NEUVIEME MOIS - (1) Où elle a un avant-goût.

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Ça y est, je suis enceinte de huit mois.

C'était le cap que je m'étais fixée, je voulais arriver au moins jusque-là. Plus de risque d'accouchement prématuré, donc. L'idéal serait que notre petite fourmi reste encore au chaud un petit moment, mais je commence à trouver ça vraiment long. Nous avons choisi son prénom, la chambre est prête, et la dernière séance de préparation à la naissance aura lieu la semaine prochaine. Et surtout, la liste de mes petits problèmes liés à la grossesse ne cesse de s'allonger. J'ai des insomnies et des reflux gastro-oesophagiens qui me brûlent terriblement dès que je tente de m'allonger. La seule manière pour moi de dormir quelques heures est donc de le faire assise. Sauf que ça ne convient pas à ma petite footballeuse qui bourre mes côtes de coups de pied rageurs. Mes gencives saignent dès que je mange quoique ce soit de solide, je ne peux plus me nourrir que de purées, soupes, compotes depuis une semaine, ce qui ne m'aide pas à grossir.

La bonne nouvelle, c'est que mon col n'a pas bougé. Après le stress de la mort de Montolo, et ma longue sortie inhabituelle, j'avais eu pas mal de contractions. On s'est même inquiétés que le travail ait commencé, et Tom m'a conduite aux urgences obstétricales, mais ce n'était qu'une fausse alerte. Le gynécologue que j'ai vu sur place m'a recommandé d'être encore raisonnable durant trois semaines environ. Puis, à la barre symbolique des huit mois et demi, je pourrai reprendre une vie normale, avec activité physique et tout ce que cela englobe.

D'ici la naissance, et à cause de la thalassémie et du diabète, une sage-femme passe deux fois par semaine à la maison, pour un monitoring et un examen de contrôle, et de mon côté, je m'autorise un peu plus de sorties.

Solène a accouché avant-hier. Un beau petit garçon de 4,158kg, prénommé Marius. Heureusement, Nico et elle nous avaient révélé le prénom en avance, on a eu le temps de s'y faire. Peut-être que les gens détesteront aussi le prénom que nous avons choisi. Peu importe, il nous plaît à nous, et c'est la seule chose qui compte. En plus, je suis peut-être partiale, mais il est magnifique et je suis certaine qu'il lui ira comme un gant.

Nous nous rendons à la maternité le troisième jour, après avoir laissé la maman se reposer et la place aux grands-parents. J'accoucherai au même endroit, je dois d'ailleurs venir visiter le service la semaine prochaine. Ça me fait drôle de longer les couloirs en pensant que bientôt, ce sera mon tour.

Avant de nous rendre à l'hôpital, nous sommes passés chez l'oncle et la tante de Tom récupérer Loris qui a dormi là-bas la nuit dernière. Pas facile pour Nico de se partager entre Solène et Marius d'un côté, Loris de l'autre. Un problème que nous n'aurons pas encore. Nous sommes restés déjeuner, un moment très sympa même si j'ai dû me contenter de la jardinière de légumes écrasée à la fourchette et d'une crème dessert. J'ai ensuite regardé mon cher et tendre galérer avec sa canne pour installer le siège auto dans la voiture, puis le petit dans le siège, et nous nous sommes rendus à l'hôpital. A présent, mon filleul sautille dans le corridor, en nous mettant en garde : Il est mignon, mais il a pas de seveux. Moi, z'aime pas trop sans seveux, c'est bizarre, mais ça va pousser. Tu sais, des fois, il crie fort, des fois, il dort, alors il faut pas faire de bruit. Je suis son grand frère, hein. Maman a dit que si ze suis saze, ze pourra lui donner son biberon.

Ce petit bonhomme qui saute, accroché à ma main, tout en babillant, est le dernier nouveau-né que j'ai eu dans les bras, et je me souviens encore de mon émotion la première fois que je l'ai vu. Mon neveu, le fils de mon frère. Depuis, j'ai appris que Nico et moi n'avons pas de vrai lien de sang, mais peu importe. Et cette fois, c'est encore plus fort. Dans un mois environ, c'est moi qui serai à la place de Solène, avec ma fille contre moi.

Couchée sur son lit, Solène répond à quelques messages de félicitations quand nous entrons, mais se lève immédiatement pour serrer son fils aîné contre elle. Nico, dans le fauteuil, donne le biberon à Marius. Tom et moi nous approchons le plus doucement possible pour ne pas troubler la quiétude du petit être qui tête. J'envoie un baiser à mon frère qui me répond par un sourire radieux. La paternité lui va si bien.

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