots d'Avery résonnaient encore dans sa tête. "Laisse-moi profiter". Comment lui en vouloir d'avoir envie de garder toutes les sensations qu'elles avaient ressenti sans les ternir d'une mise au point? Bien sûr, c'était son droit. Mais la blonde, elle, ne pouvait pas rester dans l'ignorance. Ses questionnements allaient la rendre folle... Tout en faisant tourner son stylo dans sa main, elle essaya de justifier le comportement de son amie durant la récréation.

Elles n'avaient qu'un quart d'heure de pause après tout. Cette discussion méritait certainement d'y consacrer un peu plus de temps. Ce n'était pas rien que de parler de l'avenir de leur amitié. Voilà, c'était ça. La récréation était trop courte, Avery viendrait surement lui parler à la pause déjeunée.

Lundi après-midi, 14h15.Toujours rien. Elles avaient mangé avec des amies, n'avaient parlé que de garçons, et rien. Avery l'avait à peine regarder.

Lundi après-midi, 16h30.Charlotte avait décidé de mettre son cerveau sur pause. C'était le seul moyen qu'elle avait trouvé pour survivre à cette épreuve. Elle en était au point de se porter volontaire pour ne pas jouer durant le cours de sport lorsqu'il y avait un joueur de trop par équipe. Elle qui adorait le sport et la compétition, elle en était à un tel niveau de dépit que plus rien ne l'intéressait. Elle restait assise sur le banc le plus souvent possible et se contentait du strict minimum sur le terrain. Quand Avery s'en inquiéta et lui demanda si ça ne la dérangeait pas d'être remplaçante, elle lui répondit "m'en fout" d'un air lasse et retourna s'assoir.

A 17h, quand la sonnerie retentie pour annoncer la fin de la journée, Charlotte se rhabilla sans un mot dans les vestiaires et rejoignit la sortie. Avery lui courut après sur le trottoir.

 — Charlotte! Est-ce que ça va? T'avais pas l'air bien en sport.

— Ah. J'avais pas fait attention, répondit la blonde comme si rien ne l'importait.

— Et là, t'as l'air d'être passée en mode zombi. Genre j'avance mais je sais pas où je vais.

— Ah. Si tu le dis.

Ma personne préféréeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant